États-Unis"Don't say gay" : la Floride s'en prend à son tour aux sujets LGBTQI+ à l'école

Par Nicolas Scheffer le 31/01/2022
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À l'initiative du Parti républicain, un projet de loi empêchant les professeurs d'aborder les questions d'orientation sexuelle ou d'identité de genre est examiné par la Floride, faisant craindre le pire pour les associations LGBTQI+.

C'est entendu, la "protection des enfants" est le nouvel étendard des homophobes de tous les pays. Après la loi "anti-propagande homosexuelle" adoptée en 2013 en Russie et qui a déjà fait des petits notamment en Hongrie et en Pologne, l'État de Floride (sud-est des États-Unis) a commencé l'examen d'une loi visant à interdire les enseignements des thématiques LGBTQI+ à l'école. Si elle est votée, cette loi aboutirait à interdire purement et simplement les cours sur l'histoire des luttes LGBTQI+ ou encore des débats concernant les identités LGBTQI+, rapporte ABC.

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La loi en question, portée par le Parti républicain, prévoit qu'une école "ne peut encourager une conversation dans une classe à propos de l'orientation sexuelle ou de l'identité de genre au niveau primaire ou d'une manière qui n'est pas adaptée à l'âge ou au développement des élèves". Une formulation particulièrement vague et large, qui n'explicite pas quelle sorte de discussion serait précisément interdite. Le projet prévoit également que les parents qui pensent que l'école est allée trop loin pourraient porter plainte et prétendre à des dommages et intérêts.

La Floride "plus difficile à vivre pour les enfants LGBTQI+"

L'élu Joe Harding (Républicain), à l'origine de ce texte, assure que les étudiants pourront toujours parler de leur famille et que l'histoire LGBTQI+, notamment des événements marquants comme la fusillade de la discothèque du Pulse à Orlando (Floride) en 2016, pourront toujours être abordés. Mais dans le même temps, il explique que cette loi interdira "les cours ou les séances qui mettraient les élèves dans une situation où ils seraient obligés" d'aborder les sujets LGBTQI+. En clair : parler du Pulse, c'est OK, mais parler de l'homophobie qui a conduit à la mort de 50 hommes et 53 blessés, ce n'est pas possible.

Chasten Buttigieg, l'époux du premier secrétaire d'État ouvertement gay des États-Unis, qui se trouve être un ancien enseignant, a eu des mots particulièrement durs à l'égard de cette loi. "Cela va tuer des enfants", a-t-il lancé à l'adresse de Ron de Santis, le gouverneur Républicain de Floride. "Vous faites de votre État un endroit plus difficile à vivre pour les enfants LGBTQI+", s'est-il emporté sur Twitter, ajoutant : "Un sondage à échelle nationale démontre que l'année dernière, 42% des jeunes LGBTQI+ ont considéré sérieusement le suicide. Et maintenant, ils ne peuvent pas parler à leur prof ?".

"Si vous avez peur que l'on enseigne des activités sexuelles à vos enfants, alors légiférez. Mais ne l'utilisez pas comme un frein pour parler d'orientation sexuelle ou d'identité de genre."

"Il y a de nombreux sujets qui doivent être abordés avec attention et respect : la religion, la politique, des sujets profonds comme la mort, le sens de la vie. Mais cette loi ne parle d'aucun de ces sujets, elle ne concerne que l'orientation sexuelle et l'identité de genre, à savoir qui nous aimons et qui nous sommes, a relevé Jon Harris Maurer, directeur de Equality Florida, qui milite pour les droits LGBTQI+ dans l'État. Si vous avez peur que l'on enseigne des activités sexuelles à vos enfants, alors légiférez. Mais ne l'utilisez pas comme un frein pour parler d'orientation sexuelle ou d'identité de genre."

Tache d'huile homophobe dans le monde

Depuis que la Russie a adopté en 2013 une loi interdisant la "propagande homosexuelle" auprès des mineurs, ce type de mesure fait tache d'huile dans toute l'internationale conservatrice homophobe. La Pologne a ainsi adopté ce mois de janvier la loi Czarnek – du nom du ministre polonais de l'Éducation qui compare l'homosexualité au nazisme –, une reprise en main de l'institution scolaire par le pouvoir central qui prévoit notamment que lors d'une intervention en classe d'une association ou d'une ONG, les élèves devront obtenir au préalable l'accord écrit de leurs parents pour y assister.

En Hongrie, le chef du gouvernement Victor Orbán a également fait voter une loi interdisant toute représentation positive de l'homosexualité auprès des mineurs. Un referendum est prévu en avril prochain pour tenter de donner une légitimité à cette loi dénoncée par les institutions européennes et de nombreux chefs d'État européens.

En France, ces idées sont reprises par l'extrême droite et une partie de la droite. L'eurodéputé Les Républicains François-Xavier Bellamy, aujourd'hui conseiller de Valérie Pécresse sur les relations avec le Parlement européen, qualifie ainsi de "très souvent infondées" les condamnations à l'égard d'Orban, lui qui a refusé de voter contre les "zones sans LGBT" proliférant en Pologne. "Laissons les mineurs tranquilles", a également approuvé Marine Le Pen, quand l'eurodéputé du RN Nicolas Bay a renchéri en s'interrogeant : "Mais quelles sont les valeurs [d'Orban] avec lesquelles on pourrait ne pas être d'accord ?". La réponse ne viendra pas d'Éric Zemmour qui, après un tête-à-tête avec le dirigeant hongrois fin septembre, déclarait "admire[r] sa politique" notamment contre "la propagande totalitaire (sic) menée par le lobby LGBT". Depuis, il a intégré dans son programme pour la présidentielle la lutte contre la "propagande LGBT à l'école".

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