[Critique à retrouver dans le magazine têtu· de l'hiver] Marseille vit, Marseille vibre, Marseille émerveille… Avec Fotogenico, sorti au cinéma ce mercredi 11 décembre, Marcia Romano et Benoît Sabatier nous font découvrir la jeunesse queer et rock'n'roll de la cité phocéenne.
Paumé. C'est un peu l'impression que donne Raoul quand il débarque à Marseille pour comprendre pourquoi et comment sa fille Agnès est morte. Ce représentant en vin fauché qui vit désormais au jour le jour se lance dans une enquête en forme de road movie urbain. Là, il va faire la connaissance d'un monde qui lui est étranger, celui de sa fille : des meufs queers et rock'n'roll qui semblent vivre dans un univers parallèle, un monde de petits trafics, de petits arrangements où musique, fête et drogue ne sont jamais très loin.
Fotogenico, le groupe fictif qui donne son titre au film, et leur unique album deviennent le carrefour de ce récit mouvant qui se joue des codes du thriller, du film de rock, du drame urbain et se nourrit de personnages et de territoires inédits : la jeunesse underground de Marseille passionnée de création, baignant dans la fluidité des genres et des sexualités… Un monde nouveau pour Raoul, pas tout à fait branché, pas tout à fait boomer, auquel Christophe Paou, l'inconnu séduisant et terrifiant de L'Inconnu du lac, prête sa silhouette flottante et dégingandée, son regard bleu faussement naïf et son don pour le port du slip rouge en toute circonstance.
Queer et rock'n'roll
"Le point de départ du projet est l'enterrement d'un ami mort d'overdose, se souvient la coréalisatrice, Marcia Romano. Le cercueil était très lourd et c'est le dealer qui l'a porté. Cette image nous a énormément marqués parce que c'est aussi ça la vie et ça permet au film d'éviter tout surplomb moral." "Cela permet de traiter du choc des générations, poursuit le coréalisateur, Benoît Sabatier. Raoul ne comprend rien à ce monde dans lequel il débarque et, finalement, il finit par se retrouver lui-même là-dedans, dans les valeurs de cette jeunesse et sa vengeance sera plus d'ordre symbolique."
Le duo de réalisateurs voulait apporter un regard neuf sur cette ville en pleine "movida", dixit Benoît Sabatier : "On voulait montrer ce côté plus féminin et plus rock'n'roll que j'ai connu en tant que DJ." Mission réussie avec ce film-jeu de piste d'une immense liberté.
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Crédit photo : Envie de tempête