ChinePour guérir le coronavirus, la piste des antiviraux contre le VIH

Par Timothée de Rauglaudre le 05/02/2020
VIH

Alors que le coronavirus chinois continue de se répandre, des scientifiques de l'hôpital de Wuhan ont lancé un essai clinique pour tester une combinaison de médicaments comprenant des antiviraux utilisés contre le VIH.

Le bilan ne cesse d'augmenter. À l'heure actuelle, le coronavirus a fait près de 500 morts sur plus de 24 000 cas confirmés. En France, six Français ont déjà été contaminés et sont dans un état "stable", a affirmé la ministre de la Santé Agnès Buzyn ce mercredi 5 février sur BFM TV. Comme l'a expliqué la revue américaine Science dans un article publié lundi 27 février, mettre un point un vaccin pour traiter un nouveau virus peut prendre plusieurs mois, voire plusieurs années. C'est pourquoi les scientifiques tentent d'utiliser des médicaments déjà existants, utilisés pour traiter pour d'autres types de virus. Ainsi, l'hôpital Jin Yintan de Wuhan, en Chine, où les 41 premiers patients connus ont été traités, a lancé un essai pour voir si une combinaison de médicaments anti-VIH pourrait aider à traiter le coronavirus, comme le rapportaient le 24 février des scientifiques chinois dans la revue britannique The Lancet. Deux antiviraux, le lopinavir et le ritonavir, sont combinés à un médicament anti-grippe.

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La combinaison cible la protéase, une enzyme développée à la fois par le VIH et les coronavirus. D'après l'article publié dans The Lancet, il existe des preuves que cette combinaison peut fonctionner. En effet, une étude publiée en 2004 montrait que celle-ci produisait un "bénéfice clinique substantiel" lorsqu'il était administré à des patients souffrant d'un syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS), causé par un coronavirus similaire au 2019-nCoV qui a fait des centaines de morts en Chine. Toutefois, note Science, l'étude n'a pas respecté "standard pour les essais contrôlés", en particulier sur l'échantillon aléatoire et l'effet placebo. La revue américaine ajoute que l'essai effectué à l'hôpital de Wuhan a reçu le soutien financier, à hauteur de 2 millions de dollars, de la société biopharmaceutique américain AbbVie, qui commercialise la combinaison testée sous le nom de Aluvia.

Séquences ressemblantes

Mais cet essai clinique n'est pas le seul lien qui a pu être établi entre le coronavirus et le VIH. Mardi 4 février, le quotidien québécois Le Soleil a publié un article intitulé "Vérification faite : des bouts de VIH dans le coronavirus ?" Il répond à la question d'une lectrice qui dit avoir vu circuler sur les réseaux sociaux un article scientifique affirmant que "le virus en question possède des séquences provenant du VIH". Dans sa réponse, le journaliste explique que l'étude en question a bien été rédigée par deux chercheurs indiens, "par ailleurs sérieux", de New Delhi. "Il est aussi vrai que le texte parle de « séquences d’acides aminés » dans certaines protéines du coronavirus chinois (2019-nCoV) qui ressemblent en tout point à des bouts de protéines du virus de l’immunodéficience humaine (VIH, qui cause le sida)", écrit-il.

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L'étude des chercheurs indiens souligne également que ces séquences similaires au VIH sont absentes des autres coronavirus humains, comme le SRAS. Comme le relève Le Soleil, certains internautes ont interprété ces informations pour supposer, dans une nouvelle "théorie du complot", que ces séquences auraient été ajoutées au 2019-nCoV en laboratoire. Or, le journaliste émet plusieurs objections à l'égard de cette étude. D'abord, "l’article est paru sur le site de prépublication BioRxiv, qui est un endroit où des chercheurs en sciences de la vie peuvent publier des résultats préliminaires afin d’en discuter entre experts, et ce sans passer par la révision des pairs pratiquée dans les revues savantes". Ensuite, ces séquences similaires aux VIH sont aussi présentes dans d'autres coronavirus, non pas humains, mais animaux. "Il n’y a aucune raison de suspecter que ce coronavirus-là a incorporé des bouts de VIH", écrit un autre chercheur au Soleil. Les deux chercheurs indiens ont d'ailleurs retiré l'étude du site Internet en fin de semaine dernière.

 

Crédit photo : Pixnio