Après trois mois d'épidémie en France, la variole du singe a passé la barre des 3.500 cas, tandis que la campagne de vaccination a passé celle des 70.000 personnes traitées. Alors que la rentrée s'annonce déterminante pour la suite, faisons le point sur ce que l'on sait au terme d'un été placé, pour la communauté gay, sous le signe du monkeypox.
Dans l'épidémie de variole du singe (ou monkeypox), qui a débarqué le 20 mai en France, nous avançons comme dans celle du Covid-19 : en marchant. Après trois mois d'évolution, le dernier bilan en date de Santé publique France (SPF), au 29 août, fait état de 3.547 cas confirmés. La région parisienne en concentre toujours la majorité (61%), suivie de l’Occitanie (293 cas), de l’Auvergne-Rhône-Alpes (235 cas) et de Provence-Alpes-Côte d’Azur (222 cas). Voici par ailleurs où nous en sommes de nos connaissances concernant le profil des malades, l'évolution possible de l'épidémie, les modes de transmission du virus, ainsi que de la campagne de vaccination lancée le 11 juillet.
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Les malades restent surtout des hommes gays ou bi
L'épidémiologie du monkeypox ne varie pas depuis le printemps : la population la plus exposée reste les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH). À tel point que lors de son point du 16 août, SPF expliquait que "les caractéristiques des cas confirmés chez les hommes étant stables depuis plusieurs semaines, les investigations épidémiologiques seront désormais centrées sur les cas féminins, pédiatriques et atypiques". Seuls 56 cas féminins sont confirmés, soit 1,6% du total, et SPF signale que les "circonstances de contamination de ces femmes sont difficiles à appréhender". Par ailleurs, neuf enfants de moins de 15 ans ont été déclarés.
Lors de la dernière mise à jour du profil et de la symptologie des cas masculins, à partir des données arrêtées au 8 août, rien de nouveau donc : "95 % des cas pour lesquels l'orientation sexuelle est renseignée sont survenus chez des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH)". Du côté des symptômes, "75 % ont présenté une éruption génito-anale, 70 % une éruption sur une autre partie du corps, 76 % une fièvre et 72 % des adénopathies". Enfin parmi ces cas investigués, "74 sont immunodéprimés (5,1 % des cas ayant répondu) ; 385 sont séropositifs au VIH (soit 25 % des cas connaissant leur statut VIH). Chez les cas non porteurs du VIH, 701 sont sous prophylaxie pré-exposition ou PrEP (soit 64 % des cas non porteurs du VIH ayant répondu à la question)".
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Le pic de l'épidémie derrière nous ?
"La prévention globale permet pour la première fois une baisse de l’incidence", s’est réjoui le Pr Jérôme Salomon, directeur général de la Santé, lors d'un point presse ce mardi 30 août. Dans ses deux derniers points de situation rendus publics au cours de la deuxième quinzaine d'août, Santé publique France explique en effet que les données "suggèrent que le pic de contaminations a eu lieu fin juin/début juillet". De fait, "le nombre de cas confirmés a tendance à diminuer depuis" mais, insiste bien l'institution, "il faut néanmoins rester très prudent car la période estivale a pu entraîner des retards au diagnostic et à la déclaration" et, par ailleurs, "certaines personnes peuvent ne pas avoir eu recours aux soins".
En clair, il faut attendre que tout le monde soit rentré de vacances pour savoir si l'épidémie va connaître un rebond de rentrée ou si cette tendance à la baisse se confirme. Avec une raison de rester optimiste, relevée par SPF : "Plusieurs autres pays, notamment en Europe, observent également un ralentissement voire une diminution du nombre de nouveaux cas confirmés déclarés au cours des dernières semaines".
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Le monkeypox se comporte comme une IST
Si le virus du monkeypox n'a toujours pas été classé comme une infection sexuellement transmissible (IST), et si comme le VIH il ne se propage pas uniquement par voie sexuelle, l'évolution de l'épidémie indique que la transmission lors de contacts sexuels est prépondérante. Dans un article faisant le point sur "ce que les scientifiques savent" de la propagation du virus, en date du 11 août, la revue scientifique Nature explique que "le contact prolongé, en particulier avec les lésions cutanées d'une personne, apparaît comme la principale voie de transmission". Or, "plusieurs études (…) montrent que peu de personnes contractent la maladie d'un membre infecté du foyer avec lequel elles n'ont pas eu de contact sexuel". En revanche, rappelle encore l'article, "plusieurs études ont montré que l'ADN du virus de la variole du singe est présent dans le sperme d'une personne pendant des semaines après son infection" – c'est d'ailleurs pourquoi le port de la capote est recommandé par les autorités sanitaire françaises durant 8 semaines après la guérison.
Reste à savoir ce qui, dans un rapport sexuel, engendre spécifiquement la transmission. "On ne sait pas à quel point [le sperme] joue un rôle important, par rapport au simple contact étroit, peau à peau avec une personne ou à l'inhalation de ses particules respiratoires – qui se produisent également pendant les rapports sexuels", développe Nature. Qui relève néanmoins un point plaidant pour le retour à la capote en prévention, en attendant d'être vacciné : des scientifiques ont "remarqué que, chez les personnes qu'ils ont examinées, le fait de présenter un plus grand nombre de lésions dans la bouche et la gorge était lié au sexe oral, et avoir plus de lésions dans et autour de l'anus était lié au sexe anal-réceptif". Les scientifiques en question appellent d'ailleurs les pouvoirs publics à ne plus hésiter, dans leurs campagnes de prévention, "à parler de sexe" et à se montrer "explicites sur les types de protection disponibles".
En tout, Nature rappelle enfin que "depuis début mai, la variole du singe s'est propagée dans plus de 90 pays et a entraîné plus de 32.000 infections, dont près d'un tiers des cas signalés aux États-Unis".
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70.000 vaccins administrés contre la variole du singe
Les 220 centres de vaccination mis en place dans toute la France ont permis, depuis le 11 juillet, d'administrer 70.000 doses de vaccins, a indiqué Jérôme Salomon dans son point presse mardi, promettant : "D’ici la fin de la semaine, on aura dépassé les 140.000 doses livrées sur le terrain".
Concernant l'expérimentation lancée début août de la vaccination dans cinq pharmacies de trois régions, le directeur général de la Santé l'a jugé "positive", prônant "un élargissement pragmatique" mais pas généralisé, en raison notamment des "difficultés organisationnelles et logistiques, avec des enjeux de froid, de conservation" des doses de vaccin.
Rappelons quelles sont les personnes visées par la campagne de vaccination (voir aussi le site vaccination-info-service) : les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH) et multipartenaires, les personnes trans multipartenaires, les travailleur·ses du sexe ; les professionnel·les des lieux de consommation sexuelle. Mobilisation !
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Crédit photo : Romain Doucelin / Hans Lucas / AFP