Robert Badinter, est mort à l'âge de 95 ans, a-t-on appris ce vendredi 9 février 2024. Comme ministre de la Justice de François Mitterrand, il avait porté avec la députée Gisèle Halimi la loi qui abolit en 1982 les discriminations homophobes dans le droit français.
La nouvelle fait l'objet d'un flash, le plus haut niveau d'urgence de l'Agence France-Presse. Robert Badinter est mort dans la nuit à l'âge de 95 ans, a annoncé ce vendredi 9 février une collaboratrice de l'ancien ministre de la Justice à l'AFP. Né le 30 mars 1928 à Paris, l'avocat de profession a inscrit son nom dans l'histoire de France en portant, comme garde des Sceaux de François Mitterrand, le combat pour l'abolition de la peine de mort en 1981.
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La communauté LGBT lui doit également une fière chandelle puisque c'est également lui qui porta, aux côtés de la députée Gisèle Halimi à l'Assemblée nationale, la loi du 4 août 1982 abolissant l'article 331 alinéa 2 du Code pénal qui, en établissant une différence de majorité sexuelle entre les relations homosexuelles (18 ans) et les relations hétérosexuelles (15 ans), établissait de facto un délit spécifique d'homosexualité. À la tribune, il avait alors lancé cette phrase restée gravée dans nos mémoires : "Il n'est que temps de prendre conscience de tout ce que la France doit aux homosexuels."
« Il n’est que temps de prendre conscience de tout ce que la France doit aux homosexuels... »
Le 20 décembre 1981, Robert Badinter soutenait la proposition de loi visant à dépénaliser l’homosexualité. Elle sera adoptée le 27 juillet 1982, il y a seulement 36 ans.#Quotidien pic.twitter.com/zFZci6Vhvu
— Quotidien (@Qofficiel) November 29, 2018
Robert Badinter et têtu·
têtu· avait rencontré l'ancien ministre fin 2021, pour revenir sur ce pan de l'histoire LGBT à l'occasion des 40 ans de la dépénalisation de l'homosexualité. Nous recevant dans son bureau perché au cinquième étage d'un immeuble haussmannien, Robert Badinter n'avait rien perdu de sa vivacité d'esprit ni de sa capacité d'indignation. Pendant 1h30, il avait évoqué avec nous ses combats passés mais aussi ses sujets de préoccupation d'aujourd'hui, notamment son attachement à l'universalisme, qu'il partageait avec son épouse, la philosophe et féministe Élisabeth Badinter : "Sans universalisme, pas de progrès dans le monde entier." Il déplorait en particulier le manque de mobilisation sur les droits LGBTQI+ dans le monde : "Il devrait y avoir un mouvement international qui rappelle que la persécution des homosexuels dans le monde est insupportable !"
En ligne de mire depuis la fenêtre de son bureau, au-dessus des arbres du jardin du Luxembourg, se dressait le dôme du Panthéon, qui s'apprêtait lors de notre rencontre à recevoir la dépouille de Joséphine Baker. Le temple républicain des "grands hommes" sera-t-il sa dernière demeure ? À la patrie reconnaissante et à sa famille d'en décider désormais. "Robert Badinter ne cessa jamais de plaider pour les Lumières. Il était une figure du siècle, une conscience républicaine, l’esprit français", a réagi le président de la République, Emmanuel Macron, tandis que le Premier ministre, Gabriel Attal, a écrit : "L’abolition de la peine de mort sera à jamais son legs pour la France. Nous lui devons tant. Nos droits et nos libertés lui doivent tant. (…) Le pays des Lumières perd l’un de ceux qui a continué à les faire briller." L'association SOS homophobie a rendu un "profond hommage" à Robert Badinter : "Nous saluons son action résolue et constante en faveur de la reconnaissance, de l’égalité et de la dignité des personnes LGBTI."
S'inclinant devant sa mémoire, têtu· accompagne ses condoléances à ses proches d'un simple : merci, monsieur Badinter.
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Crédit photo : Eric Feferberg / AFP