politiqueDonald Trump, Elon Musk, Javier Milei… le retour des barons voleurs

Par Thomas Vampouille le 31/03/2025
Elon Musk brandit la tronçonneuse de Javier Milei.

[Article à lire dans le magazine têtu· du printemps] Quand Elon Musk brandit la tronçonneuse de Javier Milei pour mimer la mission que lui a assignée Donald Trump, la scène illustre parfaitement la période que nous vivons : ces oligarques au pouvoir ont pour modèle les "barons voleurs" de la fin du XIXe siècle.

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Du réveil des saluts nazis à l'humiliation publique de Volodymyr Zelensky, président de l'Ukraine agressée, dans le bureau ovale de la Maison-Blanche, l'année 2025 est déjà riche d'images que nous espérions ne jamais (re)voir. Mais une autre résume sans doute encore mieux le moment que nous sommes en train de vivre : Elon Musk, bras droit (tendu) de Donald Trump, brandissant une tronçonneuse. Nous sommes le 21 février près de Washington, à la grand-messe des conservateurs américains, la CPAC, et l'outil qu'agite le dangereux fantasque est un cadeau du président argentin, Javier Milei, présent à ses côtés sur scène.

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Depuis sa campagne victorieuse de 2023, cet ultra-libéral a fait de la tronçonneuse le symbole de son projet : une taille drastique dans les dépenses publiques, ce qui est aujourd'hui la mission confiée par Donald Trump au milliardaire patron de Tesla, SpaceX et X (Twitter), Elon Musk.

Milei livre le programme de l'internationale réac

Dans presque tous les domaines, le président argentin agit comme un double de son homologue américain. Invité à l'inauguration de ce dernier le 20 janvier, Javier Milei en est revenu plus euphorique que jamais, jusqu'à tweeter, en défense du "geste innocent" de son camarade Musk (le salut nazi) : "Elon n'est pas seul. Nous sommes des millions. Tremblez, fils de putes de gauchos." Le lendemain, à la réunion annuelle du Forum économique mondial à Davos (Suisse), il a prononcé un discours triomphal en forme de programme pour l'"alliance internationale" (réactionnaire) qu'il assume former avec ses camarades Trump, Musk, l'Italienne Giorgia Meloni, le Hongrois Viktor Orbán et l'Israélien Benyamin Netanyahou.

Au-delà des habituelles saillies contre le "cancer woke" promu par "des pédophiles" et qu'il faut "éliminer", et sous des accents pétainistes – "La paix nous a rendus faibles, nous avons été vaincus par notre propre complaisance" –, ce discours est avant tout un plaidoyer vibrant pour le capitalisme, le vrai, celui qui n'est pas dénaturé par "l'idée sinistre, injuste et aberrante de justice sociale". Il appelle de ses vœux "le retour au libéralisme", seul chemin pour "rendre à l'Occident, sommet de l'espèce humaine, sa grandeur".

Sombre "Gilded Age"

Sous ses airs de Joker médiatique, Javier Milei ne théorise pas de nulle part : l'homme a fait des études d'économie, qu'il a enseignée à l'université avant de travailler pour des grandes banques. Et son discours, comme celui des oligarques désormais à la tête des États-Unis, ne nous renvoie pas tant aux années 1930 qu'à la fin du XIXe siècle. En Europe, c'est l'époque de la Conférence de Berlin (1884-1885), qui a organisé l'exploitation de l'Afrique par les puissances capitalistes européennes, comme l'attelage Trump-Poutine se répartit aujourd'hui les terres rares de l'Ukraine démembrée.

Aux États-Unis, c'était l'âge d'or du capitalisme ("Gilded Age", 1865-1901), celui d'une poignée de magnats de l'industrie qui contrôlaient également la vie politique, et que la mémoire collective a retenu comme "les barons voleurs". Cet "âge d'or" avait déjà été accompagné d'un conservatisme débridé. En 1873, par exemple, était ainsi votée aux États-Unis la loi Comstock, qui interdisait la diffusion d'informations (livres, articles) sur la sexualité ou la contraception. Comme leurs inspirateurs du XIXe siècle, les ultralibéraux d'aujourd'hui multiplient les attaques contre les droits des femmes, des personnes LGBTQI+, et de toutes les minorités sociales. Ils sont les nouveaux barons voleurs.

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