C’est Alma qui représentera la France cette année à l'Eurovision, après le succès du bel Amir arrivé sixième l'an dernier. Cette 62e édition du concours européen de la chanson se déroulera à Kiev (Ukraine) et a choisi pour slogan "Célébrer la diversité".
C’est la cérémonie la plus queer, le concours de chant le plus fou : l'Eurovision ! Marqué du sceau de la tolérance depuis toujours et particulièrement avec la victoire de la chanteuse Dana International ou celle de la drag queen Conchita Wurst, la compétition a une longue tradition d’accueil d’artistes LGBT. Et elles et ils lui rendent bien : les téléspectateurs gays sont souvent très assidus, se regroupent entre amis et même dans des associations de fans.
Un auteur irlandais a ainsi rejoint l'OGAE, le principal réseau d’associations de fan-clubs de ces groupes, pour un article sur la sociologie des fans de l’Eurovision pour la revue SQS Journal (spécialisé en queer studies) en 2007. Si tous les fans ne sont pas issus de la communauté gay, les homosexuels en représentent cependant la majorité, constatait-il : "Le glamour, le spectacle, sont des choses dans lesquelles les gays s'investissent pour échapper aux normes de la masculinité."
Devant 180 millions de personnes, tenues et prestations extravagantes se succèdent... Regard sur le monde et sa diversité, c’est un souffle de liberté dans la lucarne, une fois par an. Les horizons s’ouvrent !
Pourquoi l'Eurovision est si LGBT-friendly ?
L'Eurovision réunit dans une même soirée des artistes de tous pays et tous styles musicaux, qui pendant longtemps devaient chanter dans une de leurs langues nationales. C'est donc automatiquement un environnement où être un peu différent est très accepté. Une diversité dont certains critiquent le manque de qualité, mais qui plaît aux gays et à l'ensemble de la communauté LGBT qui a souvent eu à se confronter au regard des autres. Au-delà de l'aspect artistique, le côté politique du concours est de plus en plus important, ce qui permet de faire passer des messages et de représenter des groupes, des minorités ethniques, physiques et donc aussi, les diverses orientations sexuelles.
Rétro-rama
C’est en 1997 que l’Eurovision propulse son premier candidat ouvertement gay, l'Islandais Paul Oscar. Son titre n’est pour autant pas resté dans les annales.
L’année suivante, Dana International gagne et donne l’image d’une femme trans valorisée, et élue par des millions de gens. C’est un progrès qui donne du courage aux personnes qui se sentent un lien avec elle.
En 2002, le groupe slovène Sestre ("Sœurs"), composé de trois drag queens, fait sensation.
En 2007, la Serbe Marija Serifovic remporte le concours en jouant cette fois sur le versant lesbien. Bien qu'officiellement hétérosexuelle (elle ne fera son coming out que des années plus tard), elle chante "Molitva" ("Prière", en serbe) avec une dégaine très masculine, qui contraste avec ses choristes, en talons aiguilles et très maquillées, qui se tiennent par la main.
La victoire en 2014 de Tom Neuwirth, aka Conchita Wurst, est un message tout aussi fort.
L’Eurovision, c’est aussi tous les physiques, tous les âges, tous les styles musicaux, bien au-delà de toutes les nationalités européennes (puisque que même la Russie et l’Australie sont dorénavant concernées)… Néanmoins, en 2016, le candidat israélien et ouvertement gay rapportait avoir été humilié par les autorités russes dès son arrivée à l’aéroport (nous vous en parlions ici). Cette année, pour la première fois en 62 ans, ce sont trois présentateurs masculins qui se chargeront de l’animation. Le comité organisateur est si fier de n’avoir inclus aucune femme qu’il l’a même tweeté... Une preuve, s’il en fallait, que la tolérance ne va jamais de soi et que l’ouverture est un combat sans cesse à renouveler.