Abo

sériesOn a parlé queer et Céline Sciamma avec Monica Raymund, l'actrice de "Hightown"

Par Florian Ques le 19/11/2021
Rencontre : Monica Raymund, l'actrice queer qui crève l'écran dans la série "Hightown"

Après Chicago Fire, l'actrice queer Monica Raymund excelle dans la série Hightown, où elle joue une flic lesbienne rongée par des problèmes d'addiction. TÊTU l'a rencontrée.

Rien ne prédestinait la jeune Monica Raymund, geek assumée et férue de théâtre classique, à incarner une agente fédérale addict aux stupéfiants. Et pourtant ! Depuis l'an dernier, l'actrice née en Floride brille dans la série Hightown, où elle interprète la tourmentée Jackie Quiñones. En plus de devoir gérer ses problèmes de dépendance à l'alcool et aux drogues, celle-ci doit investiguer le meurtre d'une jeune femme dont le corps est retrouvé échoué sur la plage. Enfin ça, c'était à l'ouverture de la première saison. Depuis, la flic la plus queer de Cape Cod (sur la côte est des États-Unis) a fait du chemin.

À lire aussi : "Sort Of" : une comédie décalée sur la non-binarité (mais pas seulement)

Un travail de proximité pour Hightown

"Au début de la saison 2, on retrouve une Jackie vraiment déterminée à surmonter son addiction, nous assure son interprète, tandis que la diffusion des épisodes inédits se poursuit chaque lundi en streaming sur Starzplay. Elle se sent plus ancrée dans les buts qu'elle se fixe, elle est plus posée. Mais d'autres personnages succombent à leur addiction. Ce n'est pas toujours lié à l'alcool ou aux drogues. Ça peut être au sexe, au travail, au danger. L'addiction peut prendre plusieurs formes."

Afin de faire honneur au personnage de Jackie et de représenter l'addiction de la façon la plus authentique possible, Monica Raymund a d'abord puisé dans son entourage. "Malheureusement, j'ai l'impression que bon nombre d'entre nous connaissent des amis ou de la famille qui ont des problèmes d'addiction, explique-t-elle. C'est une maladie très répandue sur laquelle on trouve beaucoup de renseignements. J'ai eu accès à ces ressources et j'espère avoir fait suffisamment de recherches pour faire de Jackie un personnage captivant."

On a parlé queer et Céline Sciamma avec Monica Raymund, l'actrice de "Hightown"
Crédit photo : Starzplay

S'il y a une chose que Jackie Quiñones aime plus que sa bouteille de whisky, ce sont les femmes. Sur ce point, l'actrice n'a pas eu à aller creuser très loin pour interpréter au mieux la sexualité de son personnage dans Hightown. En 2014, alors qu'elle est à l'affiche de la série Chicago Fire qui cartonne aux États-Unis, Monica Raymund révèle sa bisexualité au monde via un post Twitter. "C'était il y a si longtemps, commente-t-elle. Si je devais recommencer, je m'y prendrais sans doute différemment. Mais je ne regrette rien. J'étais prête à raconter mon histoire, je devais être inspirée par la relation dans laquelle j'étais et le bonheur qu'elle m'apportait."

"Je suis contente de faire partie d'un vrai changement."

Bien qu'elle se catégorise désormais comme queer plutôt que bi, l'actrice de 35 ans se réjouit de pouvoir camper une protagoniste lesbienne dans un polar comme Hightown. "Le fait de pouvoir me représenter moi-même et ma communauté était extrêmement important, insiste-t-elle. Pendant de longues années, il n'y avait pas de personnes comme moi à la télévision parce qu'on ne nous laissait pas la place pour exister. Je suis contente de faire partie d'un vrai changement."

À Hollywood, certains sont d'avis de confier les rôles queers à des interprètes queers. Monica Raymund, elle, préfère prendre des pincettes sur le sujet. "Je ne dirais jamais que le fait que je sois queer et que je joue un personnage queer fasse la différence, estime la comédienne. Pour moi, ça a surtout à voir avec les expériences que j'apporte, qu'importe comment je m'identifie. Tout dépend de comment un·e interprète va se préparer pour le rôle. Je ferais attention à ne pas en faire une situation trop binaire, surtout à une époque où on fuit toutes formes de binarité."

The L Word, Shakespeare et Céline Sciamma

Lorsqu'on lui demande quels ont été ses modèles LGBTQI+ en grandissant, la star de Hightown sèche. Mais elle a une icône qu'elle admire au quotidien : Regina King. "Elle sait comment orienter sa carrière, souligne-t-elle. C'est une comédienne, une réalisatrice, une productrice... Pour moi, il n'y a pas plus inspirante qu'elle." Monica Raymund a déjà commencé à marcher dans ses pas, passant derrière la caméra pour réaliser un épisode de New York, crime organisé, un spin-off de la série culte New York, unité spéciale. Une expérience enrichissante et rendue d'autant plus marquante qu'elle a ainsi pu travailler aux côtés d'Ilene Chaiken, la fameuse créatrice de... The L Word.

On a parlé queer et Céline Sciamma avec Monica Raymund, l'actrice de "Hightown"
Crédit photo : Starzplay

"On m'a fait découvrir The L Word quand j'étais à l'université et c'est la première fois que j'ai vu la communauté queer dépeinte à l'écran, se remémore-t-elle, un large sourire sur le visage. Je devais avoir 18 ou 19 ans et c'est un âge où on se forme encore. Cette série a beaucoup influé sur moi. Alors quand j'ai rencontré Ilene pour la première fois, j'étais une vraie fangirl, je n'arrêtais pas de lui dire à quel point son œuvre avait un impact." L'actrice ne dirait sans doute pas non à un petit rôle dans Generation Q, la version contemporaine de The L Word qui vient d'achever la diffusion de sa deuxième saison. Car si elle ne manque pas d'une chose, c'est d'imagination.

Quand on lui demande les rôles qu'elle adorerait endosser, les idées fusent. "L'opportunité que je rêverais d'avoir, ce serait de jouer Catharina dans une adaptation de La Mégère apprivoisée de William Shakespeare, confie-t-elle. Ou bien incarner Lady Macbeth. J'ai été dans l'école de théâtre la plus intello du monde, à savoir Julliard, donc ça explique mes choix (Rires)." Elle s'imaginerait tout aussi bien dans un drame d'époque lesbien : "Portrait de la jeune fille en feu est une grosse référence, Adèle Haenel est incroyable dedans. Et bien sûr, Céline Sciamma est une de mes réalisatrices préférées. Ce serait fou de travailler pour elle." Le message est passé.

À lire aussi : "The L Word" : lesbien nécessaire

Crédit photo : Starzplay