union civile"Il ne faudrait pas que l'union civile se fasse au détriment du mariage" estime l'association David et Jonathan

Par Nicolas Scheffer le 22/10/2020
"Il ne faudrait pas que l'union civile se fasse au détriment du mariage"  estime l'association David et Jonathan

Le vice-président de l'association David et Jonathan, Cyrille de Compiègne, réagit à la proposition du pape d'ouvrir une "union civile" pour les couples de même sexe. Il salue "une prise de position forte" mais ne croit pas à une évolution de la doctrine.

Dans un documentaire, le pape appelle à une "union civile" pour les couples homosexuels. Cette position tranche avec les positions de l'Église catholique qui considère les homos comme "intrinsèquement désordonnés". C'est la première fois qu'un pape se prononce pour une telle reconnaissance.

Mais le pape reste fermement opposé à l'ouverture du mariage. Dans un livre publié en 2017, il rappelait encore que selon lui "le mariage, c'est un homme et une femme". Cyrille de Compiègne, vice-président de l'association catholique David et Jonathan salue l'exemple donné par le pape mais ne croit pas à un changement de doctrine. Entretien.

Comment avez-vous reçu ces propos du pape ? 

Cyrille de Compiègne: C'est un bonne nouvelle. Le pape a déjà eu des prises de parole d'ouverture et de bienveillance des personnes LGBT+, mais ici, c'est une prise de position forte. Il ne s'agit pas d'accueillir simplement les personnes, mais les couples homos. François dit qu'en tant que catholique, on peut être en faveur de l'union civile.

Dans des pays, notamment africains, où l'Église soutient des législations qui pénalisent encore l'homosexualité ou qui refusent de protéger les personnes LGBT+, cette phrase du pape est très forte. On dépasse la parole bienveillante d'ouverture, c'est une prise de position.

Mais il y a une réserve forte du contexte. En tant qu'archevêque de Buenos Aires, il était en faveur de l'union civile dans une démarche d'aller contre le mariage qui doit être selon lui réservé aux couples hétérosexuels. Il ne faudrait pas que l'union civile se fasse au détriment de notre revendication du mariage.

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Est-ce qu'on doit s'attendre à un changement de doctrine qui, rappelons-le, considère les homosexuels comme "intrinsèquement désordonnés" ? 

C'est une prise de position personnelle et non un changement de doctrine officiel. Sur le plan doctrinal, les choses sont très bloquées, c'est un sujet de clivage très fort. François veut montrer l'exemple en prenant une posture bienveillante. Il fait avancer les sujets par le bas plutôt que par la doctrine.

D'autant qu'il ne décide pas tout seul. La Congrégation pour la doctrine de la foi ne souhaite pas revenir sur l'enseignement. Le catéchisme comporte encore des propos homophobes qui ne correspondent pas à la réalité des personnes LGBT+.

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C'est un jeu de rapport de pouvoirs complexes, le pape n'est pas libre de faire ce qu'il veut. Il a une autorité spirituelle forte, mais ses pouvoirs sont limités.

"On nous encore signale des refus de sacrements : de baptêmes ou d'obsèques."

Vous anticipez un avant et un après cette déclaration ? 

On l'espère. Cela donne une légitimité pour faire bouger les choses. On est régulièrement interpellé pour des cas de discrimination dans les paroisses. Cela se traduit par des formes de rejet, quelqu'un qui se sent mal à l'aise parce que le curé est remplacé par quelqu'un de conservateur. Plus rarement mais de façon très grave, on nous signale des refus de sacrements : de baptêmes ou d'obsèques.

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Il y a une réalité très diverse au sein de l'Église. Le discours n'est pas tenu de la même manière partout. Certains évêques prônent l'abstinence pour les personnes homosexuelles, et les accusent de vivre dans le péché. À l'inverse, des jésuites proposent un accompagnement de la foi sans se soucier de votre orientation amoureuse. Certains acceptent même que les couples de même sexe participent à des retraites spirituelles.

 

Crédit photo : Capture d'écran / KTO