LGBTphobieBilal Hassani forcé d'annuler un concert à Metz : encore un point pour le lobby réac

Par Nicolas Scheffer le 05/04/2023
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En raison des menaces proférées par la mouvance réactionnaire catholique et d'extrême droite, la production de Bilal Hassani a annulé un concert prévu ce 5 avril à Metz dans une ancienne église, désacralisée depuis 500 ans et qui sert depuis plus de 30 ans de salle de spectacles.

L'air de la bêtise a gagné une nouvelle manche. Alors que Bilal Hassani devait ce produire ce mercredi 5 avril devant 280 fans à Metz (Moselle) dans l'ancienne église Saint-Pierre-aux-Nonnain, convertie en salle de spectacles depuis 35 ans, le concert n'aura finalement pas lieu en raison de la noble intolérance et des saintes habitudes de bigots en mal d'action. "À la vue des menaces formulées à l’encontre de Bilal Hassani et de son public (…) c’est avec regret, tristesse et dépit que toutes les équipes – celles de la production et de l’artiste, ont décidé d’annuler ce concert", a annoncé dans un communiqué Live Nation, la production du chanteur.

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Depuis plusieurs semaines, Bilal Hassani est en effet la cible du collectif "Lorraine catholique", lequel crie à la "profanation" de l'ancienne église Saint-Pierre-aux-Nonnains, pourtant désacralisée depuis 1556 et reconvertie en 1988, après sa rénovation, en salle accueillant des spectacles vivants et des expositions, comme le rappelle Le Républicain Lorrain. Jugeant par avance la performance de l'artiste "rien d'autre que pornographique", les réactionnaires avaient appelé les "chrétiens fidèles" à se rassembler 15 minutes avant le concert pour une prière collective devant la salle.

Civitas & cie

Relayé par les milieux intégristes catholiques et d'extrême droite, et notamment par Civitas, cet appel de grenouilles de bénitier à un "chapelet de réparation" faisait craindre un rassemblement important, soulignent les renseignements territoriaux auprès de l'AFP.

"Nous ne pouvons laisser un rendez-vous qui devait être un moment de joie, de partage et de fête, devenir un lieu de tension et de malveillance accrues, souligne le communiqué de la production. En considérant les éléments perturbateurs, voire menaçants qui viennent interférer, il est de notre responsabilité de n’exposer personne, la sécurité du public reste notre priorité numéro un. Nous invitons les détenteurs de billets à se rapprocher de leur point d’achat pour toute demande de remboursement."

"L'extrême droite cherche à intimider les personnes LGBTQI+."

Matthieu Gatipon, président de l'Union des familles laïques de Metz

"Cela fait plusieurs mois qu'on alerte les autorités, en vain, contre ces actions de l'extrême droite, qui cherche à intimider les personnes LGBTQI+. Hélas, j'ai le sentiment que leurs menaces fonctionnent", analyse pour têtu· Matthieu Gatipon, président de l'Union des familles laïques de Metz et ancien président de Couleurs gaies, le centre LGBTQI+ lorrain. "Des concerts beaucoup plus queers et subversifs ont déjà eu lieu dans cette salle, ce qui n'est plus possible aujourd'hui", regrette-t-il, relevant cette ironie : à deux pas de l'ancienne église a été apposée une plaque en l'honneur de Marsha P. Johnson et Sylvia Rivera, héroïnes des émeutes de Stonewall à New York en 1969.

"Cette ancienne basilique au sens romain et civil du terme et non chrétien, liée à des édifices d'eau et qui a vu se baigner nus les habitants de l'époque ne fut église que pour un court temps, a précisé le maire de Metz, François Grosdidier (droite), dans un communiqué relayé par France 3 Régions. Elle est désacralisée depuis plus de 500 ans et est devenue aujourd'hui une salle de spectacles fort appréciée des messins et des artistes en tous genres."

Bilal Hassani, têtu·, Eddy de Pretto…

Bilal Hassani a malheureusement déjà connu ce type de séquence, puisque la une de têtu· qui lui avait été consacrée à l'hiver 2021-2022 avait notamment occasionné la destruction d'un panneau publicitaire, action filmée et agrémentée d'un appel à la violence par un groupuscule d'extrême droite, Les Zouaves Paris.

Le jeune chanteur est également loin d'être le premier artiste queer à subir les foudres du lobby réactionnaire. L'été 2021, Eddy de Pretto avait également subi un harcèlement homophobe en règle sur internet après un concert dans l'église Saint-Eustache à Paris (qui en accueille aussi régulièrement). Lueur d'espoir : les crétins avaient alors perdu la manche, puisque des peines de trois à six mois de prison avec sursis ont été prononcées, en décembre dernier, à l'encontre de onze hommes dans cette affaire.

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Crédit photo : Christopher Barraja pour têtu·