Dans son deuxième long-métrage, Toni en famille, le jeune réalisateur Nathan Ambrosioni raconte la vie d'une mère célibataire, jouée par Camille Cottin, qui élève seule cinq adolescents. Un film plus queer qu'il n'y paraît.
En 2019, Nathan Ambrosioni dévoilait Les Drapeaux de papier, qui faisait de lui le plus jeune réalisateur français à jouir de l'avance sur recettes du CNC. Près de quatre ans plus tard, le cinéaste grassois retrouve le chemin des salles avec Toni en famille, un deuxième long-métrage mettant en scène Antonia, dit Toni, une mère de cinq adolescents incarnée par Camille Cottin qui songe à reprendre ses études.
"Je trouve courageux les gens qui s'autorisent la remise en question et qui n'ont pas de mal à interroger leur situation, appuie Nathan Ambrosioni. J'avais envie de parler de ces gens-là, pour qui j'ai beaucoup d'admiration. Toni s'est alors imposée assez vite : une mère de famille, c'est une condition sociale ultime." Nourri par les personnages féminins du septième art – notamment Erin Brockovich, parangon de combativité qu'il évoque volontiers –, le jeune réalisateur dresse ici le portrait d'une femme en quête de renouveau, désireuse d'exister au-delà de son statut parental.
"J'avais envie de faire un film féministe, poursuit-il. J'avais envie que Toni fasse d'elle-même une priorité. Trouver son individualité, ce n'est pas aller contre ses enfants : c'est penser à elle et trouver son chemin vers l'accomplissement personnel." Pour son interprète, c'est surtout l'occasion de parler de la solitude qui peut aller de paire avec le rôle de mère célibataire. "En tant que spectateur, on est son confident, notamment grâce à ses regards, explique Camille Cottin. On la voit souvent regarder ses enfants, qui ne la regardent pas. On est avec elle dans ces moments de silence pour partager les émotions qui la traversent indépendamment du reste."
Double coming out
Lesbienne iconique dans Dix pour cent, l'actrice reste du côté queer de la force, puisque son personnage est mère de deux enfants LGBTQI+. Dans une des scènes les plus désopilantes du film, Marcus (Thomas Gloria) et Camille (Louise Labeque) font leurs coming out successifs au moment du repas. Du côté de Toni, malgré un brin de maladresse, c'est l'acceptation qui prime. "Il y avait une volonté un peu utopiste, avoue Nathan Ambrosioni lorsqu'on évoque ce passage. En tant que personne queer, on sait que ce n'est pas aussi évident. Un coming out, même quand ça se passe bien, ça ne se passe jamais aussi bien qu'avec Toni, où la sexualité est un non-sujet."
Le réalisateur se réjouit d'avoir pu confier le rôle-titre à Camille Cottin, notamment en raison de son statut d'alliée : "Sa filmographie est apaisante pour une personne queer. On ne sent pas une volonté de porte-drapeau : ses choix parlent d'eux-mêmes. C'est chouette que des gens qui ne fassent pas partie de la communauté nous soutiennent ainsi." À la comédienne de renchérir : "Je suis heureuse quand c'est exploré de cette façon-là. Il est très clair que c'est important pour moi. Tant que je pourrai participer à des œuvres qui vont dans ce sens, je le ferai. Ça me touche beaucoup."
Et si Toni en famille ne tourne pas uniquement autour des thématiques LGBTQI+, c'est pour une bonne raison, que le jeune réalisateur assume pleinement, et qui n'a jamais manqué de faire débat. "Je pense que l'orientation sexuelle d'un personnage ne doit plus être un sujet de fiction, déclare Nathan Ambrosioni. J'en ai assez que ce soit un sujet de cinéma là où l'hétérosexualité ne l'est jamais. On a surtout besoin de représentations positives. Les crimes homophobes existent, mais j'ai l'impression qu'au cinéma on a besoin de respirer un peu, et justement de s'échapper de cette terrible réalité."
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Crédit photo : Chi-Fou-Mi Productions / StudioCanal
