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lobby réacMarion Maréchal et Natacha Polony : bal tragique de panique transphobe

Par Thomas Vampouille le 13/07/2023
incitation à la haine Christine Boutin Cour d'appel

Dora Moutot n'a qu'à bien se tenir : se livrant à un concours de panique morale autour de la transidentité, Natacha Polony alerte dans Marianne sur "l'offensive identitaire transgenre", quand Marion Maréchal crie au "fanatisme transgenriste" dans L'Incorrect. Une convergence "femelliste" qui prétend nous ramener 50 ans en arrière, au bon temps du "poids de la biologie sur nos destinées humaines".

Pour cet été 2023 sur les plages du lobby réac, la mode est au bleu-blanc-rose. Les couleurs du drapeau trans s'affichent ainsi à la une de L'Incorrect, magazine de l'extrême droite tendance Marion Maréchal-Le Pen, placardée en ce début juillet sur les dos de kiosques parisiens. Une couverture assez jolie, somme toute, si l'on ne savait pas lire. "TRANS, les enfants cobayes, enquête sur les martyrs d'une idéologie", proclame le titre sur la photo, rien que ça. Un délire paranoïaque qui fait écho à la une de l'hebdomadaire Marianne fin juin : "Transgenres, l'offensive identitaire".

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"Phénomène ultraminoritaire, la transidentité a cependant envahi le quotidien des Français", assène en ouverture de Marianne sa directrice de la rédaction, Natacha Polony, justifiant ainsi sa volonté d'en faire la une et un dossier de douze pages. Une obsession qui ne date pas d'hier puisque dès l'hiver 2019, soit un an après son arrivée à la tête de l'hebdomadaire, ce dernier nous avait déjà servi de belles tartines transphobes composées de fake news glanées sur Facebook, sous le titre : "Bienvenue en Absurdie".

Son homologue de L'Incorrect, Arthur de Watrigant – qui possède comme il se doit son rond de serviette chez CNews – a quant à lui confié la charge éditoriale de son dossier à Marion Maréchal ; après tout, c'est plus simple. Dans une tribune intitulée "Du féminisme au transgenrisme", l'égérie de la France sclérosée confirme qu'elle entend des voix puisqu'elle proclame d'entrée : "Je suis une femme, je suis une mère. Est-il encore possible de le dire ?" Eh non pardi, les membres du "lobby gay" pointé dans ces pages le savent : on ne parle plus de nos génitrices en ces termes infamants ! "Pour les adeptes de cette théorie du genre, je ne suis plus une femme, je suis une 'personne à vulve' ou une 'personne menstruée'. Charmant", se lamente encore la jeune Le Pen, qui tient à mettre les points sur les "i" face aux "fanatiques transgenristes", récitant Dora Moutot dans le texte : "Une femme est un humain femelle". C'est vrai que c'est plus romantique dit comme ça.

Le point "terrorisme trans"

C'est bien toujours cette obsession du biologique qui anime la révolte du lobby réac face au "terrifiant monde LGBT" dépeint par L'Incorrect : "Le mâle (XY) n'est plus un homme, la femme n'est plus une femelle (XX)". Or, développe Natacha Polony, "le sexe biologique permettant de distinguer des individus mâles et femelles" est "un des rares éléments de stabilité dans un monde de dérégulation généralisée". Eh oui ma bonne dame… pardon, femelle, tout fout le camp et "le biologique ne signifie plus rien", reprend L'Incorrect. Jeanne, au secours ! Dans le féminisme ébouriffant prôné par ces férues de chromosomes, les femelles sont donc priées de montrer chatte blanche, de subir leurs règles bio et probablement, en cas d'idée saugrenue de maîtrise de leur procréation, d'opter pour la méthode Ogino. Ou la natchure élevée au rang de sacré, sainte-Christine priez pour elles. "Vous pensez que j'exagère ?", interpelle Marion. Allons bon…

N'allez surtout pas, cependant, leur rétorquer par le vécu des personnes dont elles parlent. "Il faudrait donc laisser aux seuls 'concernés' le monopole de la parole sur ce phénomène ?", s'insurge d'avance Natacha. Et si L'Incorrect reconnaît le risque suicidaire accru chez les ados concernés, que "les études démontrent effectivement", il balaye l'argument comme un chantage au suicide, ironisant : "Si on ne fait rien, le petit va se passer la corde au cou". Classe. Mais c'est qu'en face, le danger brandi n'est pas des moindres : "Nous avons là les prémices d'un 'terrorisme trans'", prophétise dans L'Incorrect un certain Pierre Valentin, "spécialiste du wokisme" interviewé par le directeur. Distinguant "le mouvement 'trans' contemporain (…) des transsexuels 'à l'ancienne'" – ah, le bon temps des travelotes qu'on pouvait impunément moquer ou taper dans la rue – il insiste : "Comme dans l'islamisme, ils flottent dans un bain idéologique particulièrement toxique qui va favoriser un passage à l'acte au sein des 0,01% des moins psychologiquement stables d'entre eux".

"Les lobbys LGBT déploient l'artillerie lourde pour perfuser la France de leur idéologie déconstructice et de leur folie fanatique…"

Des chiffres, Natacha Polony en a aussi sous la pédale : la transidentité, relève-elle, "concernerait selon une étude internationale 355 personnes sur 100.000 habitants". De quoi, assurément, justifier tout ce tintouin réactionnaire. "C'est un sujet auquel nous sommes rarement confrontés", confirme un proviseur dans le dossier attenant, tandis que L'Incorrect dénombre "plus de 450 demandes" de transition en 2020, concluant au sujet de ce "phénomène" : "Les lobbys LGBT déploient l'artillerie lourde pour perfuser la France de leur idéologie déconstructice et de leur folie fanatique, avec comme première victime nos enfants". Soit le bon vieux combo "ils sont partout" + "attention à nos enfants", comme si ces gens-là n'en avaient pas. Breaking news à l'intention de ces cishétéros coincés dans l'époque des Visiteurs : ce sont nos enfants aussi, et s'ils sont victimes, c'est avant tout de vos idéologies qui les enchaînent.

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Crédit photo : Christine Boutin, AFP