Plusieurs chefs d'États souhaitent utiliser la négociation du plan de relance européen pour sanctionner notamment les atteintes aux droits LGBT+ en Pologne.
Les institutions européennes s'inquiètent des droits LGBT+ en Pologne, alors que des centaines de localités ont annoncé des zones "sans LGBT". Le sommet européen qui s'est conclu dans la nuit du lundi 20 juillet a mis à l'agenda les dérives de la Pologne. Les droits LGBT+ y sont contestés depuis que le parti nationaliste et conservateur Droit et Justice (PiS) est arrivé au pouvoir il y a cinq ans. Pendant la campagne présidentielle qui vient de s'achever, Andrzej Duda s'en est récemment pris, en pleine campagne électorale, à "l'idéologie LGBT+".
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Après quatre jours et quatre nuits d'intenses négociations, les 27 se sont mis d'accord sur un plan de relance de 750 milliards d'euros. Et pendant les négociations, certains pays ont poussé pour que la Commission gèle les aides aux pays qui sapent les valeurs démocratiques. Xavier Bettel, le premier ministre Luxembourgeois ouvertement gay avait alors exprimé son agacement. "Si on accepte qu'un pays condamne une minorité sexuelle, demain, ce sera la religion et le jour suivant la couleur de peau", s'emportait-il auprès de Reuters.
Des sanctions financières possibles, mais compliquées à mettre en oeuvre
La France et l'Allemagne avaient notamment plaidé pour réduire les fonds. "C'est simple, pas d'État de droit, zéro euro", avait lâché Emmanuel Macron pendant les négociations. Alors que le texte initial prévoyait un régime de sanctions, la version finale n'évoque que des "mesures" en "cas de manquement" aux principes démocratiques. Dans une complexité propre à l'Union, la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a assuré que le texte issu des négociation autorise des sanctions financières. Ce qui n'a pas empêché les dirigeants polonais et hongrois de se frotter les mains. "Il n'y aura pas de lien direct entre le soi-disant État de droit et les ressources budgétaires", a estimé le Premier ministre polonais.
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De nombreuses localités qui se définissent "sans LGBT" ont reçu quelque 36 milliards d'euros depuis l'entrée de la Pologne au sein de l'UE en 2004. Parmi elles, Konskowola, une petite ville de l'Est de la Pologne, bénéficie d'une subvention conséquente pour moderniser le système d'irrigation. Son maire accuse l'Europe de "chantage". "Des baisses de subventions pourraient être mises en oeuvre parce que nous avons une opinion. Ce n'est pas de la discrimination ça ? ", s'agace-t-il auprès de l'agence Reuters.
Une augmentation inquiétante de l'homophobie
Sur place, Honorata Sadurska, une vétérinaire bi de 26 ans originaire de Konskawola, regrette une augmentation de l'homophobie. "J'ai été poussée dans le bus et quelqu'un m'a crié dessus. Est-ce en raison de la mise en place de la zone 'sans LGBT' ? Je ne sais pas ce qui est arrivé en premier, l'oeuf ou la poule", raconte-t-elle. Selon elle, une réduction des aides européennes "ne ferait qu'isoler encore plus des endroits comme ça". Par ailleurs, Openly une ONG polonaise a lancé une pétition pour que l'agence européenne de lutte contre la fraude (OLAF) enquête pour savoir si des localités "sans LGBT" n'avaient pas détournés des fonds européens.
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