La finale de l'Eurovision 2024 se tient le samedi 11 mai à Malmö en Suède. Et puisqu'il nous est impossible de voter pour Slimane, le candidat de la France, autant choisir parmi les huit participant·es out & proud !
L'Europe fait face à deux échéances majeures en ce printemps 2024 : les élections européennes, le 9 juin près de chez vous, et la finale de l'Eurovision, le 11 mai à Malmö en Suède. Si le concours européen de la chanson est depuis des années une grand-messe queer, cette édition s'inscrit dans le haut du panier en termes de visibilité LGBT+ : 20% des artistes qui prétendent au titre, soit huit des 37 participant·es, sont out, quasiment un record (en 2021, c'était neuf candidat·es). De quoi augmenter les chances que la couronne reste dans la commu, après le sacre l'an dernier de la chanteuse suédoise bi Loreen – pour la deuxième fois.
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Alors, puisqu'on ne peut pas voter pour le pays où l'on réside, et qu'il nous sera donc impossible de soutenir notre cover boy du printemps Slimane, représentant cette année la France avec sa chanson "Mon amour", têtu· vous tire le portrait des 8 candidat·es queers qui nous permettront de voter arc-en-ciel. Et ce n'est certainement pas Nicky Doll, à la présentation cette année pour la France des demi-finales de l'Eurovision, qui vous dira le contraire : ne merdez pas !
- Nemo (Suisse) – "The Code"
Après avoir percé en 2016 grâce à une séquence, devenue virale sur les réseaux sociaux, dans le pendant suisse de l'émission de radio Planète rap, Nemo est, à 24 ans, une étoile montante de la scène musicale helvétique, et a notamment reçu quatre Swiss Music Awards en 2018.
Figurant parmi les favoris de cette édition de l'Eurovision avec sa théâtrale et dense chanson "The Code", mêlant pop, rap et opéra, Nemo y parle de quête de soi. "Me trouver moi-même a été un voyage long et souvent difficile. Mais rien n’est plus agréable que la liberté que j’ai acquise en réalisant que je suis non-binaire", raconte t-iel. "Quelque part entre les 0 et les 1, c’est là que j’ai trouvé mon royaume", ajoute l'artiste, filant la métaphore de son morceau entre binarité de genre et système informatique binaire.
- Olly Alexander (Royaume-Uni) – "Dizzy"
Rendu célèbre avec son groupe Years & Years, Olly Alexander, âgé de 33 ans, poursuit sa carrière en solo. Après une performance remarquée dans la mini-série It’s a Sin en 2021, un bon classement à l'Eurovision viendrait achever cette mue.
S'engageant régulièrement pour les droits des personnes LGBTQI+, Olly Alexander a promis de "porter le drapeau du Royaume-Uni de la manière la plus gay possible". Avec "Dizzy", morceau pop rétro redoutablement entraînant dans lequel le chanteur fantasme une histoire d’amour qui ne cesserait jamais d’être tendre et de lui donner le "tournis", c’est bien parti pour.
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- Megara (Saint-Marin) – "11h11"
Avec ses cheveux noirs d'un côté et rose pétant de l'autre, Kenzy Loevett ne passe pas inaperçue. Après avoir bien failli représenter l'Espagne à l'Eurovision l'année dernière avec Megara, le groupe de "fucksia rock" et de "fucksia métal" (mélange de "fuck" et de "fuchsia") qu'elle a fondé en 2015, la chanteuse queer espagnole de 32 ans a retenté sa chance cette année, sans davantage de succès.
Le groupe s'est alors présenté aux sélections de Saint-Marin, micro-État enclavé dans le centre-nord de l'Italie, dont il portera finalement les couleurs. Baptisé "11h11", en référence à cette heure miroir aux nombreuses significations en numérologie, son morceau pop-rock teinté de flamenco est inspiré des expériences du groupe et fait office de réponse à ses détracteurs : "Si tu ne m’aimes pas, je m’en fous, d’autres personnes m’aimeront !" Voilà qui est dit.
