En refusant de laisser entrer sur le territoire un nourrisson né en Arménie pour « soupçon de GPA », le Quai d’Orsay n’a pas tenu compte de "l'intérêt supérieur de l’enfant" selon le Conseil d’Etat.
La veille du jugement, l’avocate Caroline Mécary avait publié un texte dans le Huffington Post intitulé « La Fabrique des orphelins » pour raconter cette nouvelle affaire. Après que l’ambassade de France en Arménie a refusé de fournir à une femme un laissez-passer pour son enfant, le ministère des Affaires étrangères (MAE) a été condamné par le tribunal administratif de Paris le 26 juillet. Le MAE a alors fait appel et saisi le Conseil d’Etat. Celui-ci vient de confirmer le droit de la mère à rentrer sur le territoire avec son enfant. Jean-Marc Ayrault, l’actuel ministre des Affaires étrangères, doit donc fournir à la requérante un laissez-passer dans un délai de sept jours.
Qu'est-ce qu'un "soupçon de GPA" ?
C’est une expression qui met Maître Caroline Mécary en rogne : « Dans le droit pénal, on n’a pas de soupçon, seules les preuves comptent. Le Quai d’Orsay se permet d’avoir des soupçons sur une affaire et de statuer sur ces soupçons ». Or cette histoire est simple, elle relève de l'administratif, et elle ressemble à beaucoup d’autres. D’un point de vue juridique, une femme a eu un petit garçon en Arménie. Il est inscrit sur son acte de naissance qu’elle est la mère. Le Ministère des Affaires étrangères, via son ambassade en Arménie, fait comme si cet acte de naissance n’existait pas sous prétexte qu’il soupçonne un recours à une mère porteuse.
Un gouvernement terrorisé par la Manif pour tous ?
Pour Caroline Mécary, les choses sont très claires : en affirmant que la France n’appliquerait pas les directives de la Cour européennes des Droits de l’Homme dans un entretien paru le 2 octobre 2014 dans le journal La Croix, Manuel Valls a « fait comprendre aux administrations qu’elles pouvaient faire ce qu’elles voulaient. L’obstruction est monnaie courante. Des décisions arbitraires sont prises, uniquement destinées à mettre des bâtons dans les roues des couples qui ont pu avoir recours à la GPA ».
Quand on lui demande si la situation est plus tendue qu’avant la Manif pour tous, l’avocate est formelle :
Oui, les choses se sont durcies, et je place très nettement le tournant au début du débat sur le mariage civil. Les opposants ont créé un débat sur la GPA alors qu’elle ne figurait ni de près ni de loin dans le projet de loi.
Or différents champs judiciaires et administratifs – Cour de cassation, Cour européenne des Droits de l’Homme, Conseil d’Etat – considèrent que l’intérêt de l’enfant doit toujours prévaloir.
Une mise en cause de l'Etat français
L’Association des Familles Homoparentales (ADFH) a prévenu dans un communiqué qu’elle ne s’arrêterait pas là :
Suite aux cumuls de fautes et de responsabilités commises, l’ADFH réfléchit à une mise en cause de l’Etat Français récidiviste dans la gestion de ces nombreux dossiers dont les conséquences sont directement préjudiciables à la vie de ces enfants, qui sont aussi des enfants de la République.
Cette victoire juridique a été saluée, notamment par la sociologue Irène Théry qui annonce sur Facebook qu’un premier colloque scientifique international sur la GPA se tiendra à Paris les 17 et 18 novembre prochains.
Pour en savoir plus :
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