Abo

justiceUn ado gay de 15 ans séquestré et tabassé à Grenoble, l'homophobie pas retenue

Par Nicolas Scheffer le 16/04/2024
grenoble,fait divers,agression,homophobe,homophobie,justice

À Grenoble, cinq mineurs seront jugés en juin pour violences en réunion après l'agression d'un adolescent de 15 ans, dont les photos et vidéos intimes ont été postées sur les réseaux sociaux et qui aurait reçu des insultes homophobes. Le parquet n'a pourtant pas retenu à ce stade la qualification d'homophobie.

Décidément, la circonstance aggravante d'homophobie peine à être retenue par la justice française. Vendredi 12 avril, Le Dauphiné libéré rapporte "le calvaire d’un ado passé à tabac dans une cave par une bande". Cinq adolescents, âgés de 14 à 16 ans, ont été interpellés jeudi 11 avril pour avoir contraint à les suivre et passé à tabac un adolescent de 15 ans. Bien que les premiers éléments de l’enquête font apparaître que la victime a été agressée pour son orientation sexuelle supposée, le caractère homophobe n'a pas été retenu à ce stade, fait savoir ce mardi à têtu· le procureur de la République de Grenoble.

À lire aussi : [Exclu] Agression homophobe dans un bar à Paris : Amos témoigne

Les faits, décrits par Le Dauphiné libéré, remontent au 4 avril. Vers 16h, alors qu'il se trouve dans la rue à proximité d'une des cités de la Villeneuve à Grenoble, l'adolescent de 15 ans fait la rencontre de cinq mineurs qui lui avaient déjà volé son téléphone portable, et qui l'intiment de les suivre pour le récupérer. Sur le trajet, le garçon est "frappé de plus en plus violemment, tout en étant abreuvé d’injures homophobes". Son calvaire se poursuit dans un lieu clos, "très probablement une cave" selon nos confrères du quotidien régional, où ses agresseurs le frappent notamment avec une barre de fer et le contraignent à donner le code de déverrouillage de son téléphone. Ils accèdent alors à des photos et vidéos dénudées du garçon, qu'ils diffusent sur les réseaux sociaux pour l'humilier. Ils contactent également la famille de l'adolescent, avant de finalement le libérer. Pour ses blessures physiques, la victime se verra prescrire quatre jours d'incapacité totale de travail (ITT).

L'homophobie pas retenue à ce stade

Contacté par têtu·, le procureur de la République ne conteste pas la version des faits rapportée, ni leur gravité, mais explique avoir renoncé à retenir la circonstance aggravante d'homophobie. "S’agissant de la qualification homophobe des faits, le parquet s’est évidemment posé la question mais a fait le choix de ne pas la retenir à ce stade pour plusieurs raisons : absence de témoignage de tiers, dénégations de certains mis en cause, refus du principal mis en cause de répondre aux questions des enquêteurs", nous détaille Éric Vaillant.

Néanmoins, précise le procureur, "la qualification sera remise dans le débat lors de l'audience et le tribunal pourra éventuellement la retenir au vu des nouveaux éléments qui apparaîtront, notamment lors des débats". C'est en effet possible, et c'est d'ailleurs arrivé récemment dans une affaire de guet-apens homophobe à Paris. Pour l'heure, le principal suspect a été présenté devant le juge des enfants, qui l'a astreint à un couvre-feu et à un suivi éducatif jusqu’à son jugement prévu début juin, en même temps que celui de ses quatre complices présumés, pour violences en réunion.

Sollicité par têtu·, l'entourage d'Aurore Bergé, ministre en charge de la lutte contre les discriminations, fait savoir que "la ministre est horrifiée face à l'horreur et à la barbarie qu'a subies ce jeune adolescent de 15 ans. Le caractère homophobe de l'agression laisse malheureusement peu de doute." La délégation interministérielle de lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la haine anti-LGBT+ (Dilcrah) a apporté publiquement "tout [son] soutien au jeune gay séquestré et tabassé". Également interrogée par têtu·, la municipalité grenobloise renvoie à la réaction de l'adjointe écologiste à l'Égalité des droits, Laura Pfister : "Tout mon soutien à la victime. Cette agression s'inscrit dans un contexte d'augmentation des violences LGBTQIA+phobes en France", a déclaré celle-ci sur X (Twitter), avant d'inviter "à participer massivement à la Pride du 1er juin à Grenoble". L'occasion d'exiger, une fois de plus, une réaction de la justice et des autorités à la hauteur des violences LGBTphobes.

À lire aussi : Face à la circonstance aggravante d’homophobie, les errements de la justice

Crédit photo : Frédéric Bisson / Flickr

justice | LGBTphobie | violences LGBTphobes | fait divers | Auvergne Rhône-Alpes | news