interviewInterview : Pony Pony Run Run "On dormait par terre sans duvet, c’était épique !"

Par Jérémie Lacroix le 06/03/2016
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Le groupe Pony Pony Run Run (PPRR) vient tout juste de sortir son nouvel album, Voyage Voyage. TÊTU a eu le privilège de les rencontrer en exclusivité pour échanger avec eux sur leur parcours, leur rapport à la musique et leurs inspirations. Entretien.

TÊTU : Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs et nous expliquer votre parcours ?

PPRR : Nous sommes Pony Pony Run Run. Aujourd’hui, nous ne sommes plus que deux frangins, Amaël et Gaëtan. On a commencé le projet Pony Pony Run Run il y a dix ans maintenant. On était tous les deux aux Beaux-Arts de Nantes. A la base on était cinq, maintenant on n’est plus que deux. L’idée de base était de former un groupe de pop-rock, de prendre la route, de faire quelque chose d’un peu plus direct que de réfléchir et de faire des photos, vidéos ou installations. En plus, on était déjà musiciens avant d’intégrer les Beaux-Arts pour y étudier les arts graphiques. Grâce aux réseaux sociaux de l’époque, on a pu faire des concerts, organiser des tournées partout en Europe. On a fait trois ans de tournée par nos propres moyens. On vivait de rien. On était tout de même cinq dans une bagnole toute pourrie. On dormait par terre sans duvet, c’était épique ! (rires). Des énormes galères qui, pour le coup, font de supers souvenirs. On se prenait pour des professionnels : on faisait tout ! Finalement un label nous a trouvé au bout de trois ans et demi. On s’est bien entendu, on avait des références musicales communes avec le directeur artistique et on a fait ce premier album qui était finalement une compilation de tous nos EP qu’on a réenregistrés pour l’occasion et du coup il y a eu entre autre « Hey You » qui nous a mis un peu plus sur le devant de la scène et depuis ça n’a jamais arrêté jusqu’en 2013, lorsqu’on a décidé de faire une pause.

TÊTU : Quelles ont été vos inspirations, influences musicales et artistiques en général ?

PPRR : On a énormément d’influences. On n’a pas un genre favori, on aime pleins de types de musique, peu importe d'où ça vient tant que ça nous parle. Ca peut être le truc très très indie que personne ne connaît ou le gros truc mainstream ou un truc plus classique ou du jazz, du blues de La Nouvelle-Orléans, de la musique africaine beaucoup. Pour cet album-ci, je n’ai écouté quasiment qu’une seule radio, une radio malienne. C’est tout ce que j’ai écouté pendant deux ans. Ça ne se ressent pas forcément dans notre musique mais ça influe sur la manière d’aborder la mélodie. Donc en fait on aime tout ce qui nous touche. C’est vrai qu’on a été élevé dans la culture anglo-saxonne pop-rock. Nos parents avaient des disques de Jimi Hendrix, Soft Machine... On passait aussi nos vacances dans les musées avec notre père, soit on allait voir des vieilles pierres qui tenaient encore debout, des monuments historiques à travers l’Europe, des ruines, soit des musées pour aller voir les impressionnistes, flamands et consorts. Les beaux-Arts de Nantes, c'était génial, il n'y avait pas de méthodologie, tu devais toucher à tout. C’est peut-être le meilleur apprentissage qu’on ait eu de notre vie car ça nous a permis de créer des choses, d’avoir le nécessaire pour savoir pourquoi on le faisait et être assez sincères dans notre propos. Ne pas faire semblant de faire quelque chose. C’est vraiment ça le truc : ils étaient dans l’attente d’un investissement et d’un raccord entre ta production et ta personnalité. Et c’est hyper important, c’est un truc qu’on retrouve tout le temps car il ne faut jamais perdre de vue que l’art est un mode d’expression et non pas un moyen de vente, il faut que ce soit en rapport avec une envie qui soit propre. La musique on l’a voulu de la même manière.

TÊTU : Vous évoquiez une pause dans votre carrière. De combien de temps et pour quelles raisons ? 

PPPR : Jusqu’à maintenant. Une petite pause pour prendre le temps de faire les choses avec du temps. Et revivre un peu, de remettre les pieds sur terre, de se ré-encrer, de ne pas être dans cette espèce de course frénétique où tu es tout le temps en concert ou dans des soirées en club. Chaque fois que tu fais de la musique, ça devient potentiellement un morceau sur lequel tu réfléchis comme ça. On avait besoin de souffler, de reprendre nos bases. Vu que depuis 2006 on tournait vraiment beaucoup et après il y a eu une accélération à partir de 2009 jusqu’à 2013, il était temps de savoir aussi pourquoi on faisait de la musique et comment ça se fait.

