Ce mercredi 14 décembre, France 5 programme le documentaire Option éducation sexuelle, qui assiste aux ateliers d'un groupe de lycéens sur les questions de sexualité, d'identité de genre ou d'orientation, rappelant que l'école est la mère des batailles pour faire avancer l'acceptation.
Empathie, c'est le maître mot du documentaire Option éducation sexuelle diffusé sur France 5 ce mercredi 14 décembre à 20h55. Car ce qui saute aux yeux, c'est que les lycéens de banlieue parisienne (Yvelines) qui y sont filmés, volontaires pour participer à cinq ateliers abordant un large éventail de questions relatives à la sexualité, ne partent pas du même point. Tandis que certains apparaissent très informés, d'autres peinent à situer le clitoris ou sont perdus sur les questions de genre. Et c'est normal, c'est d'ailleurs le but de cet atelier pilote en milieu scolaire : aborder ces questions sans jugement ni honte, confronter les vécus et les opinions, partager son ressenti, ses doutes, ses incompréhensions ; s'écouter, en somme, grâce à la médiation d'un animateur, en l'occurrence Thomas Guiheneuc. L'expérience est mise en images par Marie-Pierre Jaury, en partenariat avec Konbini.
De cette parole libre émergent les questionnements, intemporels ou au contraire très en lien avec l'époque, de la génération qui vient. Malgré les différences, un socle commun sur la sexualité : la notion de consentement n'est à aucun moment remise en cause. Une majorité des élèves sait aussi qu'un rapport sexuel ne se résume pas à la pénétration, et ceux qui ont du mal dans un premier temps à se projeter sans finissent par se laisser convaincre. L'homophobie également, celle qui s'accompagne de violences physiques ou verbales, est clairement rejetée par le groupe. Un élève, bien que mal à l'aise à l'idée de voir deux hommes s'embrasser, assure quand même qu'il ne se permettrait jamais de leur en faire la remarque. La parole circule, l'échange progresse.
C'est quoi être une femme/être un homme ?
La confusion émerge surtout sur les notions d'orientation et d'identité, qui se confondent dans l'esprit de quelques élèves. Deux camps se font jour face à la question : qu'est-ce qu'être un homme/une femme ? D'un côté, ceux qui prennent fait et cause pour l'argument d'autorité de la "biologie", arrêtant leur définition aux organes génitaux. De l'autre, ceux qui pensent plutôt en termes d'autodétermination et perçoivent le genre comme "un sentiment", un ressenti, plutôt que comme quelque chose d'inné et d'indéfectible. Tous se rejoignent néanmoins sur le constat des racines de la discorde : "À l’école depuis qu'on est petits, on nous apprend qu’un mâle, c’est un garçon et qu’une femelle, c’est une fille. On nous l’apprend et on grandit avec cette idée-là." L'atelier sert justement à poser ses a priori sur la table pour les examiner, les mettre en question, à distance.
Melvin, par exemple, n'a jamais été amené à se poser de questions sur son identité de genre ou son orientation, simplement car il a été élevé dans l'esprit de ce que l'on attend d'un homme cis ; des pirates pour lui, des princesses pour sa soeur. Et puis, pourquoi ne serait-il pas un garçon puisqu'il joue au foot en permanence ? Le jeune homme fait cependant preuve de bonne volonté, réfléchissant à ce qu'on lui a inculqué, aux valeurs qu'il tient pour normes.
Le fléau du harcèlement scolaire
À l'instar de Melvin, Alice se considère comme cis et hétéro. Pourtant, son discours est alerte sur les sujets touchant à la communauté LGBTQI+, mais aussi sur les clichés qui entourent les relations hétéros. Elle explique que sa mère est homosexuelle et qu'elle se sent concernée. Alors forcément, lorsque les élèves sont encouragés à jouer des scènes de harcèlement homophobe et transphobe, elle est touchée de voir en actes ce que qu'elle n'a jamais vécu.
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Dans le panel des volontaires, plusieurs ont déjà connu cette violence. Évane par exemple ne se considère pas comme hétéro et arbore fièrement dans les couloirs du collège un masque aux couleurs de l'arc-en-ciel. Mathis, lui, se montre angoissé à l'idée de subir des violences en raison de son orientation sexuelle. Depuis longtemps, il est confronté au rejet de ses pairs qui pointent du doigt ses "mimiques" jugées trop "féminines". On lui a répété qu'il était gay avant même qu'il sache réellement ce que cela signifiait. Et lorsqu'il révèle pour la première fois ses sentiments à un garçon, ce dernier l'"affiche" sans ménagement, il le raconte à ses camarades devant la caméra, exprimant comment ces expériences l'ont conduit à se refermer sur lui-même. Des témoignages nécessaires, quand les études situent entre 800.000 et un million le nombre d'élèves qui subissent du harcèlement scolaire.
Des violences sexuelles
Face à ce dernier témoignage, une élève quitte la pièce le temps de faire quelques pas. Kenza se définirait plutôt comme bi, et arbore un style assez masculin. On lui répète souvent qu'elle est un "garçon manqué". Elle se voit simplement comme Kenza. Elle partage à son tour une anecdote sur la fois où elle a demandé un stylo à quelqu'un qui, en raison de ses cheveux courts, a tout bonnement refusé.
Les échanges dans le documentaire abordent également la thématique des violences sexuelles. Malgré leur jeune âge, plusieurs ont déjà vécu "beaucoup trop de trucs de merde", se révolte Kenza. Une gravité s'installe alors sur les visages rieurs de ces jeunes ados, qui au début du film s'amusaient de voir représenter vulves et pénis. Face aux différentes situations qu'ils ont rencontrées, tous s'accordent à dire que leurs voix n'ont pas été entendues par les adultes qui les entourent, que ce soit du côté des familles ou des éducateurs. Probablement parce qu'à l'école notamment, les autorités échouent encore à mettre en place un système efficace de lutte contre le harcèlement, et n'arrivent déjà pas à tenir les promesses du programme en termes de sensibilisation sur ces sujets. On ne peut pourtant qu'être convaincu, à regarder ce documentaire, que la démarche est primordiale.
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Crédit photo : capture d'écran Option éducation sexuelle, France Télévisions/Konbini