Le gouverneur de Californie a annoncé mardi la grâce de Bayard Rustin. Mort en 1987, l'activiste a été un pionnier du mouvement des droits civiques. Mais son homosexualité lui avait valu de la prison et une mise à l'écart de la sphère militante.
C'était une figure de la lutte antiraciste américaine, mais son homosexualité lui a coûté cher. Mardi 4 février, le gouverneur de Californie Gavin Newsom a officiellement gracié l'activiste Bayard Rustin, comme le rapportait le lendemain le New York Times. Celui-ci a été arrêté et condamné à cinquante jours de prison en 1953 pour "perversion sexuelle", pris sur le fait dans une voiture à Pasadena en Californie, à une époque où l'homosexualité était encore durement réprimée aux États-Unis. Il a trouvé la mort en 1987 à l'âge de 75 ans. "Bayard Rustin était un meneur acharné du mouvement des droits civiques, a déclaré Newsom sur son compte Twitter. Il a été arrêté et emprisonné parce qu'il était gay. Notre pays a une sombre histoire d'oppression et de persécution. Il est de notre devoir de reconnaître cela et de réparer les torts de notre passé."
Bayard Rustin was a fierce civil rights leader. He was arrested and imprisoned because he was gay.
Our country has a dark history of oppression and persecution. It's our duty to acknowledge that and right the wrongs of our past. pic.twitter.com/31SwnXMfx6
— Gavin Newsom (@GavinNewsom) February 6, 2020
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Pendant plusieurs décennies, Bayard Rustin a été stratège politique et conseiller du pasteur Martin Luther King Jr., figure de proue du mouvement des droits civiques américain. Il milite pour la fin des discriminations raciales dans l'armée. Il joue un rôle central dans l'organisation du boycott des bus de Montgomery en 1955 et 1956, après l'arrestation de Rosa Parks qui avait refusé de céder sa place à un passager blanc comme l'y obligeait alors la législation.
Décoré post-mortem par Obama
Mais l'homophobie prédominante dans la société et dans la sphère militante à l'époque effacera, temporairement, son rôle dans le mouvement des droits civiques. Car, à une époque où les émeutes de Stonewall de 1969 n'ont pas encore sonné le début du mouvement de libération gay, Bayard Rustin ne cache pas son homosexualité. Dans les mouvements militants auxquels il prend part, on l'incite à confiner cette partie de sa vie dans le quartier new-yorkais de Greenwich Village. Après son arrestation en 1953, il perd ses postes au Congress of Racial Equality (CORE), qu'il a cofondé, et au Fellowship of Reconciliation (FOR).
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Au crépuscule de sa vie, dans les années 1980, il défendra, sans faire partie d'une organisation, les droits des gays et des lesbiennes. "Même si je n'ai aucun problème à être identifié publiquement comme homosexuel, il serait malhonnête de ma part de me présenter comme celui qui a été à l'avant-garde de la lutte pour les droits des homosexuels, écrivait-il dans un livre un an avant sa mort. Je considère fondamentalement l'orientation sexuelle comme une affaire privée. En tant que tel, ce n'est pas un facteur qui a grandement influencé mon rôle en tant que militant." La mémoire de Bayard Rustin a été progressivement réhabilitée de son vivant. En 2013, le président Barack Obama lui avait déjà accordé à titre posthume la médaille présidentielle de la Liberté - équivalent de la Légion d'honneur française.
Crédit photo : New York World-Telegram and the Sun staff photographer / Wikimedia Commons