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visibilitéAudre Lorde, Jodie Foster, Hoshi… Ces coming out lesbiens qui ont marqué l'histoire

Par Tessa Lanney le 26/04/2022
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En ce mardi 26 avril, journée de la visibilité lesbienne, retour (non-exhaustif) sur les coming out médiatiques qui ont participé dans l'histoire à créer de la visibilité lesbienne.

S'il est des icônes qui se sont affirmées lesbiennes, vivant leur sexualité au grand jour depuis leur première heure de notoriété, d'autres n'ont pas toujours été identifiées. Parce qu'elles préféraient garder leur vie privée privée, parce qu'elles avaient peur que cela nuise à leur carrière ou les atteigne, ou tout simplement parce qu'elles n'avaient pas encore mis le mot "lesbienne" sur ce qu'elles ressentaient. Celles-là sont passées par un coming out public, devenant tout à coup des lesbiennes visibles. Attention, cet article ne prend pas en compte les coming out bi ou pan – rendez-vous le 26 septembre pour la journée de la bisexualité.

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Audre Lorde, 1970

Son nom ne vous dit peut-être rien et pourtant ses combats entrent en résonance avec notre époque. Audre Lorde était militante, lesbienne, écrivaine, poétesse et enseignante antillaise. La femme de lettres engagée a nourri une profonde réflexion traversant les mouvements de justice sociale mais aussi le racisme, le sexisme et les questions de sexualité et de classe aux États-Unis. La jeune femme fréquente les cercles féministes, côtoie Adrienne Rich ou encore Sonia Sanchez. D'abord mariée huit ans avec Edwin Rollin, un juriste gay avec qui elle aura deux enfants tout en vivant des relations chacun de leur côté, ils finissent par mettre un terme à cette union anti-conventionnelle en 1970. La même année, elle publiera son deuxième recueil de poésie, Cable to Rage, dans laquelle elle évoque la pluralité des femmes qui l'entourent, appelle les artistes afro-américaines et les lesbiennes à la sororité dans une visée intersectionnelle, à une libération de toutes les oppressions. Et c'est dans le poème Martha qu'elle assume pleinement son identité de lesbienne. À cet époque, elle est amoureuse d'une certaine Frances Clayton, à ses côtés une grande partie de sa vie. Elle parlera des difficultés d'être lesbienne et noire aux États-Unis dans son troisième recueil paru en 1973, From A Land Where Other People Live, nominé au National Poetry Award.

Elula Perrin, 1977

En France, on peut citer Elula Perrin, l'une des premières personnalités à faire son coming out public en 1977, cinq ans avant la dépénalisation de l'homosexualité. C'est dans l'émission de Philippe Bouvard, L'Huile sur le feu, qu'elle aborde son attirance pour les femmes le plus naturellement du monde. Ainsi, elle incarne une homosexualité féminine épanouissante et joyeuse dans une France où elle est encore taboue. En 1969 avec Aimée Mori, elle fonde Katmandou, une boîte de nuit parisienne réservée aux femmes. Ce lieu de fête est un incontournable de la communauté lesbienne pendant vingt ans. Elle sera aussi à la tête d'un autre club, Le Privilège, et devient également romancière. Dans son Dictionnaire historique des homosexuel.le.s célèbres, Michel Larivière la décrit comme une "pionnière de la lutte pour la reconnaissance de l’amour lesbien [qui] réclame ‘le droit à l’indifférence’, la faculté pour une lesbienne d’aimer sans contrainte”.

Catherine Lara, 1986

"Qu'est-ce que vous regardez en premier chez un homme ?" La fameuse réplique "Sa femme !", que l'on retrouve dans la bouche de nombreuses lesbiennes sur les réseaux, est de Catherine Lara et a été prononcée en 1986 sur le plateau de Canal+ alors qu'elle était invitée dans l'émission Mon Zénith à moi de Michel Denisot. Si l'on retient le bon mot désormais culte, on pense moins à la chanson "Autonome", sortie en 1983, dans laquelle Catherine Lara clamait la liberté de chacun "d'aimer une femme ou un homme", une pierre à l'édifice de la lutte pour les droits LGBTQI+. Elle est depuis revenue sur son coming out, notamment sur RMC, expliquant qu'à l'époque, "ce n'était pas évident".

Ellen DeGeneres, 1997

À présent, une personnalité américaine connue de tous·tes : Ellen DeGeneres, qui a vu les choses en grand avec un coming out en couverture en 1997 du magazine Time, le titre étant "Yep, I'm gay". Elle est la première femme lesbienne en couverture du fameux magazine. Et pour ceux qui étaient passés à côté de la révélation en kiosque, elle ne s'est pas arrêtée là question visibilité puisque quelques semaines plus tard, dans un épisode de sa sitcom Ellen, son personnage, Ellen Morgan faisait aussi son coming out à sa psy. Et bim, premier personnage principal de série à révéler son homosexualité. Inutile de dire que "The Puppy Episode" a fait du bruit et n'a pas plu à tout le monde. Ellen DeGeneres devra tout de même attendre 2003 pour revenir sur le devant de la scène avec le Ellen Show.

