LGBTQI+"Le Lobby", l'émission de radio militante et inclusive qui donne la parole aux personnes queers

Par Florian Ques le 22/06/2020
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Entre chroniques intimes, retours sur l'actu et interviews militantes, ce programme de Radio Campus est un safe space d'information et de débat pour la communauté LGBT+.

Les créneaux entièrement consacrés aux thématiques queers ne sont pas monnaie courante dans l'espace public. C'est un constat. Car bien que les podcasts friendly ou tout simplement conçus par les concernés soient de plus en plus nombreux avec le temps, la radio, elle, est un peu à la traîne. Le Lobby entend rectifier le tir. Lancée à l'automne passé sur les ondes de Radio Campus Paris, cette émission prend le relais du Placard, son aînée, et compte bien s'imposer comme un espace de parole libre et sans jugements pour les membres de la communauté.

Aux antipodes de son prédécesseur qui optait pour un rendez-vous hebdomadaire, Le Lobby préfère miser sur un format mensuel. Tous les mois donc, une heure environ pour décortiquer les avancées – ou les pas en arrière – de la communauté LGBTQ+. Et, surtout, tendre le micro aux concernés et les laisser s'exprimer. "La vraie différence selon moi avec Le Lobby, c'est le côté politique et militant de l'émissionatteste Colin, membre du comité restreint en charge du programme. Évidemment, Le Placard, c'était déjà politique mais là on essaie quand même d'aller chercher des témoignages, de trouver des figures positives qu'on ne voit pas trop ailleurs".

Mot d'ordre : inclusivité

Au gré de ses premiers enregistrements, Le Lobby a convié dans son studio des personnes concernées, militants associatifs ou artistes performers. L'équipe de l'émission a ainsi pu échanger avec Minima Gesté sur la fascination que suscite la scène drag depuis quelque temps ou encore avec les activistes du collectif Femmes en lutte 93 à propos de la convergence nécessaire des combats sociétaux. Des sujets en apparence disparates que Le Lobby parvient à harmoniser par sa ligne directrice. "On n'est pas qu'une émission queer, on est une émission qui représente les minorités, précise Louise. On est une émission antiraciste, féministe, antifascite, anticlassiste, antivalidiste. Et ça, c'est très important pour nous".

"L'idée, ce n'est pas non plus de faire un bingo des minorités [...] mais de faire un effort"

Pour cette dernière, également aux commandes du programme depuis son lancement, Le Lobby semble s'apparenter à une sorte de revanche, ou tout du moins une réparation pour les zones d'ombre laissées par les médias français généralistes. "On est journalistes et il est normal que pour produire du contenu, on s'inspire parfois de nos vécus, détaille-t-elle. Mais aujourd'hui, traiter des questions queers dans les médias français est vu comme du militantisme. C'est problématique. [...] Dans cette émission, j'ai vraiment trouvé mon terrain d'expression et aussi un endroit où l'actu queer est bien traitée, voire traitée tout court, en fait."

L'équipe du Lobby s'efforce au maximum de rebondir sur l'actualité chaude ou, le cas échéant, de se lancer sur un sujet trop souvent survolé ou laissé pour compte. "Durant la période de confinement, on a essayé de se concentrer sur les gens qui souffraient des conséquences de la pandémie comme les travailleurs et travailleuses du sexe, les personnes trans précaires, les femmes racisées précaires..., explique Colin Gruel. Là, pour une prochaine, on s'est rendus compte qu'on n'avait jamais rencontrés de personne intersexe dans l'émission. L'idée, ce n'est pas non plus de faire un bingo des minorités [...] mais de faire un effort".

Parité et respect de toutes et tous

Le Lobby s'engage aussi à respecter au maximum la parité au niveau de ses intervenants. "En janvier, on recevait deux mecs donc j'ai présenté l'émission, assure Louise. Ça nous est paru complètement naturel d'avoir une femme qui présente l'émission pour ne pas avoir que des voix masculines".

Mais les têtes pensantes de l'émission s'efforcent d'être précautionneuses dans leurs prises de parole et dans le choix des mots qu'ils utilisent à l'antenne. "On fait toujours attention à utiliser le bon vocabulaire, à bien genrer les invités qu'on reçoit, reconnaît Victor, lui aussi impliqué dans le projet depuis ses débuts. On fait toujours gaffe de ne pas être validistes, de ne pas être grossophobes, de ne pas être sérophobes. C'est important".

"Une émission généraliste mais LGBT+"

Pour celui-ci d'ailleurs, Le Lobby, malgré son orientation éminemment queer, ne s'adresse pas qu'aux principaux concernés. Bien au contraire. "L'idée, c'est d'avoir une émission généraliste mais LGBT+, avance-t-il. C'est forcément un peu paradoxal comme définition mais il faut que ce soit une émission intéressante dans laquelle les gens apprennent des choses mais qui ne soit pas destinée qu'à la communauté. Elle leur est destinée avant tout, je trouve ça important et ce n'est pas un aspect dont il faut se cacher, mais je trouve ça tout aussi intéressant que l'émission puisse apporter des informations et transmettre un peu de savoir à un public plus large".

"Niaque arc-en-ciel"

Mais au-delà de sa visée informative, le programme queer de Radio Campus Paris a pour ambition d'éveiller l'âme de battant qui sommeille chez ses auditeurs. "Notre ligne éditoriale entre guillemets, c'est de trouver des gens qui donnent la pêche et qui donnent envie de se battre, souligne Colin Des gens qui sont en colère, qui sont drôles mais qui, en tout cas, donnent une sorte de niaque arc-en-ciel [rires]".

Louise est aussi de cet avis-là. "En tant que lesbienne et féministe militante, je me dis que c'est important de toucher un public jeune, reconnaît-elle. Quand j'étais ado dans ma petite ville de province, je n'avais aucune représentation dans les médias. [...] C'est sûr que de mener à bien des projets comme Le Lobby, ça va ouvrir des portes à plein d'autres jeunes. Et ça, c'est plutôt cool".

>> Les émissions du Lobby en replay sur le site officiel de Radio Campus Paris

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Crédit photo : Fernando Lavin via Unsplash