[Retrouvez dans votre têtu· du printemps les sorties à ne pas rater cette saison] Cœur errant, film du réalisateur argentin Leonardo Brzezicki, explore les méandres de nos psychés et de nos addictions. En salles ce mercredi 5 avril.
À l’aube de la cinquantaine, Santiago est en roue libre. Déboussolé par une rupture, bientôt abandonné par sa fille qui part étudier à l’étranger, ce chef cuisinier argentin noie sa peine dans des soirées chemsex interminables. Mais alors qu’il perd pied, c’est à une quête de soi que nous invite le personnage. “Le film raconte une crise d’identité, confirme Leonardo Brzezicki, le réalisateur de Cœur errant, sélectionné en compétition au dernier festival Chéries-Chéris. Au fil de notre vie, on porte beaucoup de masques pour survivre. Mais à force, on se déconnecte de la réalité. J’y ai été confronté et c’est ce que je voulais montrer.”
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À l’écran, la détresse de ce chien perdu sans collier bouleverse autant que sa solitude, jamais étanchée par sa frénésie de sociabilité. Les mauvaises décisions se multiplient à la cadence de ses plans foireux. Le réalisateur tenait aussi à aborder le phénomène chemsex sans détour, mais d’une manière qui ne soit évidemment pas celle, voyeuriste et moralisatrice, des chaînes d’info en continu. “J’ai moi-même galéré, à une période de ma vie, avec certaines expériences liées au chemsex. Je voyais plein d’hommes gentils autour de moi mais, derrière leur sympathie, je discernais un vide et une douleur en eux, développe-t-il. Les plaies qu’on cache nous conduisent à des comportements autodestructeurs. C’est un sujet difficile, mais je me devais de l’aborder.”
Leonardo Sbaraglia, vu récemment chez Almodovar
Chez Santiago, le manque d’amour-propre s’apparente à une blessure béante, qu’il essaie en vain de panser dans sa course aux paradis artificiels et aux tendresses forcées par la chimie. “C’est une connexion qu’il cherche, appuie l’auteur du long-métrage. Mais pour se reconnecter à lui-même, et vivre de manière plus authentique, il doit affronter sa honte et arrêter de se fuir.” Leonardo Sbaraglia, déjà remarqué en amant gay dans Douleur et Gloire d’Almodóvar, porte par sa performance vibrante ce portrait intense d’un homme qui tangue.
Toujours lumineux, Cœur errant ne nous laisse pas plonger dans le désespoir. “Ce n’est pas un film sur comment trouver le bonheur, conclut son réalisateur. C’est un film sur comment accepter ce qu’on ressent, le bon comme le mauvais, pour enfin aller de l’avant.”
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