tribuneSecond tour de la présidentielle : "Nous, LGBTQIA, ferons barrage à l'extrême droite"

Par Nicolas Scheffer le 22/04/2022
Présidentielle : ce que réclament les associations LGBTQI+

[Tribune] Plusieurs dizaines de responsables politiques ou acteurs et actrices LGBTQI+ de la société civile appellent à voter Emmanuel Macron au second tour de l'élection présidentielle ce dimanche 24 avril, contre Marine Le Pen et son parti porteurs de reculs pour les LGBT.

Une fois encore, l’élection présidentielle de la Ve République nous met face au non-choix entre Emmanuel Macron et l'extrême droite. Nous entendons de nombreuses et nombreux LGBTQI aujourd'hui tenté·es par Marine Le Pen,  l'abstention ou le vote blanc. Si nous pouvons comprendre ces interrogations, elles ne peuvent rester sans réponse. Nous, lesbiennes, gays, bi·es, pan·es, trans, intersexes ou asexuel·les, engagées pour nos droits, nous leur disons : n’oublions pas.

Non, n’oublions pas notre histoire, faite d’horreurs infligées à nos communautés par l’extrême droite lorsqu’elle a accédé au pouvoir. Nous n’oublions pas la violence LGBTQIA-phobe d’État qu’elle continue d’exercer aujourd’hui au Brésil, en Pologne, en Hongrie et dans trop de pays que Marine Le Pen érige en modèles. Elle qualifiait de "chantage inacceptable" la suspension par la Commission européenne du versement de fonds aux régions prétendument "sans LGBT".

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Nous n’oublions pas non plus l’histoire du Rassemblement national, un parti qui dénonçait les lois "anti-homophobes" en 2002. Un parti dont le fondateur qualifiait nos existences d’"anomalies biologiques et sociales", condamné pour avoir fait l’amalgame entre homosexualité et pédocriminalité ou qui souhaitait la création de "sidatoriums" pour enfermer les personnes vivants avec le VIH.  

"Nous n’oublions pas l’héritage laissé à son tour par Marine Le Pen et son parti contre nos droits."

Nous n’oublions pas qu’il s’agit d’un parti dont l’héritière, à l’heure de faire l’égalité devant le mariage civil et l’adoption, continuait de qualifier nos revendications pour l’égalité de "lobby". L'héritière d'une histoire marquée par le rejet et la haine des LGBTQIA qui, l'an dernier, soutenait la loi interdisant la "promotion" de l’homosexualité auprès des mineur·es de son ami Viktor Orbán en Hongrie, déclarant qu'il "ne faut faire la promotion d'aucune sexualité auprès des mineur·es". Pour rappel, les personnes LGBTQIA ont quatre fois plus de risque de se suicider que la population générale.

Le 15 avril 2022, elle affirmait à une lesbienne qui l’interpelait, enfant au bras, qu’elle “ne [retirerait] aucun droit aux [Français·e·s]". Nous n’oublions pas l’héritage laissé à son tour par Marine Le Pen et son parti contre nos droits : contre le mariage et l’adoption, contre la procréation médicalement assistée (PMA) pour toutes, contre une résolution condamnant les déclarations anti-LGBT de communes polonaises au Parlement européen, contre les associations communautaires au niveau municipal.

"Là où Emmanuel Macron laisse une partie des LGBTQIA sur le bord de la route de l'égalité, Marine Le Pen, elle, veut nous en exclure."

Nos identités, nos sexualités, sont un tabou de son projet mortifère pour les minorités sexuelles et de genre : nos lettres LGBTQIA, nos identités, notre existence, n’y figurent pas. Des droits, nous n’en aurons pas de nouveaux, puisque le volet “famille” de son programme prévoit “un moratoire de trois ans sur les sujets sociétaux” au terme duquel elle les soumettrait “éventuellement” au référendum. Le populisme réactionnaire instrumentalise toujours la démocratie contre les droits fondamentaux. 

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Là où Emmanuel Macron n’a pas tenu la promesse d’une PMA pour toutes et tous en excluant les hommes trans ou la double maternité pour les lesbiennes, Marine Le Pen affirme que "oui, un enfant a droit à avoir un père" dans la négation de la diversité des familles qui existent. Là où il refuse l’ouverture d’un débat sur les conditions d’une gestation pour autrui (GPA) éthique, elle souhaite refuser la reconnaissance des enfants né·es par ce biais à l’étranger, au mépris de leur intérêt supérieur donc. Là où il s’est contenté de l’interdiction de l’inscription des seuls pays criminalisant les LGBTQIA dans leur droit sur la listes des pays dits “d’origine sûre” en matière d’asile, elle souhaite forcer les personnes à demander l’asile au consulat des pays de départ, les mettant de fait en danger. Là où il a imposé le délai de carence pour les demandeurs et demandeuses d’asile au mépris de leur droit à la santé, elle voudrait supprimer purement et simplement l’aide médicale d’État. Là où Emmanuel Macron laisse une partie des LGBTQIA sur le bord de la route de l'égalité, Marine Le Pen, elle, veut nous en exclure.

