TunisieTunisie: Six mois de prison pour la militante queer Rania Amdouni

Par Xavier Héraud le 15/03/2021
Rania Amdouni

Militante queer pour les droits humains, Rania Amdouni a été arrêtée alors qu'elle tentait de déposer plainte contre les policiers qui la harcèlent. Elle a été condamnée à 6 mois de prison ferme.

La militante tunisienne Rania Amdouni a été condamnée à six mois de prison ferme et à une amende pour avoir protesté contre les policiers qui refusaient de prendre sa plainte pour harcèlement, rapporte l'association Human Rights Watch. Sa plainte visait justement des policiers, qui la harcèlent depuis des mois dans la rue ou en ligne en raison de son apparence et de son orientation sexuelle.

Selon son avocat, Rania Amdouni s'est rendue à un poste de police le 27 février dernier. Au lieu de prendre sa plainte les policiers se sont moqués d'elle. Elle a alors quitté les locaux et a crié une fois à l'extérieur pour protester contre la police tunisienne. C'est là qu'elle a été arrêtée.

Le 4 mars, un tribunal l'a condamnée pour avoir "insulté un officier de police", "désordre sur la voie publique" et "état d'ébriété apparent" à six mois de prison et une amende de 18 dinars tunisiens (5,50 euros). Elle a fait appel.

La militante est depuis emprisonnée à Manouba, à l'ouest de Tunis, où selon Human Rights Watch elle continue à être harcelée.

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Manifestations contre le pouvoir

Rania Amdouni fait partie de l'association Damj, qui milite pour les droits humains en Tunisie. Elle a participé à plusieurs manifestations contre le pouvoir et la police en février, dix ans après la révolution tunisienne. C'est à partir de ce moment-là, selon ses avocats, que la police a commencé à la cibler, selon Reuters.

"La réponse de la police à la plainte de Rania Amdouni lui dénie le droit d'être protégée et mine la confiance du public envers les forces de l'ordre et le système judiciaire tunisien", affirme Rasha Younes, de Human Rights Watch. En arrêtant et condamnant Rania Amdouni, les autorités tunisiennes envoient un message consternant aux victimes de discrimination: ces dernières n'ont personne vers qui se tourner et la moindre protestation les conduira en prison."

Selon l'association Damj, l'appel de sa condamnation doit être examiné le mercredi 17 mars.

L'homosexualité réprimée par la loi

En Tunisie, les droits des personnes LGBTQI+ ne sont toujours pas reconnus. Le pays pratique encore régulièrement les "tests anaux" pour "prouver l'homosexualité" masculine. L'homosexualité toujours sévèrement réprimée par la loi. Chaque année, des personnes sont arrêtées et condamnées pour leur orientation sexuelle. Le Collectif civil pour les libertés individuelles a recensé 120 procès pour homosexualité en 2019.

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