La municipalité de Bordeaux a présenté mercredi 15 mai un plan d'action de 20 mesures contre l'homophobie, après une étude particulièrement alarmante. Parmi elles, des mesures inédites et inspirantes.
La mairie de Bordeaux a dévoilé le 15 mai un passage piéton aux couleurs de l'arc-en-ciel à côté du Grand Théâtre de la ville. Une initiative prise à l'occasion de la journée mondiale de lutte contre l'homophobie, vendredi 17 mai, qui s'accompagne d'une vingtaine d'autres mesures de la municipalité pour lutter contre les discriminations LGBTphobes.
"Le contexte à Bordeaux était assez préoccupant", explique Marik Fetouh, adjoint au maire de Bordeaux en charge de l’égalité, contacté par TÊTU. En effet, dans une étude réalisée auprès de 1600 bordelais LGBT, on apprend que 85% d'entre eux ont eu à subir un acte LGBTphobe en 2018 : injures, présence inquiétante, agression... Un chiffre alarmant, au regard du récent rapport de SOS Homophobie, du nombre de plaintes déposées en 2018, et du dernier rapport de l'Ifop et de la Fondation Jean Jaurès. Pourtant, selon l'élu, il n'y a rien de spécifique à la métropole aquitaine :
"La seule spécificité, c'est que nous avons pris le taureau par les cornes, et que nous sommes les premiers à avoir commandé une étude sur le sujet. Si Marseille ou Toulouse avaient commandé une étude de ce type, sans doute que les résultats auraient été les mêmes, voire pires."
À LIRE AUSSI : Bordeaux : une enquête sur le sentiment de discrimination des LGBTI dans la ville
Des stages de self-defense
La mairie de Bordeaux a donc décidé de réagir, et a adopté le 29 avril dernier un plan d'action pour lutter contre les LGBTphobies. Il a été voté à l'unanimité par le conseil municipal, "même par les deux élus Rassemblement National", ajoute l'adjoint.
Au programme : vingt mesures, parfois cosmétiques - comme le passage piéton ou l'illumination de la porte de Bourgogne aux couleurs arc-en-ciel - mais souvent nécessaires. La municipalité propose par exemple de mettre en place, outre un guide de prévention, un réseau d'accès aux droits pour les victimes de discriminations et de violences, en lien avec la police, le parquet, l'ordre des avocats ou encore le défenseur des droits. Des stages de self-defense et de confiance en soi, proposés dans les associations, seront également financés.
Les élus entendent aussi "poursuivre" la formation des agents municipaux, et en priorité de la police, de l'état civil et des agents d'accueils. Les employés de Kéolis, le réseau de transport local, devraient également recevoir une formation de sensibilisation. Tout comme les étudiants des Instituts de formation de santé dépendants du CHU.
À LIRE AUSSI : Marseille : une rue repeinte aux couleurs des drapeaux LGBT et trans’
Accès facilité au logement
L'une des mesures notable, et probablement inédite du programme, c'est la prise en charge des jeunes LGBT en rupture sociale et/ou familiale. La mairie leur proposera désormais une "mise à disposition" de logements sociaux. "Concrètement, le CCAS pourra saisir le service logement de la ville pour reloger des jeunes en rejet social, détaille Marik Fetouh, ils deviendront prioritaires dans l'accès aux logements sociaux."
Un loyer, certes modéré, pourrait toutefois restreindre l'accès au dispositif, surtout si on parle de jeunes. Mais Marik Fetouh se veut rassurant :
"Pour certaines femmes victimes de violences conjugales, il peut arriver que nous payions la différence entre le montant des APL et le prix du loyer. Peut-être qu'on le fera pour les jeunes LGBT."
Les associations satisfaites
Pour les associations bordelaises, c'est une belle avancée. D'autant que dans ses engagements, la mairie a promis de faciliter leurs interventions en milieu professionnel, à l'université, et un soutien financier plus important à leurs actions contre l'homophobie. "Dans l'ensemble, on est très content, reconnaît Tristan Poupard, président du Girofard, la principale association locale. Il faut voir ce qui va être mis en place, mais globalement, on est très écouté à Bordeaux. On a la chance d'avoir une relation privilégiée avec les politiques locales, les associations sont toutes membres de la commission coordonnée par la mairie."
Si aucun dossier n'a encore été déposé, la ville de Bordeaux devrait également demander à rejoindre Paris dans le Rainbow Cities Network, un réseau international de villes inclusives. De quoi renforcer un peu l'attractivité touristique de la ville ? "Nous n'avons pas lancé ce plan avec une stratégie touristique, se défend l'adjoint au maire. Les propositions viennent des associations, et ça vise surtout à répondre aux préoccupations des personnes LGBT qui vivent ici. Après, si ça améliore l'image de Bordeaux, pourquoi pas."
Crédit photo : Creative Commons