L'homophobie vient à bout du premier festival LGBT en Haïti

Par Jérémie Lacroix le 30/09/2016
Haïti,festival international LGBT Massimadi

Le festival international LGBT Massimadi a dû être reporté sine die suite à des menaces de mort et à l'interdiction des autorités.

Le festival Massimadi est un événement culturel international qui se déroule depuis plusieurs années à Montréal et à Bruxelles. Ce festival des films et des arts afro-caribéens a pour mission première de présenter les réalités des communautés LGBT, notamment en créant "le dialogue afin de lever le voile sur les tabous, les persécutions et les préjugés qu’elles subissent", peut-on lire sur le site internet du festival.

Des menaces de mort

Ainsi, des projections de films et de documentaires, des expositions et des débats étaient prévus à la cinémathèque de Pétion-Ville et à l’Institut Français ainsi que dans les locaux de l'association haïtienne de défense des droits LGBT, Kouraj, organisatrice de l'événement. Cependant, cette dernière a annoncé il y a quelques jours que le festival, qui devait avoir lieu du 27 au 30 septembre, était annulé pour des raisons de sécurité. En effet, à l'annonce de sa tenue, les organisateurs ont reçu de nombreuses menaces homophobes allant jusqu'à l'appel au meurtre sur les réseaux sociaux. Les détracteurs de l'événement invitaient même à incendier les lieux qui accueilleraient les projections et débats pour y brûler les personnes LGBT.
Des menaces prises au sérieux par Kouraj qui a annoncé, dans un court communiqué, ne plus pouvoir accueillir les événements prévus dans ses locaux par mesures de sécurité : "[Nous avons pris] la décision de ne plus accueillir des activités prévues dans le cadre du Festival Massimadi qui devaient se dérouler le jeudi 29 septembre dans [nos] locaux", a expliqué à l'AFP Charlot Jeudy, la présidente de l'association LGBT.

Homophobie d'Etat

Bien que l'homophobie ne soit pas officiellement condamnée en Haïti, il reste extrêmement difficile pour la communauté LGBT d'assumer ouvertement son orientation sexuelle et son identité de genre, victime de l'intolérance d'une société fortement influencée par la religion. En juillet 2013, à l'appel de plusieurs organisations religieuses, des milliers de personnes avaient manifesté dans les rues de Port-au-Prince, la capitale haïtienne, pour s'opposer à l'homosexualité et réclamer au gouvernement d'interdire le mariage entre personnes de même sexe alors qu'aucun projet n'était à l'ordre du jour.
D'ailleurs, les autorités publiques ne sont pas étrangères au climat homophobe qui règne sur l'île et donc à l'annulation du festival Massimadi. En effet, le commissaire du gouvernement (l'équivalent du procureur de la République) a décidé d'interdire le festival, lequel porte "atteinte aux mœurs et à l’ordre public". Pourtant, l'article 31 de la Constitution de la république d'Haïti stipule que "La liberté d'association et de réunion sans armes à des fins politiques, économiques, sociales, culturelles ou toutes autres fins pacifiques est garantie". L'association Kouraj a saisi son avocat afin de contester cette décision et ainsi permettre le report de cet événement majeur pour accroître la visibilité et les droits des personnes LGBT en Haïti.
Dans un communiqué publié sur son site web, l'ambassade américaine "regrette profondément les événements qui ont mené au report du festival Massimadi et condamne toute forme de discrimination, d'intimidation et de menaces de violences".
 
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