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Les violences LGBTQIA-phobes augmentent déjà d'année en année. On sait combien les militant·es d'extrême droite sont violent·es et leur violence tue déjà. Qu'en sera-t-il s’ils et elles se sentent pousser des ailes, soutenu·es par une LGBTQIA-phobie d'État, comme elle existe déjà par exemple en Hongrie ? Ce dimanche 24 avril 2022, ne nous y trompons pas : controns le scénario du pire en votant, non pas pour Emmanuel Macron, mais bien contre Marine Le Pen. Il en va de nos libertés de personnes et de militant·es LGBTQIA. Le lendemain, il sera trop tard.

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Signataires :

Morgan Jasienski, coresponsable de la commission Immigration d’EÉLV
Antoine Alibert, adjoint au maire du 20e arrondissement de Paris en charge des solidarités, des affaires sociales et du plan Climat, cosecrétaire d’EÉLV Paris
Éric Arassus, président de la FSGL
Frédéric Badina, conseiller de Paris EÉLV du 18e arrondissement
Fanny Baklouti, militante pour l'accès aux droits des minorités et collaboratrice d'élu.e.s écologistes 
Christine Bard, historienne et féministe
Nadhéra Beletreche, candidate du Pôle Écologiste sur la 15e circonscription de Paris, militante féministe, antiraciste et contre les LGBTphobies
David Belliard, adjoint à la maire de Paris en charge de la transformation de l'espace public, des transports, des mobilités, du code de la rue et de la voirie
Alix Béranger, militante féministe
Chris Blache, militante féministe et LGBTQI+, co-fondatrice de Genre et Ville
Flora Bolter, co-directrice de l'Observatoire LGBT+ (Fondation Jean-Jaurès) 
Corinne Bouchoux, élue locale, ancienne sénatrice (2011/2017) 
Lyes Bouhdida-Lasserre, adjoint au maire du 20e arrondissement de Paris en charge de la jeunesse, de la petite enfance et de la vie étudiante, membre de l'équipe nationale des Jeunes Socialistes, 
Mélissa Camara, conseillère municipale de la ville de Lille et conseillère métropolitaine 
Théo Challande Névoret, adjoint au maire de Marseille, en charge de la Lutte contre les discriminations 
Antoine Chassagnoux, président d'Act Up-Paris
Jérémie Crépel, conseiller municipal de Lille, membre de la direction nationale d'EÉLV et fondateur d'Homovert·es
Cédric Daniel, militant de la lutte contre le VIH/sida
Laure Dasinieres, journaliste indépendante
Sabri Dauphin, militant de la lutte contre le sida
Alexandra Dethyre, militante Génération.s LGBTI+
Joël Deumier, ancien président de SOS homophobie
Alex Deval, coordinateur de la commission LGBTQI d’EÉLV 
Luc di Gallo, adjoint au maire de Montreuil et Génération.s LGBTI 
Jean-Luc Dumesnil, conseiller régional écologiste Île-de-France et conseiller du 17e arrondissement de Paris
Casey Fabries, co-secrétaire général et activiste Act Up-Paris 
Géraldine Franck, militante féministe et antispéciste
Hélène Hardy, membre de la direction nationale d'EÉLV déléguée aux élections
Mélanie Jaoul, maîtresse de conférences en droit privé, présidente de AATDS et adhérente Act Up-Paris
Luc Lebon, adjoint au maire du 11e arrondissement de Paris en charge du sport et de l'espace public 
Fred Lebreton, journaliste et activiste VIH/LGBT+
Damien Loret, co-référent Génération.s LGBTI
Annabel Maestre, conseillère d’arrondissements Marseille 4/5 et responsable associative (Contact 13) 
Antoine Maurice, élu municipal EÉLV Toulouse
Aminata M'Bengue, militante associative,
Claire Mermoz,  commission LGBT EÉLV 
Lauric Micheland, trésorier national du parti Allons Enfants 
Océane Montagnac, membre de l'équipe nationale de HES LGBTI+ 
Lennie Nicollet, président de HES LGBTI+
Florence Pelissier-Combescure, militante féministe
Sarah Persil, vice-présidente du conseil régional Bourgogne Franche-Comté en charge de la jeunesse, de la vie associative, de la citoyenneté et de la démocratie participative
Denis Quinqueton, codirecteur de l’Observatoire LGBT+ de la Fondation Jean-Jaurès 
Lydie Raer, élue municipale à Ivry-sur-Seine
Jean-Luc Romero-Michel, adjoint à la maire de Paris en charge des droits humains, de l’intégration et de la lutte contre les discriminations
Sophie Roques, adjointe PS au maire de Marseille en charge de l’état civil et de l’accueil des nouveaux Marseillais 
Sarah Roubach, militante Génération.s LGBTI
Chloé Sagaspe, conseillère de Paris et membre de la direction nationale d’EÉLV déléguée à la jeunesse, au climat & à l'environnement, 
François Vauglin, maire PS du 11e arrondissement de Paris 
Éva Vocz, chargée de mission pour Act Up-Paris
Mélanie Vogel, sénatrice écologiste des Français.e.s établi.e.s à l'étranger

Crédit photo : Elodie Hervé pour têtu·