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TÊTU : Parlez-nous de ce nouvel album, Voyage Voyage. Un clin d'oeil à Desireless ? 

PPRR : On adore le titre. Je trouve que c’est le titre le plus cool qu’on n’ait jamais donné. C'est exactement ça, c’est juste un clin d’œil à Desireless, pas un hommage. A travers ce titre d'album, on voulait surtout exprimer la manière dont l’album a été construit. Donc au cours de nombreux voyages : tel morceau avait été réalisé à tel endroit. Mais du coup il y avait des noms de villes islandaises ou du Groenland imprononçables. Et même en France on a trouvé des noms imprononçables. Donc on s’est dit on laisse tomber la cartographie (chaque titre avec le nom d’une ville) et on a décidé de faire un titre qui explique le concept, on a trouvé le titre en cherchant notre axe de graphisme. On était hyper emballés. Quelqu’un nous a fait une blague en proposant de doubler le mot « voyage » comme « Pony Pony Run Run ». Les gens autour de nous étaient vraiment sceptiques, mais on trouve ça super comme nom. On va peut-être finir par rencontrer Desireless, mais elle fait du flamenco, donc c’est pas trop notre univers. Mais peut-être qu’on fera une reprise de flamenco avec elle. Ça m’étonnerait (rires).

TÊTU : Une tournée est prévue pour cet album ?

PPRR : Une petite tournée qui suit la sortie de l’album débute début avril mais la grosse tournée sera à l’automne. On a une vingtaine de dates avant l’été. En France. On fait des tournées internes, pour des raisons économiques, mais qui ne dont pas de notre ressort. Si ça ne tenait qu’à nous on ira partout, tout le temps. Mais apparemment ça n’est pas rentable pour les gens qui bossent avec nous. Mais on a pas mal tourné avant, un peu en Russie, beaucoup en Asie et en Europe.

TÊTU : Ca marche bien à l'étranger ?

PPRR : Ouais, carrément ! On n’est pas aussi mainstream que ça. On est plus (vu comme) un groupe indé dans ces pays-là. On remplit bien les clubs, bonne ambiance. En Angleterre, on a eu l’occasion de faire le festival de Glastonbury, le Koko à Camden. C’est peut-être ma salle de concert préférée. Elle est mortelle. C’est comme La Cigale mais avec deux étages de plus. Elle est rouge, car c’est un vieux théâtre.

TÊTU : Quel est votre point de vue sur les questions LGBT ?

PPPR : On est d’une génération où l’on est hyper ouvert. On est déjà assez multi-culturels : on vient de différents pays qu’on a été visité avec différentes personnes, franco-anglaises, franco-américaines ou qui venaient d’Asie. On a toujours été habitué à vivre avec des gens qui avaient des modes de vie très différents. Notre manière de vivre n’est pas la meilleure pour autant. Je ne me pose jamais la question de ce qui est normal ou pas. Par exemple, les gens allaient manifester dans la rue pour des trucs qui sont évidents, comme le mariage pour tous. Chacun vit sa vie comme il l'entend, l'orientation sexuelle n'a pas à interférer dans les rapports entre les gens. Et en plus, nous, aux Beaux-Arts on a connu autant de bi que d’hétéros, gays, etc. On était dans un univers hyper tolérant. Certains de nos amis on fait leur coming out. C’est impressionnant de voir qu’aujourd’hui c’est beaucoup plus archaïque et primitif que ce qu’on a toujours connu. Ça montre juste que le monde ne va pas très bien. Surtout qu’il y a trop d’extrémisme, chacun dans son coin à se tirer dessus. Ce qui est étrange par rapport aux manifestationx contre le mariage pour tous, c’est que ça a divisé la France en deux. Pour moi, ne pas tolérer le mariage pour tous, c’est ne rien tolérer. Ça m’a vraiment choqué. J’ai vu ça de loin car j’étais parti. Je n’ai pas vu ces manif’. Je me suis dit : « c’est quoi ce pays ? ».

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 Les Pony Pony Run Run seront en concert le 17 mai prochain à la Cigalle.

Pour plus d'informations :

http://www.lacigale.fr/spectacle/pony-pony-run-run

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