associationLes associations LGBT+ à l'assaut des villes de tailles moyennes

Par Nicolas Scheffer le 25/08/2020
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De plus en plus d'associations LGBT+ s'installent dans des petites et moyennes villes. D'Évreux à Ajaccio, des militants s'engagent pour aider et rendre visibles les personnes LGBT+.

Il y a un mois,  lors de la première réunion de l'association Phénix à Quimper (Finistère), une trentaine de personnes se sont déplacées. "Je ne m'attendais pas à un tel engouement", dit à TÊTU sa présidente, Doriane Kabahizi. Son objectif initial ? Donner de la visibilité aux personnes LGBT+ dans une ville comme Quimper et créer un "safe space", un espace où l'on peut être soi-même sans craindre le regard des autres.

"Si l'on souhaite un lieu de convivialité où l'on peut parler de ses problèmes mais aussi simplement rencontrer d'autres personnes comme nous, il faut faire une heure de route pour aller à Rennes", regrette-t-elle. Alors, la présidente de l'association se voit déjà organiser des cabarets, des événements conviviaux ouverts à tous, notamment aux parents de jeunes LGBT+ qui se posent beaucoup de questions. "Les grandes villes peuvent se permettre d'avoir un adjoint dédié aux discriminations que vivent les personnes LGBT+, mais il y a les mêmes besoins, sinon plus, dans de plus petites villes", insiste-t-elle.

Ne pas attendre une agression pour sensibiliser

Elle cite les obstacles administratifs pour changer d'état civil, l'éducation dans les collèges et les lycées, ou encore la formations des agents des forces de l'ordre lors de plaintes. "Il y a eu une agression transphobe récemment à Quimper. Il ne fait pas attendre qu'il y ait un passage à l'acte pour connaître la procédure et comment caractériser les faits !", s'agace-t-elle.

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À Évreux (Eure), Julien Fernandez fait le même constat. "À part un bar qui fait aussi sauna, il n'y a pas de lieux de convivialité", regrette le tout nouveau référent de l'antenne ébroïcienne du Groupe LGBTI Normandie. Il compte déposer les statuts de l'association ce mardi 25 août. "Si on veut parler, il faut faire 70 kilomètres jusqu'à Rouen", estime-t-il. La nouvelle antenne cherche donc à impulser une vie communautaire à Évreux et espère pouvoir organiser une Marche des Fiertés l'année prochaine.

Des commerçants inclusifs

L'association permettra aussi de faire de la prévention. Il a déjà prévu de créer une charte avec les commerçants qui pourront avoir un label d'inclusion. "Ils devront s'engager à respecter un climat serein dans leur établissement, à ne pas mégenrer de personnes trans, par exemple", dit-il. Heureusement, il n'a pas entendu parler d'agression. Mais début juillet, l'association a payé une chambre d'hôtel à un jeune d'à peine 18 ans qui venait d'être chassé de chez lui après avoir fait son coming out. L'association compte permettre à ceux qui en ont besoin d'avoir accès à un conseil juridique.

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Plus au sud, à Ajaccio (Corse-du-Sud), Françoise Santoni résume la philosophie de Bienvenue Chez Vous, qu'elle a fondé il y a quelques mois. "On n'est pas des vêtements, on n'a pas à être dans un placard", dit-elle alors que de nombreux Corses témoignent d'une pression à ne pas se montrer. La présidente de l'association ne croit pas que la Corse soit intrinsèquement homophobe. Pourtant, en juillet, un couple a été agressé à Ajaccio pour s'être embrassé. "Il y a une invisibilisation qui créé un climat qui n'est pas serein". Son association veut aider principalement les jeunes, de 15 à 25 ans.

Mettre les sujets des LGBT+ à l'agenda politique

Un numéro d'écoute doit être activé cette semaine et l'association permettra à des jeunes victimes de LGBTphobies de témoigner dans des collèges et lycées. C'est aussi un lieu dédié à l'orientation des personnes qui ont besoin d'être accompagnées.

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Les trois associations naissantes remarquent que les mairies avec lesquelles elles devront travailler ont toutes été ravies et souvent surprises de leur initiative. "Les petites mairies n'ont souvent pas d'agenda sur les politiques LGBT+, or il y a beaucoup de choses à faire localement. Ce n'est pas parce qu'on ne nous entend pas qu'on n'est pas nombreux", insiste Doriane Kabahizi de Quimper.

 

Crédit photo : Flickr / Mike McBey