Face aux images d'une séquence de "booty therapy" organisée au premier meeting, ce samedi 2 décembre, de Marie Toussaint, tête de liste d'Europe Écologie-Les Verts aux élections européennes de juin 2024, on entend des éditorialistes unanimes railler un parti "hors sujet". Et si EELV avait, au contraire, visé dans le mille ?
Voir des culs s’agiter, libres. Des culs presque à l’air, arrière-trains de corps non stéréotypés, qui bougent en rythme, fiers. Ces images, par exemple, vous ne les verrez plus dans la Russie de Vladimir Poutine, engagée en interne depuis dix ans dans une répression de plus en plus ouverte de tout ce qui symbolise la liberté occidentale, en premier lieu les corps queers et le corps des femmes.
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Même pas besoin d’aller chercher au-delà de l’Union européenne, d'ailleurs : allez montrer à Viktor Orbán les images de la "booty therapy" organisée ce samedi 2 décembre au meeting de lancement de la campagne européenne d'Europe Écologie-Les Verts (EELV)… Voici déjà treize ans que la Hongrie qu'il dirige, devenue membre de l’UE en 2004, dérive sous l’effet de la politique qu'il mène dans la droite ligne de Vladimir Poutine. Loi sur loi, provocation après provocation, Viktor Orbán impose le contrôle des médias, la mise au pas de la justice, les discriminations anti-LGBT, le durcissement des conditions d'avortement. À telle enseigne que le Parlement européen a adopté l'an dernier un rapport constatant que la Hongrie n'est plus réellement une démocratie mais un "régime hybride d'autocratie électorale".
Pour une Europe qui protège les femmes et les LGBT+
Assauts contre un prétendu "lobby LGBT", contre le droit à l’IVG, défense de la famille traditionnelle, blanche, si possible catholique… Budapest n’est même plus une exception au sein de l'UE : du nord au sud et de l’est à l’ouest, le camp des réactionnaires repousse partout, fort comme un pissenlit : victoire de Giorgia Meloni en Italie, de Robert Fico en Slovaquie, de Geert Wilders aux Pays-Bas. Dans un monde à nouveau en crise, les populistes ont le vent en poupe. Et le grignotage de l’État de droit qu'ils mettent immanquablement en œuvre, on en retrouve les mêmes composantes dans le monde entier, des États-Unis trumpistes à l'Argentine de Javier Milei. Avec toujours le même double corollaire : la remise en cause de la liberté des femmes à disposer de leur corps, et la négation des droits LGBTQI+. Les corps des femmes et les corps queers, toujours.
En France, l'extrême droite souscrit pleinement à l'idéologie de ce lobby réac international, contre lequel têtu· alertait en amont de la dernière présidentielle. La vague est là, elle revient aux États-Unis plus forte que la première, et en Europe l'UE a un rôle à jouer dans la contre-offensive. Face à Budapest, la Commission européenne et 15 États membres ont pour la première fois déclenché la procédure d'infraction prévue par les traités. Cela ne suffit pas encore à faire reculer Viktor Orbán, mais qui peut espérer faire mieux ? Dans quelques mois nous voterons aux élections européennes (le 9 juin 2024). Il serait bon que le débat porte sur la préservation de notre espace européen comme lieu d’un mieux-disant, lent mais constant, pour les droits humains, et donc en premier lieu ceux des femmes et des queers. Dans cette campagne qui s'ouvre, EELV a choisi la bonne porte d'entrée.
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Crédit photo : EELV via YouTube