justiceUne femme trans incarcérée dans une prison pour hommes obtient son transfert

Par Nicolas Scheffer le 22/04/2021
prison

Une femme trans incarcérée depuis juin 2020 dans une maison d'arrêt pour hommes a obtenu son transfert dans une prison pour femme. Le syndicat des surveillants pénitentiaires dénonce "un problème de fouille".

Une bonne nouvelle pour cette prisonnière. Une détenue française transgenre a finalement obtenu de la justice son déplacement dans un quartier pénitentiaire pour femmes. Le 9 avril, le tribunal judiciaire de Toulouse a validé son changement d'état civil et ouvert la possibilité à Jennifer* d'être transférée, indique l'AFP.

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Depuis son incarcération, en juin 2020, elle subissait "les propos et actes transphobes de la part de nombreux surveillants", selon Grisélidis, une association de travailleur·se·s du sexe à Toulouse. Des proches de Jennifer racontent également que l'administration pénitentiaire l'aurait obligée à porter des vêtements d'hommes.  En attendant la décision du tribunal, Jennifer avait été placée à l'isolement, "pour éviter qu’elle ne se fasse agresser par ses camarades", selon La Dépêche du Midi.

"Un problème au niveau des fouilles"

Cette décision poserait "un problème au niveau des fouilles", selon un responsable du Syndicat pénitentiaire des surveillants de la maison d'arrêt de Seysses. "On demande à des surveillantes de fouiller une détenue qui a des attributs d'homme", poursuit-il. Avant d'assurer que "la loi dit que cela doit se faire entre personnes de même sexe", témoignant du manque de formation sur ces sujets.

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Le Syndicat a même envoyé une lettre au procureur de Toulouse pour demander une issue légale. Le syndicat a demandé à ce que Jennifer soit transférée dans le quartier dédié aux personnes transgenres de la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis, à 600km de là. L'administration pénitentiaire a refusé de s'exprimer sur le sujet.

'Pas forcément plus simple"

"Ce ne sera pas forcément plus simple pour elle dans le quartier des femmes, alerte Laura Garnier, au sein de l'asso LGBTQI+ Arc-en-Ciel à Toulouse. La reconnaissance en milieu carcéral de notre identité de genre est longue et fastidieuse. Déjà qu'il y a beaucoup de violence en prison, imaginez ce que peut endurer une femme trans."

En mai 2019 déjà, plusieurs associations LGBTQI+ dénonçaient la transphobie en milieu carcéral. 610 courriers avaient été envoyés à 55 parlementaires pour les interpeller. Les associations indiquaient qu'au "motif de leur sécurité - sans que leur avis sur la question ne soit interrogé - on les enferme à l’isolement : elles ne peuvent croiser aucun autre détenu. Elles n’ont donc pas accès à la cour de promenade, mais uniquement à une salle d’une quinzaine de mètres carrés, dont le plafond est remplacé par d’épais grillages."

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La question de la fouille a été déjà évoquée par le ministre de la justice Éric Dupond-Moretti devant le Sénat le 23 janvier 2020. "L'administration pénitentiaire met en œuvre des actions visant au respect de l'identité de genre exprimée par chaque détenu", a-t-il assuré. "Les chefs d'établissement tiennent compte en pratique des déclarations de la personne détenue quant à son identité de genre afin de décider de son affectation, notamment pour que les fouilles intégrales soient réalisées par un agent du même sexe, règle imposée par dispositions réglementaires du code de procédure pénale." Des consignes qui ont du mal à redescendre jusque sur le terrain, semble-t-il.

*prénom modifié

 

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