lesbiennesSoko joue "La Danseuse", portrait lunatique de Loïe Fuller

Par Adrien Naselli le 28/09/2016
Soko La Danseuse Loïe Fuller

Le premier film de la réalisatrice Stéphanie di Giusto s'intéresse à Loïe Fuller, icône de la danse à la fin du XIXe siècle. Et la transforme en hétéro...

Soko dans le rôle de Loïe Fuller; Lily-Rose Depp dans celui d'Isadora Duncan; Gaspard Ulliel et Mélanie Thierry au casting; le tableau est plutôt idyllique. Quant au souffle déployé par le biopic de Stéphanie di Giusto, il est remarquable : il commence comme un vieux clip de Mylène Farmer dans les montagnes, la jeune Marie-Louise vivant seule avec son père qui se fait descendre par des chercheurs d'or. L'ambiance est glauque, la caméra embarquée fait un peu mal à la tête, on est fasciné par la fougue avec laquelle la réalisatrice plante son décor alors qu'elle aurait pu faire commencer son histoire à Paris, un peu plus tard.
Soko La Danseuse Loïe Fuller
A la mort de son père, Marie-Louise, esseulée, est contrainte de retourner vivre avec sa mère, dans le New-York des années 1890 fidèlement reconstitué. Sa mère fait partie de la Ligue des femmes pour la tempérance, un organe religieux extrémiste dont elle va devenir à la fois la protégée et la victime. C'est dans ce New-York que naît la future Loïe, elle qui rêve de devenir actrice : après de nombreux castings laborieux, elle se fait remarquer pour une danse impliquant de longues robes et de grands mouvements de bras qui donnent l'illusion d'un papillon en plein vol ou d'une fleur qui tournoie.
"Tu es trop en avance pour l'Amérique, c'est Paris qu'il te faut", lui dit-on. Elle saute dans un paquebot et ne reviendra jamais. L'ellipse opérée par le film est d'ailleurs un peu surprenante : à peine décide-t-elle de partir qu'elle passe un premier casting sauvage aux Folies Bergères, où elle tiendra la tête d'affiche pendant de longues années. Les reconstitutions des performances avant-gardistes de Loïe Fuller font dresser les poils sur les bras.

Soko La Danseuse Loïe Fuller
Frederick Glasier, "Portrait de Loïe Fuller" (1902), photographie.

La relation lesbienne disparaît

Sur son blog Mediapart, l'auteure Aude Fonvieille a critiqué la réalisatrice pour avoir transformé la sexualité de Loïe Fuller en lui inventant "l'homme de sa vie", Louis, le personnage joué par Gaspard Ulliel, un aristocrate drogué et désœuvré. Quant à Gabrielle Bloch, leur relation n'est que vaguement suggérée par trois œillades de Soko et de Mélanie Thierry alors que Loïe Fuller et elle se sont fréquentées pendant plus de trente ans.
Soko La Danseuse Loïe Fuller
Aude Fonvieille relate notamment dans cet article les réactions de Stéphanie di Giusto à ses questions lors d'une avant-première qui répond par exemple que Loïe Fuller "a été mariée" (comme si cela empêchait quelqu'un d'être homo) et que "l'idée n'était pas de refaire La Vie d'Adèle", provoquant les rires de la salle. Quant à Soko, elle a rappelé sa propre bisexualité, comme pour dire que personne n'a tenté de taire la sexualité de Loïe dans ce film... Pas même les producteurs ?
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