L'association Human Rights Watch s'inquiète de l'accélération des menaces contre les LGBT en Indonésie et dénonce la passivité du gouvernement...
"Ces jeux politiques ruinent nos vies" hurle le nouveau rapport de Human Rights Watch sur les conditions de vie de la communauté LGBT indonésienne. En se fondant sur plus de 70 entretiens (menés avec des anonymes, des militants et des représentants de la société civile), l'organisme de défense des droits humains met aujourd'hui en lumière un durcissement de la discrimination des gays, lesbiennes, bis et trans qui vivent sur l'archipel.
Cette accélération débute en janvier 2016, lorsque le ministre de l'Enseignement supérieur Muhammad Nasir annonce qu'il veut interdire les associations étudiantes LGBT sur les campus car il les estime "contraires aux valeurs et morales de l'Indonésie". Dans sa ligne de mire, un groupe de réflexion sur les études de genre et de sexualité de l'Université d'Indonésie à Jakarta. Bien que Muhammad Nasir finisse par se rétracter en tweetant que les personnes LGBT méritent un traitement égal au regard de la loi, cette prise de position anti-LGBT par un membre du gouvernement ouvre une brèche : un journal conservateur titre que "les LGBT forment une grave menace", le ministre de la Défense identifie le militantisme LGBT comme une "guerre par procuration" pire que la bombe nucléaire car l'ennemi y est invisible, le maire d'une commune demande aux parents d'enseigner à leurs enfants à ne pas être gay... En février, le ministre coordinateur des Affaires politiques, juridiques et de sécurité déclare même que l'homosexualité est "une maladie chromosomique qui devrait être traitée". La semaine suivante, la police réprime avec violence une manifestation LGBT à Yogyakarta mais reste sourde aux menaces de morts dont se plaignent les manifestants.
Des positions politiques qui alimentent l'ostracisme
Les institutions médiatiques, médicales et religieuses prennent également le relais. L'organisation musulmane la plus importante du pays, Nadhlatul Ulama (NU), demande la criminalisation de l'homosexualité et la "réadaptation" forcée des personnes LGBT. Sa position est appuyée par l'Association psychiatrique indonésienne qui recommande une "rééducation" contre ces "maladies mentales". Dans la foulée, la Commission nationale de radiodiffusion fournit des directives de censure contre les programmes qui présentent les personnes LGBT comme "normales".
Or d'après Human Rights Watch, ces "déclarations fallacieuses et tendancieuses des autorités sur les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres" ont cela de grave qu'elles "ont engendré une sanction sociale favorisant le harcèlement et les actes de violence à l’encontre des personnes LGBT indonésiennes, et même des menaces de mort de la part de militants islamistes".
La situation a d'ailleurs pris un virage absurde depuis que la Cour constitutionnelle étudie l'idée de criminaliser les relations entre adultes consentants de même sexe, alors même que l'Indonésie n'a jamais légalement condamné l'homosexualité ! En outre, une telle discrimination légale - qui devrait être débattue lors d'une prochaine audience le 23 août - est totalement contraire au programme dit "Nawa Cita" qu'avait annoncé l'administration Jokowi (du surnom du président indonésien Joko Widodo), et qui promet d'assurer la protection de tous les citoyens et de renforcer la diversité.
A Kyle Knight, l'auteur du rapport de Human Rights Watch, de conclure :
Le gouvernement doit montrer son engagement à protéger les citoyens contre la violence et la discrimination en abrogeant les décrets discriminatoires, en rejetant les propositions de loi anti-LGBT et en faisant gage de soutien public à la liberté d’expression et la diversité.
Pour en savoir plus :
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Crédit photo couverture hipwee.com