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interviewRencontre avec Jean Palau, l'agriculteur gay de "The Voice"

Par Florian Ques le 29/04/2022
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D'abord sauvé par Nolwenn Leroy avant d'être repêché par Florent Pagny, l'agriculteur venu de Llagonne signe un parcours marquant dans la saison 2022 de The Voice. Auprès de têtu·, Jean Palau revient sur sa participation au programme de TF1 et sa fierté de pouvoir offrir une représentation gay en prime-time.

Féru de musique depuis sa plus tendre enfance, Jean Palau n'aurait jamais pu se douter qu'il se retrouverait, à 39 ans, en train d'enflammer le plateau de The Voice devant des millions de téléspectateurs. Et pourtant, voilà qu'il vient de changer d'équipe pour rejoindre les rangs de Florent Pagny, prolongeant sa trajectoire plus qu'enviable dans l'émission de TF1. "C'est un beau parcours et j'ai plein de choses qui se déclenchent à côté", nous confie le chanteur originaire de La Llagonne, dans les Pyrénées-Orientales (Occitanie). En amont de sa prochaine épreuve le samedi 7 mai, il s'est entretenu avec têtu· pour revenir sur son expérience... et ses projets.

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Participer à une émission comme The Voice, c'était un rêve devenu réalité ?

Jean Palau : C'est arrivé sur mon chemin un peu par hasard, en fin de compte. Ce qui me faisait vraiment peur, c'était l'exposition médiatique. Je suis marié, je suis gay, je suis agriculteur. Même si les choses ont évolué et qu'il y a davantage de tolérance, on est aussi dans une ambiance un peu tendue en ce moment. On voit bien ce qui se passe politiquement dans le pays. J'avais un peu peur des répercussions qu'il pouvait y avoir parce qu'il était hors de question que je cache mon mari ou ma vie. Soit j'y allais comme j'étais, soit je restais à la maison.

On a l'image d'une émission bienveillante malgré la compétition. C'est bien le cas dans les coulisses, notamment durant les répétitions ?

Ça, oui ! L'image "famille" qu'on voit à l'écran, tant entre les candidats qu'avec les équipes qui nous accompagnent, est bien réelle. C'est ce qui rend les choses parfois difficiles quand il y a des éliminations, et c'est la première chose qui va me manquer quand toute cette aventure va s'arrêter. Avant de penser au plateau, on pense au côté humain. La bienveillance que je ressentais dans The Voice en tant que téléspectateur lors des saisons précédentes s'est confirmée en coulisses.

Tu as essentiellement pu travailler avec Nolwenn Leroy jusqu'ici. C'est comment de bosser avec elle ?

C'est très naturel, c'est vraiment quelqu'un comme toi et moi. Elle avait aussi peur que nous de nous rencontrer. Je suis parti ensuite dans l'équipe de Florent Pagny mais ça n'a pas empêché qu'elle m'appelle au téléphone pour parler de la suite. C'est quelque chose qui reste. On a programmé de se voir et d'aller voir Kilian à son cabaret de Madame Arthur. C'est elle qui disait qu'on devait aller lui faire la surprise ! Ça ne s'est pas encore réalisé mais je suis persuadé que ça va se faire.

Quelle était ton ambition première en participant à The Voice ?

À la base, c'était mon neveu qui m'avait inscrit donc je n'étais pas parti avec de grandes idées. Après, forcément, après les sélections, tu commences à cogiter. Je voulais surtout remettre un pied dans la musique mais vraiment en tant qu'artiste. J'avais fait beaucoup de musique dans le passé. J'avais été intermittent du spectacle mais pour ça, tu intègres des spectacles existants, une comédie musicale ou un orchestre de variété comme on en trouve beaucoup dans les villages du sud. Mais tu ne te représentes pas toi-même ! Maintenant, je veux écrire mes chansons, sortir une discographie, trouver un public grand ou petit.

Pourquoi avoir mis ta carrière musicale entre parenthèses ?

Après le bac, je suis allé passer des auditions dans différentes compagnies dans le coin et j'ai obtenu des places. J'en ai vécu jusqu'à mes 25 ans, où j'ai rencontré mon homme qui n'était pas du tout dans la musique mais plutôt dans les montagnes. (Rires.) Ça faisait déjà plusieurs années que j'étais dans des spectacles et j'avais l'impression que ça devenait juste alimentaire. Mon compagnon et moi nous sommes alors lancés sur l'exploitation agricole. Au départ je pensais pouvoir maintenir les deux, mais c'était impossible avec le travail que ça demandait.

Rencontre avec Jean Palau, l'agriculteur gay  de "The Voice"
Jean Palau et son compagnon Denis (crédit photo : Jean Palau)

Tu es donc chanteur mais aussi berger. C'est dur de concilier les deux ?

C'était compliqué à 25 ans parce qu'on n'était vraiment que deux sur l'exploitation. On faisait des heures inimaginables. Au fur et à mesure, on a profité du tourisme pour faire une ferme pédagogique, ce qui nous a octroyé des moyens financiers. Au lieu de se mettre l'argent dans nos poches, on a surtout employé des gens pour avoir une vie normale avec des congés, des repos, des sorties... Pour The Voice, j'avais déjà des équipes en place pour assurer. C'était un peu compliqué au début. Mais aujourd'hui au moins, on peut faire de la musique sans mettre en péril l'exploitation.

Tu vis en Occitanie avec ton compagnon. Ton homosexualité a toujours été bien accepté dans ton coin ou bien ça n'a pas toujours été évident ?

Dans le secteur rural, je m'étais dit que j'allais prendre un coup de fusil. (Rires.) Alors qu'en fait, ça a toujours été accepté. Je n'ai jamais été le "pédé" qu'on regarde du coin de l'œil. Après, là où j'ai pu avoir des mauvais jugements ou des agressions, c'était quand j'habitais à Perpignan. Mais pas dans le milieu agricole.

En passant sur TF1 dans un tel télécrochet, tu représentes forcément la communauté LGBTQI+, d'autant plus les gays de province qu'on ne voit pas si souvent à l'écran. Tu vois ça comme une pression, un honneur ?

Au début, j'avais peur. Mais là, au fil de la diffusion, je ressens une certaine fierté. C'est montrer une autre facette des homos parce qu'au niveau télévisuel, on a souvent mis en avant ceux qui étaient plutôt excentriques – et ce n'est pas une mauvaise chose. Là, il s'agit de faire découvrir au public que des gens sont homos alors que vous ne vous en seriez pas douté. C'est aussi montrer qu'on trouve des homos dans tous les métiers. Le côté fierté est venu parce que j'ai eu beaucoup de retours sur les réseaux sociaux de gens qui me félicitaient d'offrir une image qu'on voyait peu.

La suite pour toi, elle ressemble à quoi ?

Pour pouvoir rebondir sur la visibilité que m'offre l'émission, je planche sur une reprise de "La montagne" de Jean Ferrat mais avec un arrangement très proche des musiques acoustiques piano à la Vianney. Ça sonne très 2022. J'avais envie de faire un clin d'œil à la province, à la ruralité parce que c'est quelque chose qui me tient à cœur. Rappeler aux gens de regarder autour de nous et de se suffire simplement des belles choses qui nous entourent. C'est un titre qui va faire la liaison entre ce que l'émission a présenté de moi et mes compositions futures qui vont moins parler de la terre.

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Crédit photo : TF1