Le jeune Aliocha Reinert crève l'écran dans Petite nature, le tout premier long-métrage en solo de Samuel Theis (en interview dans le magazine têtu· en kiosques le 16 mars) avec Antoine Reinartz. Un récit d'apprentissage nuancé où un enfant de 10 ans se retrouve tiraillé par ses désirs naissants. À voir !
Il est de ces films prouvant qu'il n'y a pas besoin d'un grand concept pour narrer une grande histoire. Petite nature rentre de toute évidence dans cette catégorie. Au cinéma depuis ce mercredi 9 mars en France, ce drame social est le premier long-métrage en solo de Samuel Theis, puisque le comédien-devenu-réalisateur – que vous retrouverez en interview dans le magazine têtu· en vente à partir du mercredi 16 mars – avait déjà fait ses armes avec Party Girl en 2014 aux côtés de Marie Amachoukeli et Claire Burger. Ici, il nous emmène à la rencontre de Johnny, un gamin issu d'un foyer modeste qui ne rêve que d'une chose : prendre un nouveau départ loin de sa famille.
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Car Johnny, 10 ans, n'a pas une vie facile. Sa mère, présentée comme aimante bien qu'immature et irresponsable, se repose constamment sur lui pour s'occuper sa petite sœur Mélissa. Il a aussi un frère aîné, Dylan, en pleine crise d'adolescence, qui préfère être scotché sur son téléphone que lui venir en aide. Alors quand vient la rentrée scolaire, le jeune blondinet voit une lueur d'espoir en la personne de Jean Adamski, son maître d'école. Tendre, instruit et stimulant, ce dernier lui ouvre un champ des possibles que l'enfant ne soupçonnait pas. C'est un éveil, qui le bouleverse à plusieurs niveaux…
Petite nature, grande finesse
On aurait pu craindre que Petite nature joue la carte de l'ambiguïté quant aux réelles intentions de l'instituteur. Or ce n'est pas le cas : le scénario ne laisse aucune place à la polémique et balaie toute interprétation fallacieuse, évitant donc avec habileté une intrigue touchant à la pédophilie. Dans le film, le personnage du maître d'école – campé par Antoine Reinartz, très juste dans ce rôle – s'apparente davantage à un élément déclencheur que perturbateur. Il permet à Johnny d'aspirer à une vie autre que celle qu'il a toujours connue et c'est bien là que les problèmes commencent.
À bien des égards, un spectateur lambda pourrait croire que Petite nature parle de la découverte par Johnny de son homosexualité. Pourtant, ce n'est pas le propos du film. Oui, il traite en partie de l'attirance que voue l'enfant à son instituteur, mais ce sentiment croissant a surtout à voir avec ce que représente à ses yeux le maître d'école : un confort de vie, un appétit pour la culture, une sérénité, une maturité... En d'autres termes, il incarne une échappatoire à sa vie présente, ternie par le manque d'ambition de sa génitrice et le désengagement de celle-ci de ses responsabilités parentales.
La révélation Aliocha Reinert
Petite nature aborde donc la question du désir au sens large. Pour Johnny, il s'agit du désir de prendre son envol, d'exister au-delà des conditions de vie qui lui ont été données, peu propices à son épanouissement. Mais aussi du désir amoureux qui, bien que mal orienté, galvanise le jeune héros et lui permet d'oser comprendre et verbaliser ce qui relevait jusqu'alors de l'indicible. Et, enfin, du désir de trouver sa place, d'appartenir à un cercle social choisi plutôt que subi. En cela, le public LGBTQI+ peut clairement se retrouver dans cette trajectoire.
La force de Petite nature se trouve en premier lieu dans son script, d'une finesse d'écriture assez frappante. Mais il ne serait rien sans sa réalisation intimiste, avec une poignée de plans sublimes de simplicité, et par-dessus tout l'interprétation d'Aliocha Reinert. Le (très) jeune comédien signe ici son premier film et livre une performance bluffante, s'imposant déjà comme l'une des révélations cinéma de 2022. Il est épaulé par un casting secondaire plus qu'au niveau, avec une mention particulière pour Mélissa Olexa, également novice devant la caméra, qui joue la mère de Johnny. Tant de raisons réjouissantes qui font de Petite nature un grand premier film solo.
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>> Bande-annonce de Petite nature :
Crédit photo : Ad Vitam