En vertu de la nouvelle loi anti-homosexualité promulguée en mai par le président de l'Ouganda, un jeune homme a été incarcéré, première victime du durcissement de l'homophobie d'État dans ce pays d'Afrique de l'Est.
Il n'a que 20 ans et il est victime de l'une des lois les plus répressives au monde contre l'homosexualité. En Ouganda, un homme a été inculpé pour "homosexualité aggravée", disposition introduite au printemps dans la législation de ce pays d'Afrique de l'Est. Selon l'acte d'accusation cité par l'AFP, le jeune homme est poursuivi pour avoir eu "un rapport sexuel illégal avec (…) un homme adulte de 41 ans". Mis en examen le 18 août, il a été incarcéré à Soroti, dans l'est du pays.
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Alors que l'homosexualité était déjà pénalisée en Ouganda, la "loi anti-homosexualité 2023", promulguée en mai par le président Yoweri Museveni, a introduit de nouveaux crimes comme la "promotion de l'homosexualité" et donc "l'homosexualité aggravée", en cas de récidive. Une porte-parole du procureur a confirmé à Reuters que le jeune homme arrêté encourt la peine de mort. Son avocate, Justine Balya, considère que la loi sur laquelle repose l'accusation est inconstitutionnelle – le texte est d'ailleurs poursuivi devant le tribunal administratif, qui n'a pas encore statué. Selon elle, quatre autre personnes sont poursuivies en vertu de la nouvelle loi mais son client est le premier a être inculpé pour "homosexualité aggravée".
L'Ouganda, leader mondial de l'homophobie
Cette loi homophobe a suscité l'indignation des Nations unies et des ONG de défense des droits humains. "La promulgation de cette loi profondément répressive constitue une grave atteinte aux droits humains ainsi qu’à la Constitution ougandaise et aux instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits humains auxquels l’Ouganda est partie. La loi de 2023 portant répression de l’homosexualité ne fera qu’inscrire la discrimination, la haine et les préjugés contre les Ougandais et Ougandaises LGBTI et leurs alliés dans la législation", avait réagi Amnesty International en mai.
En août, faisant valoir que ce texte allait "fondamentalement" à l'encontre de ses valeurs, la Banque mondiale a annoncé qu'elle refuserait le financement de nouveaux projets en Ouganda. Le président américain, Joe Biden, a qualifié le texte d'"atteinte grave" aux droits humains et menacé de suspendre les aides et investissement dans le pays. Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrel, a également dénoncé le texte comme "contraire aux droits humains". En 2014, alors que le Parlement ougandais avait voté une loi réprimant l'homosexualité, les bailleurs internationaux avaient déjà réduit leur aide à Kampala, et les États-Unis imposé des interdictions de visas. Cette loi avait finalement été annulée par la Cour constitutionnelle en raison d'un vice technique.
Museveni contre l'Occident
Cette homophobie d'État reçoit en revanche un large soutien de la population ougandaise, majoritairement chrétienne et particulièrement conservatrice. Face au tollé international, un député ougandais a estimé que son pays devait se doter de nouveaux "partenaires de développement", notamment dans le monde arabe, la loi anti-LGBT étant présentée comme un rempart contre les valeurs prétendument immorales de de l'Occident. Les Ougandais "se développeront avec ou sans prêts. Nous n’avons pas besoin de pression de qui que ce soit pour savoir comment résoudre les problèmes de notre société", a déclaré le président Yoweri Museveni sur X (Twitter).
Reçue par le pape François ce 25 août à Rome, Anita Annet Among, présidente du Parlement ougandais, se targue du soutien du Vatican dans sa croisade anti-gay. "Le Saint-Père a loué le président Museveni, le Parlement d'Ouganda et les Ougandais dans leur capacité à toujours mettre Dieu en premier et pour nos efforts déployés afin de préserver les valeurs familiales", écrit-elle sur X. En marge d'un périple africain en janvier dernier, le Pape avait pourtant dit le contraire, condamnant devant des journalistes les lois qui criminalisent l'homosexualité.
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Crédit photo : Phill Magakoe / AFP