LGBTphobieEn Estonie, le ministre de l'Intérieur appelle les homos à "fuir vers la Suède"

Par Nicolas Scheffer le 20/10/2020
Estonie

En Estonie, le ministre de l'Intérieur a tenu des propos homophobes révoltants. Selon lui, les opposants à l'inscription du mariage hétéro dans la constitution sont "hétérophobes". Il a été recadré par la présidente, Kersti Kaljulaid.

Le ministre de l'Intérieur de l'Estonie appelle la communauté LGBT+ à "fuir en Suède". Le dirigeant d'extrême droite, Mart Helme se déclare "pas très amical" avec les homosexuels de son pays et les encourage à fuir. Et se fait sévèrement recadrer.

Une interview accordée au Deutsche Welle, l'équivalent allemand de RFI, tourne à l'appel à la haine. Le ministre appelle à la mise en place d'un referendum pour définir le mariage comme une union hétérosexuelle. Mart Helme souhaiterait même que cette révision ait une valeur constitutionnelle. À l'entendre, les opposants à son projets sont même "hétérophobes".

"Laissez les fuir vers la Suède"

Le referendum "est important pour le peuple. Sans mariage, sans femmes et hommes qui ont des enfants, nous n'avons pas d'avenir. Nous voulons que notre pays soit préservé et il ne peut pas l'être sans enfant et morale (sic)". "Quoi ? Les gays attaquent et envahissent la nation estonienne ?", demande le journaliste du Deutsche Welle. Réponse : "laissez les fuir vers la Suède. Tout le monde les traite avec plus de politesse. Je ne suis pas vraiment amical avec eux".

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Repris, le ministre de l'Intérieur s'est défendu de toute homophobie. "Ce n'est pas de l'homophobie. Ceux qui trouvent que le referendum n'est pas nécessaire sont hétérophobes. S'ils peuvent faire leur propagande homosexuelle (sic), nous pouvons également faire de la contre-propagande", a-t-il rétorqué. Devant le tollé suscité, Mart Helme a jugé que ses propos avaient été "mal interprétés", remarque Pinknews.

Une présidente "honteuse et triste"

La sortie a suscité un tollé de la part de la majorité. La présidente (libérale conservatrice) a rapidement dénoncé les propos de son ministre. Selon elle, il n'est "pas apte" à être au gouvernement. Elle sort ensuite la sulfateuse : "je ne comprends pas l'hostilité non-dissimulée de Mart Helme envers notre société. On parle de notre propre peuple - nos policiers, professeurs, artistes, ouvriers, nos voisins, nos collègues ou nos amis. On parle des étrangers également, mais qui constituent notre peuple", a-t-elle déclaré le 17 octobre.

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"Classer les personnes en fonction de l'orientation sexuelle, de la couleur de peau ou n'importe quelle autre caractéristique est inacceptable, contraire à la constitution et humainement tout simplement révoltant", lâche-t-elle.

Par la suite, elle se dit "honteuse et triste" pour le peuple estonien. Pour elle, la dignité de son ministre "est moins importante que son droit d'abuser de sa position de pouvoir pour rabaisser les autres. Le mal et la haine ne peuvent pas être une politique".

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Des propos répréhensibles

Le Premier ministre Jüri Ratas (centriste) a partagé les critiques de la présidente. Il a rappelé au ministre que la Constitution estonienne prévoit que tout le monde est égaux devant la loi et que personne ne devrait être discriminé. Les propos de Mart Helme sont "répréhensibles sans équivoque" et que la coalition devra discuter du sujet. Il a ajouté que les propos haineux du ministres ne constituait en rien l'annonce d'un changement de politique gouvernementale.

 

Crédit photo : Johan - Paul Hion