homosexualitéTrump a-t-il un plan pour décriminaliser l’homosexualité dans le monde entier ?

Par Rozenn Le Carboulec le 22/02/2019
Trump

Le 19 février, l'ambassadeur américain en Allemagne a fait une annonce pour le moins étonnante. Son administration aurait ainsi pour projet de décriminaliser l'homosexualité dans le monde. Des déclarations qui ont de quoi nous laisser sceptiques. Explications.

Un plan pour décriminaliser l’homosexualité à travers le monde. Rien que ça. C’est l’annonce étonnante faite le 19 février dernier par Richard Grenell, ambassadeur américain en Allemagne. Ce diplomate ouvertement gay le plus en vue de l'administration Trump recevait ce jour-là, dans sa résidence berlinoise, des activistes LGBT+ venus de toute l’Europe, a rapporté NBC News. Parmi eux, des membres d’une association lituanienne, qui n’ont pas manqué de saluer sur Twitter cet "effort pour la défense des droits humains".

Trump pas au courant ?

"Il est inquiétant de constater qu'au XXIe siècle, quelque 70 pays continuent de se doter de lois criminalisant le statut ou la conduite des personnes LGBTI", a affirmé Richard Grenell. Il n’a toutefois pas donné de détails sur ce fameux plan. Plus étonnant encore : Donald Trump lui-même ne semble pas avoir été mis au courant. Interrogé à ce sujet le mercredi 20 février, le président américain a d'abord demandé à la journaliste de répéter sa question. "Je ne sais pas de quel rapport vous parlez. Nous avons beaucoup de rapports", a-t-il ensuite répondu, toujours selon NBC News.

https://twitter.com/tfitzsimons/status/1098624180025737216?ref_src=twsrc%5Etfw%7Ctwcamp%5Etweetembed%7Ctwterm%5E1098624180025737216%7Ctwgr%5E363937393b70726f64756374696f6e&ref_url=https%3A%2F%2Fwww.nbcnews.com%2Ffeature%2Fnbc-out%2Fi-don-t-know-trump-draws-blank-homosexuality-decriminalization-push-n974161

Une annonce pas officialisée

Cette annonce est donc pour le moins "ambiguë", commente auprès de TÊTU Laurence Nardon, responsable du programme Amérique du Nord à l'Institut français des relations internationales (Ifri) : "Il s’agirait d’une initiative de l’ambassadeur, qui ne vient pas du département d’État ni de la Maison Blanche directement, et qui n’a pas été officialisée, même s’il est très peu probable qu’il ait agi sans accord préalable".

Sur Twitter, une journaliste émet une autre hypothèse : "Ou peut-être qu’il est au courant mais ne veut pas le reconnaître devant la caméra car cela risquerait d’offenser une partie de sa base électorale", analyse Maggie Haberman, correspondante du New York Times à la Maison Blanche.

Un moyen d'attaquer l'Iran

L’évocation de ce "plan", qui serait avant tout une réaction à une nouvelle exécution d’un homme gay en Iran, peut toutefois servir les intérêts de Trump. La République islamique, où les relations entre personnes de même sexe sont criminalisées depuis 1979, constitue aujourd’hui le premier ennemi géopolitique de l’administration américaine. Pour Laurence Nardon, "c’est un moyen de lancer une initiative qui nuit à l’Iran sans trop gêner ses autres alliés".

Donald Trump souhaiterait-il, par ailleurs, draguer l’électorat LGBT à travers une telle annonce ? "Agiter la menace d’un islam anti-gay peut constituer un moyen, pour les partis d’extrême droite, d’amener à eux l’électorat LGBT. C’est d’ailleurs ce que fait le Rassemblement national en France", ajoute la chercheuse à l'Ifri.

Une politique anti-LGBT

Le 5 février dernier, Donald Trump avait annoncé, lors de son discours annuel devant le Congrès, vouloir mettre fin à l’épidémie de sida aux États-Unis d’ici 10 ans. Avec ce plan visant à dépénaliser l’homosexualité dans le monde entier, l’administration américaine brouille de nouveau les pistes, en annonçant une politique radicalement opposée à ce à quoi elle nous avait habitué.e.s.

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Rappelons en effet que les États-Unis ont multiplié les attaques à l’encontre des personnes LGBT+ ces derniers mois. Dès juillet 2018, l’ONG Human Rights Watch s’alarmait dans un rapport des conséquences dévastatrices de la politique de Trump sur l’accès des personnes LGBT+ au système de santé américain. Sa politique discriminatoire n'a ensuite fait que s'amplifier.

Le projet d’une redifinition stricte de "l’identité sexuelle" laissait ainsi présager le pire pour les personnes trans', en octobre dernier. Le même mois, le président américain s’en prenait aux conjoints de diplomates LGBT. Et le 22 janvier, la Cour suprême a autorisé Trump à bannir les personnes trans’ de l’armée. Avant d'envisager des mesures internationales, l'administration américaine ferait donc mieux de s'assurer du respect des droits des personnes LGBT+ sur son propre territoire.

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Crédit photo : Doug Mills / POOL / AFP.