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sexoSans péné mais non sans plaisir : 50 tendances de plan soft

Par Stéphane Durand le 27/04/2023
têtu· s'est interrogé sur les pratiques sexuelles soft, parmi lesquelles l'edging, le karezza, le queening, le milking… garanties sans sodo, mais non sans plaisir

[Article à retrouver dans le magazine tetu· disponible en kiosques] Plan branle, "humping", "karezza", "queening", "edging", "milking"… Les pratiques sexuelles dites "soft", c'est-à-dire sans sodomie, ont la cote sur Grindr & cie.

Illustration : Pol Anglada

On a tendance à l’oublier, mais le plaisir sexuel ne passe pas nécessairement par la pénétration. Du #nosodo revendiqué sur les applis au cunni exigé dans la vraie vie, il est temps de redéfinir le concept archaïque du préliminaire et de réhabiliter le plan soft… qui n’est pas toujours si doux, d’ailleurs.

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“La sodo, c’est seulement quand je suis amoureux, avertit Bastien, trentenaire francilien. Sur Grindr, j’ai écrit dans ma bio que je ne recherche pas de plan avec pénétration, précise-t-il. Mais j’indique quand même toujours être actif.” Comme beaucoup, il a connu une phase de surconsommation sexuelle facilitée par les applis. Avant de se lasser. “Quand je suis en couple, je suis actif à 90 %, explique-t-il. Mais plus je fais des plans, plus je m’aperçois que je ne kiffe pas tant que ça pénétrer un mec que je ne connais pas. Pour moi, c’est un acte super intime. Sur les applis, beaucoup me disent que je suis chelou, alors que je suis simplement beaucoup plus excité par un type que je vais caresser, sucer, avec lequel on va se branler… que par un inconnu qui va m’attendre à quatre pattes.”

Mais rassurez-vous, le jeune homme ne rencontre aucune difficulté à trouver des partenaires de jeu. D’ailleurs, les plus attentifs d’entre nous ont déjà constaté le retour de hype du plan branle, et la recrudescence des profils de mecs à la recherche d’un moment de sexe à base de caresses, de masturbation ou de fellation. En d’autres termes, en demande d’un “plan soft” – certains indiquent aussi #nosodo sur leur profil.

No sodo et "humping"

“La langue française n’a pas de mot simple pour désigner un rapport sexuel qui ne serait pas pénétrant, note Axelle Romby, sexologue et psychothérapeute. On range tout dans la grande catégorie des préliminaires, sans distinction aucune. Or les préliminaires, cela veut dire « se préparer à », comme s’ils étaient qu’un devoir à faire avant d’accéder à l’étape suprême de la pénétration.”

“J’en ai marre de passer une heure à faire un lavement pour au final niquer avec un inconnu vite fait, mal fait.”

Bastien

“Avec mes bails, on commence par s’embrasser longuement en se frottant, détaille Bastien. Et je m’aperçois que je mouille beaucoup plus que quand on se suce direct. D’ailleurs on reste habillés et c’est dix fois plus excitant !” Les savants appellent cette pratique le “humping”. À noter que vous n’êtes nullement forcés de vous y adonner en gardant vos vêtements. Raphaël, fier passif mulhousien de 25 ans, a lui aussi fait une croix sur la sodomie pour quelque temps. “J’en ai marre de passer une heure à faire un lavement pour au final niquer avec un inconnu vite fait, mal fait, explique-t-il. Ça demande trop d’efforts pour un résultat qui n’en vaut pas la peine.”

"Karezza", "queening" et "edging"

Alors pourquoi ne pas commencer, par exemple, par des caresses ? Par s’embrasser, se parler, se toucher ou se regarder ? Certains en font une pratique en soi, le “karezza”, qui consiste à faire monter lentement l’excitation, mais sans jamais jouir. En empêchant l’orgasme, ses adeptes souhaitent s’extraire de la course à la performance qui, selon eux, rend nos sexualités monotones. Un risque que ne comporte pas le “queening” – dérivé du mot “queen” –, qui consiste à trôner/dodeliner du bassin sur le visage de son partenaire afin de se stimuler l’anus ou la vulve.“ Selon moi, on fait l’amour à partir du moment où l’on s’embrasse nues, où l’on se frotte l’une à l’autre et où l’on prend du plaisir ensemble ! explique Gaëlle, 37 ans. Je ne vais pas forcément sortir un gode au premier date avec une fille, car l’excitation peut être intense uniquement avec des caresses et des cunnis. On peut même jouir ainsi bien plus fort qu’avec une simple pénétration.”

“Mon but est qu’ils atteignent le plus rapidement possible un état d’orgasme quasi statique."

Benjamin

Et c’est ce que prouve chaque jour Benjamin à ses 44.000 abonnés sur Twitter. Sous l’alias @theedgingdevil, il se filme en train de branler ses partenaires, qu’il attache à une chaise avec, parfois, les yeux bandés. Son objectif : contrôler leur excitation et retarder leur éjaculation au maximum. “Mon but est qu’ils atteignent le plus rapidement possible un état d’orgasme quasi statique, à la limite de l’éjac, et qu’ils s’y maintiennent durant toute la séance, détaille-t-il. Même s’ils sont attachés, il ne s’agit pas d’un jeu sadomaso, car il n’y a pas de rapport de domination.” Les aficionados appellent ça l’“edging”, et parviennent à retarder l’éjaculation pendant plusieurs heures.

Cet exercice de style demande du temps, et une pleine confiance envers son partenaire, car, souligne Benjamin, l’issue peut emmener tout droit au septième ciel comme plonger dans un abîme de frustration : “Je pratique l’edging depuis plus de dix ans et j’en suis venu à catégoriser quatre sortes d’orgasmes : l’orgasme explosif, avec une éjac surpuissante accompagnée de râles profonds ; l’orgasme ruiné, où le cerveau envoie des signaux contradictoires qui empêchent la personne de se lâcher et d’exploser, on a alors une éjac qui coule, sans projection ; l’orgasme sans contact, quand un partenaire éjacule sans l’aide de ma main ; et le « déni d’orgasme », lorsque le mec ressent un orgasme explosif à l’intérieur de lui mais sans qu’il éjacule.”

Le "Milking" : la traite

En explorant la sexualité sans pénétration, on découvre de nombreux paliers, plus ou moins soft, plus ou moins SM. Vous pourrez ainsi rencontrer le “milking”, littéralement “la traite” : et celui dont on va traire le lait, c’est vous, puisque votre partenaire va vous branler comme la bête que vous êtes, comme un étalon ou un taureau dont on récolte la semence. “Il existe des outils appelés « milking machine » qui créent du vide dans un tube, vraiment comme pour les vaches, mais je préfère pratiquer à la main”, précise Benjamin, qui cherche, lui, à faire éjaculer ses partenaires sans orgasme, sans plaisir et sans excitation. Pour cela, il a créé tout un protocole en amont de sa séance : “Il faut être très délicat, car l’objectif demeure la traite, c’est-à-dire l’éjac, mais sans exciter le sexe qui doit rester au repos ou en demi-molle. Pour réduire le risque d’excitation, je bande les yeux et j’attache le mec dans une position inconfortable, ce qui le fait rapidement débander.” Si beaucoup de mecs soumis le contactent, Benjamin privilégie pour cette pratique des partenaires actifs ou même dominateurs, qu’il conduit à une profonde jouissance sans passer par l’acte de pénétration, ce dont ils ne sont pas coutumiers : “On a du mal à concevoir qu’il est possible de déconnecter l’éjaculation et le plaisir.” Les produits laitiers, des sensations pures…

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