Deux nouvelles agressions homophobes ont eu lieu, ce weekend du 1er septembre 2018. L'une à Lille, l'autre à Nantes. Des actes qui s'ajoutent à la longue liste des violences LGBTphobes, dont TÊTU s'est fait le relais depuis sa relance.
Deux de plus. Deux de trop. Des agressions homophobes, qui s’ajoutent à une liste déjà bien trop longue. Ce week-end, un couple de lesbiennes a été aspergé de javel et de peinture noire à la braderie de Lille. Dans la nuit du samedi au dimanche 2 septembre, deux hommes ont également été victimes d’une agression homophobe, à Nantes cette fois : « Fin de nuit aux urgences - trois points de sutures. L’égalité est un combat de tous les jours », a tweeté l’un deux, postant une photo de son compagnon, l’arcade sourcilière ouverte.
#braderiedelille, aspergées de #javel et de peinture noire. On est un couple de filles et câest arrivé à dâautres couples gays. Aujourdâhui câest de la javel, demain câest ?... #homophobie #lgbt @SOShomophobie @stop_homophobie pic.twitter.com/tkA7YzLlBb
— Aurélie Merlo (@Aurelie_Merlo) September 2, 2018
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https://twitter.com/AlloryJordan/status/1036217262414409728
Des mots, violents et délétères
C’est malheureusement une réalité : à TÊTU, nous rendons compte d’actes LGBTphobes quasi-quotidiennement. Peut-être trop souvent, dirons certain.e.s : pourquoi nourrir un climat anxiogène ? Parce qu’il existe bel et bien. Partout en France. Et que nous ne pouvons pas fermer les yeux.
Avant de devenir des coups pieds, des coups de poing, des jets de pierre, les LGBTphobies commencent toujours par des mots, violents et délétères. Des mots qui légitiment la haine. Qui la laissent infuser dans toute la société. Un élu de Thiais qui assimile tranquillement homosexualité et zoophilie dans une vidéo. Un blogueur qui conseille aux homos de « prendre un Efferalgan avec du cyanure ». Le pape François lui-même qui prône la psychiatrie pour les enfants ayant des « tendances » homosexuelles.
Ensuite, d'autres mains s’en prennent, lâchement, aux peu d’espaces de vie, d’échanges et de recueillement dont nous disposons et où nous pensons pouvoir nous rendre sereinement. Un « LGBT hors de France » a été inscrit sur un passage piéton arc-en-ciel, à Paris. Le centre LGBT d’Avignon a été saccagé. Et l’on salit nos identités jusque dans la mort, avec la dégradation, inqualifiable tant elle est inhumaine, de la plaque à la mémoire du dernier couple homosexuel exécuté.
Une dizaine d'articles sur des agressions cet été
S’ensuivent les agressions physiques, dévastatrices. Depuis sa reprise, TÊTU en a traité une dizaine rien que ces deux derniers mois.
A Arles, un jeune argentin a été poussé dans le Rhône après avoir embrassé un garçon.
A Lille, Nathanaël, 19 ans, a été violemment projeté à terre par deux individus.
A Poitiers, deux hommes ont cru mourir après avoir été tabassés, étranglés et traînés en direction d’une rivière.
A Toulouse, une jeune fille de 18 ans ne peut plus dormir sans faire de cauchemar et fait régulièrement des crises d’angoisse depuis qu’elle a été agressée sur une place du centre-ville, alors qu’elle venait d’embrasser sa petite-amie.
A Compiègne, deux hommes ont été condamnés à six ans de prison ferme pour avoir ligoté et abandonné un homosexuel en forêt.
A Bordeaux, Damien a reçu trois coups de poings devant une discothèque gay.
Deux jeunes hébergés par Le Refuge ont été pris à partie et insultés à Marseille.
Et ce déferlement de haine ne s'abat pas que sur les personnes LGBT+. Alors qu’il sortait, lui aussi, d’une boîte de nuit gay à Lyon, un hétérosexuel a été tabassé par des agresseurs qui le pensaient homosexuel.
Et puis à Paris, récemment, le pire a été commis : Vanesa Campos, travailleuse du sexe transgenre, a été tuée alors qu’elle défendait un client face à un groupe de voleurs. Le tout dans un climat de terreur quotidien pour ces femmes, qui alertaient les forces de l'ordre depuis trois ans à propos de ces hommes, et qui vont désormais travailler au bois de Boulogne la peur au ventre. L'une d'elle racontait à TÊTU avoir un jour dénoncé un agresseur, vidéo à l'appui : « Les policiers se moquaient de moi ».
A quand un plan d'urgence contre les LGBTphobies ?
Qui sera la prochaine victime ? Combien d’actes LGBTphobes faudra-t-il lister pour que les pouvoirs publics réagissent ? Combien d’autres agressions ont eu lieu ces deux derniers mois, dans l'ombre, sans que nous ne puissions nous en faire le relais ? « Aujourd’hui c’est de la javel, demain c’est...? », alerte sur Twitter celle qui a été agressée à la braderie de Lille le week-end dernier.
En mai 2018 : le cri d’alarme de SOS Homophobie était sans appel. Les agressions LGBTphobes ont bondi de 15% en 2017. Quelles mesures ont été prises depuis ? A l'automne, des référents devraient être formés à l'accueil des victimes de discriminations LGBT+ dans les commissariats et gendarmeries. Mais nous le relations dans cet article : déposer plainte pour homophobie ou transphobie reste compliqué, encore aujourd'hui.
Les débats sur le mariage pour toutes et tous ont fait beaucoup de mal à la communauté LGBT+. Les coups et blessures se multiplient, voire s’intensifient, alors que les plaies assénées dans le passé n’ont pas encore cicatrisé.
En décembre 2016, le gouvernement annonçait un grand « plan de mobilisation contre la haine et les discriminations anti-LGBT », coordonné par la Dilcrah, et dont un bilan à mi-parcours est attendu dans les prochaines semaines. Celui-ci promet « une République exemplaire contre la haine et les discriminations anti-LGBT ». Il est temps de transformer ces paroles en actes.
Cher.e.s Emmanuel Macron, Nicole Belloubet, Marlène Schiappa, Gérard Collomb : à quand un réel plan d’urgence contre les LGBTphobies, à la mesure de la haine dont nous sommes victimes ?
Crédit photo : Julie Missbutterflies/Flickr/CC.