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télévision"It's a Sin", une série à voir pour la mémoire et l'émotion, mais aussi pour sa BO

Par Tessa Lanney le 19/03/2024
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Immanquable série sur le début de la crise sida, It's a Sin débarque sur France 2 ce 18 mars. L'opportunité de découvrir à la fois l'œuvre de Russell T Davies et celle des Pet Shop Boys, dont le tube "It's a Sin", qu'Olly Alexander, qui tient le premier rôle dans la série, avait repris au sein du groupe Years & Years.

Plus besoin de débourser un centime pour voir It’s a Sin. La mini-série de cinq épisodes est diffusée sur France 2 ce lundi 18 mars en première partie de soirée, puis disponible en streaming sur le site france.tv. L'occasion si vous avez loupé le coche de découvrir l'un des chefs-d'œuvre de Russell T Davies, qui nous plonge dans l’Amérique des années 1980 marquées par le début de l'épidémie de sida. Pour la bande-son, les Pet Shop Boys, groupe mythique créé à Londres au début de cette décennie d'hécatombe par deux musiciens, Neil Tennant et Chris Lowe, un duo détonnant dont la pop ultra rythmée, qui mêle à merveille guitare et synthé, nous ferait presque oublier les paroles mélancoliques qui l'accompagnent.

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On doit au groupe la chanson "It's a Sin", qui donne son nom à la série dont Olly Alexander tient le rôle principal. L'acteur et chanteur britannique, aujourd'hui candidat du Royaume-Uni à l'Eurovision 2024, en a d'ailleurs livré une reprise avec son groupe Years & Years. Il faut dire que les Pet Shop Boys excellent à retranscrire le sentiment de mal-être que l'on ressent lorsqu'on grandit à la marge : "When I look back upon my life, it's always with a sense of shame. I've always been the one to blame, for everything I long to do" ("Quand je regarde en arrière, c'est toujours avec un sentiment de honte. J'ai toujours été celui qu'on blâme dans tout ce que je veux entreprendre").

La BO des années 1980

Sortie en 1987, "It's a Sin" n'est cependant pas une complainte disco conçue pour l'autoflagellation. Tout tient sur l'ironie des paroles. Le chanteur a fait appel à son éducation catholique pour décrire un protagoniste obsédé par ses péchés, prêt à tout pour satisfaire cette sacro-sainte morale qui repose sur des standards irréalistes et déraisonnables. "Il me semble qu'on n'a cessé de m'inculquer que tout était un péché, expliquait Neil Tennant dans une interview pour la BBC Radio 4 en 2007. Tout ce qu'on voulait faire était un péché, alors je l'ai mis dans la chanson." Son ton provocateur, couplé au rythme sans pareil de la synthpop des années 1980, ont fait de cette chanson le tube numéro 1 du duo.

De fait, le chanteur des Pet Shop Boys a grandi dans les faubourgs de Newcastle, dans le nord de l'Angleterre, où il étouffe. Jeune gay ambitieux qui rêve de briller autant que son idole, David Bowie – avec qui il finira par collaborer –, Neil Tennant exècre les gamins qui l'entourent, obsédés par le football et le rock de gros durs. Il ne parviendra jamais à s'intégrer : "At school they taught me how to be (…) they didn't quite succeed" ("À l'école, ils m'ont appris comment me comporter (…) ils n'ont pas très bien réussi").

Clins d'œil à la commu

Dans une interview aux Inrockuptibles, Neil Tennant confie en 1997 : "Le jour où 'It’s a Sin' est devenu notre premier tube numéro 1 en Angleterre, le directeur de mon école est devenu fou de rage, a demandé à être interviewé dans le journal de Newcastle pour dire que cette chanson était une pure invention, que jamais personne n’avait été aussi maltraité dans son établissement, s'amuse le chanteur. Il a utilisé des mots d’une dureté terrible à mon égard, disant que tout le monde me détestait. Alors que c’était l’inverse : c’est moi qui détestais tout et tout le monde." Et pour cause, l'artiste dénonce tout au long de la chanson son éducation rigide et catholique.

Pendant toute sa carrière, le groupe attaque de front des tabous, comme en 1987 sur la prostitution masculine dans "Rent", chanson extraite de leur deuxième album, Actually (celui de "It's a Sin"). Avec "Being boring", en 1990, la fête laisse place aux larmes. Alors que le sida décime la communauté, Neil Tennant rend hommage aux amis qu'il a perdus. L'expérience communautaire se fait aussi dans la joie : en 1993, le groupe reprend la chanson "Go West", des Village People, dont ils écoulent 100 millions d'exemplaires.

"Je ne voulais pas être gay"

Pour autant, et malgré les spéculations de la presse, les membres des Pet Shop Boys ont longtemps cultivé l'ambiguïté plutôt que de s’exprimer frontalement sur leur orientation sexuelle. Neil Tennant fait toutefois son coming out le jour de ses 40 ans, en 1994. Avec "Methamorphosis", tirée de Bilingual, en 1996, il se met à nu et parle frontalement de son homosexualité, racontant son parcours : "Plus jeune, j’ai tout fait pour lutter contre mon homosexualité. Je ne voulais pas être gay, je voulais me marier, fonder une famille." Avec l’album Nightlife, en 1999, le groupe explore le monde de la nuit dans ce qu’elle a de sensuelle mais aussi de douloureux. On y trouve notamment les récits de relations amoureuses entre amants passionnés, mais aussi une collaboration avec Kylie Minogue dans laquelle ils montrent une conversation entre un père, gay refoulé, et sa fille.

Récemment, la musique des Pet Shop Boys s'est retrouvée sur la bande originale de Sans jamais nous connaître, d'Andrew Haigh, qui fait directement écho au vécu du chanteur. L'un des moments phares du film, un instant de complicité et de compréhension entre une mère et son fils gay, est ainsi accompagné du titre "Always on my mind".

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Crédit photo : DR

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