famillesLa maternité biologique d'une femme trans reconnue pour la première fois en justice

Par Nicolas Scheffer le 09/02/2022
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Depuis huit ans, l'état civil refusait à une femme transgenre d'être mentionnée sur l'acte de naissance de son enfant pourtant conçu de manière charnelle. La cour d'appel de Toulouse a finalement donné raison à Claire.

"L'arrêt est historique", souligne l'avocate de la plaignante. Ce mercredi 9 février, la cour d'appel de Toulouse a reconnu pour la première fois la maternité biologique d'une femme transgenre. Car jusqu'à présent, Claire (le prénom a été modifié) n'était pas mentionnée sur l'acte de naissance de sa fille de huit ans, alors même qu'elle est son parent biologique. La décision de la cour "établit judiciairement le lien de filiation maternelle et dit que cette filiation sera transcrite sur l'acte de naissance". "Un arrêt clair, bienveillant et complet", se félicite auprès de TÊTU Me Clélia Richard.

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Claire a obtenu son changement d'état civil en 2011, trois ans avant la naissance de sa fille qu'elle a conçue de manière charnelle avec sa compagne. Devant notaire, elle a reconnu son enfant quelques jours avant sa naissance en mars 2014, mais l'officier d'état civil lui a ensuite refusé la reconnaissance de sa fille.

L'intérêt de l'enfant a primé

Huit ans plus tard, après un long périple judiciaire, la cour d'appel a donné raison à Claire, aujourd'hui âgée de 52 ans, et demande donc à ce que l'acte de naissance soit modifié pour y faire apparaître sa seconde mère. L'avis des magistrats suit en cela l'avis du parquet général : il est dans l'intérêt de l'enfant de pouvoir "mener une vie familiale normale, conforme à l'identité de genre et à l'état civil de ses deux parents", avait plaidé le procureur général dans ses réquisitions.

Le parquet général avait toutefois demandé que le nouvel acte de naissance fasse mention de la transidentité de Claire. Une requête déplacée, estime Clélia Richard : "Il soutenait que c'était important au nom de l'accès aux origines de l'enfant, une demande qui n'a pas de sens puisque l'acte de naissance établit un mécanisme de filiation. Le changement d'état civil de Claire est un renseignement personnel qui n'a pas à figurer sur l'acte de naissance".

Claire reconnue mère, point.

Dans sa décision, la cour donne entièrement raison à l'avocate, jugeant "qu'une telle mention porterait une atteinte disproportionnée aux droits au respect de la vie privée de l'enfant et de sa mère". De plus, la jeune fille "pourra avoir accès à ses origines biologiques par le biais de l'acte de naissance de sa mère qu'il lui sera loisible de demander à tout moment". Plus encore, la cour d'appel de Toulouse reconnaît que la fille de Claire peut porter son nom de famille, car il en est de l'intérêt de l'enfant de s'appeler comme ses deux grands frères (conçus avant la transition de Claire à l'état civil en 2011).

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En 2018, la cour d'appel de Montpellier avait accordé à Claire le statut de "parent biologique", un jugement cassé par la Cour de cassation en septembre dernier, lui proposant d'adopter sa propre fille, ce qu'elle a toujours refusé. Cette décision du 9 février peut encore être susceptible d'appel du parquet général. "Nous, on ne bougera pas car cet arrêt répond à quasiment toutes nos demandes", souligne Clélia Richard, particulièrement heureuse de cette décision.

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