TRIBUNE. En France, des organisations et personnes prétendent frauduleusement pouvoir changer ou « guérir » les personnes LGBTI+. Face aux violences que constituent ces méthodes, l'Inter-LGBT appelle le gouvernement à inscrire de toute urgence dans son agenda parlementaire une loi réellement adaptée pour lutter contre ces pratiques.
Les pratiques connues sous le nom de « thérapies de conversion » constituent une violation flagrante des droits à l’intégrité physique et psychique, à la santé et à la libre expression des personnes LGBTI+. Lorsqu’elles sont menées par la force, elles représentent également une violation de l’interdiction de la torture et des mauvais traitements selon Victor Madrigal-Borloz, l’expert indépendant de l’ONU sur la protection contre la violence et la discrimination fondées sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre.
Dès lors, nous ne pouvons que saluer la volonté politique des autorités françaises d’interdire les « thérapies de conversion » sur notre territoire. Que la question soit enfin prise au sérieux au plus haut sommet de l’État est un signal fort envoyé aux rescapé·e·s ayant subi de graves souffrances psychologiques et physiques durables.
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Véritable danger
Dans un article du journal Le Parisien du 10 octobre 2020, Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’Intérieur chargée de la Citoyenneté, a annoncé que le gouvernement soutiendrait l’interdiction des « thérapies de conversion » dans la loi confortant les principes républicains (dite loi sur les séparatismes).
La volonté d’inscrire cette interdiction par voie d’amendements dans un projet de loi « confortant les principes républicains » nous rend profondément inquièt·e·s. En effet, les « thérapies de conversion » ne concernent pas uniquement les approches confessionnelles, mais également des approches qui se prétendent médicales et sociales. Il existe un véritable danger pour que cette interdiction ne soit, dès lors, pas à la hauteur des risques et des ravages causés.
Par ailleurs, le projet de loi « confortant les principes républicains » est loin de faire l’unanimité et nous pose de nombreuses questions, dont certaines dispositions du texte pouvant menacer la liberté d’association et avoir un effet dissuasif sur les défenseur·e·s des droits humains et les organisations de la société civile. Nous ne souhaitons pas que la question de l’interdiction des « thérapies de conversion » – qui fait pourtant consensus au niveau national, européen et international – soit instrumentalisée à des fins idéologiques dans un projet de loi déjà controversé et dénoncé.
Une action politique à mener, et des textes déjà proposés
Après une mission d’information à l’Assemblée nationale menée en 2019 par les député·e·s Bastien Lachaud (La France Insoumise) et Laurence Vanceunebrock-Mialon (La République En Marche), cette dernière a déposé cet été une proposition de loi « interdisant les pratiques visant à modifier l’orientation sexuelle ou l’identité de genre d’une personne ». Cette proposition de loi contribue à apporter des réponses adaptées, en commençant à définir ces pratiques, créant des condamnations pénales et les ajoutant aux critères de pratique illégale de la médecine. De plus, la proposition de loi se penche également sur l’éducation, la sensibilisation et la connaissance de ces pratiques, répondant ainsi à une réelle nécessité d’une prévention en complément d’une réponse a posteriori.
Dans une tribune au journal Le Monde, un collectif de rescapé·e·s appelait le gouvernement à soutenir la proposition de loi n°3030 pour interdire ces pratiques. Il signifiait aussi qu’il ne voulait pas du « texte au rabais », annoncé par Marlène Schiappa dans le projet de loi confortant les principes républicains par voie d’amendements.
Un projet exhaustif
Un projet de loi spécifique ne serait pas uniquement symbolique. Sa rédaction lui permettra au contraire d’être exhaustif et de lutter concrètement contre le phénomène des « thérapies de conversion » en France. L’inter-LGBT recommande également d’inclure l’interdiction des pratiques visant à modifier sans consentement les caractéristiques sexuelles dans la définition des pratiques connues sous le nom de « thérapies de conversion » pour protéger les personnes intersexes.
Il est plus qu’urgent que la loi française rattrape son retard et prenne toute la mesure de la réalité, de la gravité et des conséquences dévastatrices des « thérapies de conversion ». À travers un projet de loi qui puisse être vérifié par le Conseil d’État et qu’y soient associés les organismes concernés et les associations mobilisées, le gouvernement doit inscrire un texte contre les « thérapies de conversion » dans le calendrier parlementaire pour une promulgation avant la fin de l’actuelle mandature d’Emmanuel Macron.
Autres associations cosignataires : Les ActupienNEs, AIDeS, ASMF, Au-delà du Genre, Bi’Cause Centre LGBTQI+ de Paris-Ile de France, Couleurs Gaies, David & Jonathan, Fièr·e·s et Révolutionnaires, Fiertés Pas-de-Calais, HES LGBTI+, Mobilisnoo, Play Safe, Solidarité Internationale LGBTQI