- Silvester Belt (Lituanie) – "Luktelk"
Reconnaissable aux bijoux de nez semblables à des pansements qu'il arbore régulièrement, Silvester Belt a été révélé en 2017 par un télé-crochet qu'il a remporté, à l’issue d’une aventure marquée par son coming out queer. Quatorze ans après avoir échoué à représenter son pays à l'Eurovision Junior, c’est finalement à l'édition adulte que le jeune homme désormais âgé de 26 ans concourt.
Avec son morceau pop-électro "Luktelk" (qui peut se traduire par "attends"), chanté en lituanien, Silvester Belt aspire à mettre des mots sur le sentiment d'avoir besoin de danser pour faire face à ce que la vie nous réserve, d'autant plus lorsqu’on se sent coincé entre la sensation de n'être que l'ombre de soi-même et celle de se sentir pleinement vivant.
- Bambie Thug (Irlande) – "Doomsday Blue"
Chanson sur un chagrin d'amour ou malédiction jetée sur son ex ? Au vu de l'univers résolument sombre de Bambie Thug, adepte de sorcellerie, il y a de quoi s'interroger en écoutant "Doomsday Blue".
Décrit tantôt comme un "breakdown électro-métal", tantôt comme de la "ouija pop" (du nom de la planche censée permettre de communiquer avec les esprits), ce morceau explosif est à la fois déroutant et libérateur, de même que son interprète, Bambie Thug, 30 ans et plusieurs singles à son actif depuis 2021. Un ton lié à la prise de conscience et à l'acceptation de sa non-binarité ? "Je me suis permis·e d’être plus libre en tant que personne, et donc plus libre dans ma musique", explique-t-iel. Espérons qu'il en soit de même sur la scène du concours !
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- Mustii (Belgique) – "Before the Party’s Over"
Séries, films, théâtre, musique, juré de Drag Race Belgique… Mustii est du genre touche-à tout. Récompensé en 2019 d'un Magritte du meilleur espoir masculin (équivalent belge des César), l'artiste queer de 33 ans tente de relever un nouveau défi : représenter son pays à l'Eurovision, en succédant à un autre artiste queer belge, Gustaph.
À travers "Before the Party’s Over", Mustii nous encourage à vivre intensément, à expérimenter pour se trouver, à s'assumer pleinement, malgré les hauts et les bas, "avant que la fête ne soit finie". "Aimez-vous comme vous êtes et la vie sera toujours une fête", acquiesceraient certainement ses homologues françaises de Drag Race.
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- Saba (Danemark) – "Sand"
Passée par le mannequinat et l'entreprenariat, Saba a un parcours pour le moins atypique. Montée sur scène pour la première fois seulement l'année dernière, la chanteuse dano-éthiopienne de 26 ans a même bien failli devenir footballeuse professionnelle. Seulement, sa bipolarité et ses multiples séjours en hôpital psychiatrique en ont décidé autrement. Une expérience qui devrait lui servir au moment d'interpréter sa chanson pop "Sand".
"Je sais que la chanteuse queer Mélanie Wehbe a écrit « Sand » en pensant à une ex-compagne mais, moi qui ai beaucoup souffert de maladies mentales dans ma vie, j'y vois plutôt la perte de contrôle et le sentiment que la chose à laquelle on essaie de s’accrocher le plus nous glisse entre les doigts", explique Saba.
- Electric Fields (Australie) – "One Milkali (One Blood)"
Se présentant comme "deux frères féminins" qui "embrass[ent leur] féminité parce qu’elle fait partie [d'eux] et [les] rend plus forts", Zaachariaha Fielding et Michael Ross se sont rencontrés il y a une dizaine d’années pour travailler ensemble pour le compte d'une connaissance commune. Depuis lors, les deux artistes queers ne se sont plus quittés – professionnellement.
Décrit par la presse australienne comme si "les Daft Punk rencontraient Nina Simone dans la forêt profonde", leur duo Electric Fields a échoué de peu à représenter l'Australie à l'Eurovision en 2019. Cette année est la bonne. Avec "One Milkali (One Blood)", chanté en partie en yankunytjatjara pour rendre hommage à la culture aborigène australienne et à la communauté de Zaachariaha Fielding, le groupe partage un message d’unité universelle.
Crédit photo : Nemo, par Jessica Gow / TT News Agency via AFP