Amélie Mauresmo, 1999

Deux ans après le coming out d'Ellen, c'était au tour d'Amélie Mauresmo, joueuse française de tennis alors âgée de 19 ans. L'athlète brise un tabou qui bouleverse le monde du sport. En 2018, elle revenait sur France 2 sur ce moment si particulier de sa carrière : "C'était mouvementé, mais pas de regrets. Peut-être que je le referais, mais différemment. Peut-être moins brutalement." Ce coming out inspire de nombreuses personnes. "Il y a encore des gens qui viennent me voir en me disant : 'Vous m'avez sauvée…', racontait-elle en 2019 sur France Inter. Sur le moment, je n'étais pas capable d'entendre ça. Aujourd'hui, oui. Aujourd'hui, je suis toujours surprise d'une certaine façon, mais je prends, c'est fantastique."

En 2018, Amélie Mauresmo était d'ailleurs l'une des figures lesbiennes à s'être exprimée en faveur de la PMA pour toutes : "Cette loi, c’est permettre à toutes les femmes d’avoir le choix. On ne peut pas refuser ça, finalement, à une femme aujourd’hui, avait-elle déclaré sur France 2. Je suis maman et c’est un tel bonheur qu’on ne peut pas refuser ça." Celle qui est à présent commentatrice sportive avait en effet eu recours à une PMA en 2015 et en 2017 pour ses deux enfants, Aaron et Ayla.

Shirley Souagnon, 2012

Quand on pense humoriste lesbienne, on pense automatique à Shirley Souagnon. On retient sa participation à l'émission de Brigitte Lahaie : Lahaie, l’amour et vous, sur RMC en 2012. Venue pour faire la promo de son spectacle, Sketch Up, qu'elle donnait à la Comédie de Paris, on l'interroge sur son orientation sexuelle, qu'elle ne cache pas. Elle s'étend même sur sa situation amoureuse : "Je rencontre des gens, mais je suis tellement concentrée sur l’amour que je donne pendant mon spectacle… C’est ce qui m’importe le plus en ce moment. J’adore m’emballer au début, me dire : 'Ah oui, là, je sens que c’est la bonne personne. J’te jure, cette fois-ci, c’est la bonne.’ Et puis, au final, je me retrouve encore à chercher quelqu’un d’autre. Je vis des petites amourettes et pour l’instant, c’est ce qui me plaît."

Jodie Foster, 2013

Comment parler de coming out marquants sans citer la reine d'Hollywood Jodie Foster ? L'actrice a toujours été discrète sur sa vie privée, mais a tout de même été l'autrice de gestes forts comme aux Golden Globes, en 2013, lors de son coming out public, empli d'émotion. Après un suspense de circonstances, elle finit par annoncer la couleur : "Ça aurait pu être un grand discours de coming out. Mais j'ai fait mon coming out il y a mille ans, à l'âge de pierre, dans ces jours désuets où une jeune fille fragile s'ouvrait à des amis en qui elle avait confiance, à sa famille, à ses collègues et puis graduellement à tous ceux qui la connaissaient, à tout le monde qu'elle rencontrait, en fait." Jodie Foster, actrice et réalisatrice à la carrière éclatante, embrasse volontiers sa femme dans les cérémonies officielle. Merci Jodie.

Adèle Haenel, 2014

Encore une incontournable du cinéma : Adèle Haenel. Sauf que son coming out, ou plutôt sa tentative de coming out était plutôt passée inaperçu en 2014, lors de la cérémonie des César où elle était sacrée Meilleure Actrice dans un second rôle féminin pour Suzanne. "Je voudrais surtout remercier Céline [Sciamma]. Parce que je l'aime, voilà", avait-elle déclaré à la fin de son discours. Les deux femmes s'étaient rencontrées sur le tournage de La Naissance des pieuvres quelques années plus tôt mais à ce moment-là, personne ne comprend vraiment ce que veut dire l'actrice. Disons qu'en 2019, entre sa prise de micro sur le titre "De mon âme à ton âme" des Kromponat et le clip montrant un histoire d'amour entre deux femmes... les indices commençaient à être gros. La même année, elle tournait dans Portrait de la jeune fille en feu, chef-d'oeuvre lesbien, toujours de Céline Sciamma. Un an plus tard, elle devenait aussi l'une des portes-parole du mouvement #Metoo en portant plainte contre le réalisateur Christophe Ruggia mais aussi en quittant la salle des César en réaction à la victoire de Roman Polanski, nommé Meilleur réalisateur pour J'accuse.

Hoshi, 2018

Enfin, que serait le paysage musical sans Hoshi ? Un coming out compliqué pour la chanteuse qui a reçu des messages particulièrement violents ainsi que des menaces de mort. Elle parle d'abord de son homosexualité à Paris Match mais comme elle l'explique dans un message publié sur Facebook en 2018, ainsi qu'à têtu· en 2019, l'artiste a l'impression que les journaliste lui ont volé son coming out. "Je n'ai pas aimé la manière avec laquelle Paris Match m'en a fait parler. Je ne me suis jamais cachée, je n'ai jamais menti, quand on me pose la question je réponds honnêtement. Mais ils sont venus me voir jouer pour leur rubrique musique, on a fait une interview le lendemain, on m'a posé des questions là-dessus, j'ai parlé des agressions homophobes, et ce qui a été écrit… c'était pas mes mots exacts. Mais tant pis, c'est le jeu." Elle aurait en effet préféré attendre d'aborder ses sujets qui lui tenaient à coeur à travers ses chansons avant d'en parler hors contexte. En revanche, depuis, et avec notamment "Amour censure" ou la couv de têtu·, la jeune femme oeuvre chaque jour à plus de visibilité. Bravo Hoshi.

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Crédit photo : capture d'écran Instagram Shirley Souagnon / wikimedia commons