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États-UnisDe la Floride à l'Utah, ces États américains gangrénés par des lois LGBTphobes

Par Gabriel Moullec le 10/05/2022
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Si la poussée réactionnaire aux États-Unis est désormais sous le feu des projecteurs avec la menace que fait peser la Cour suprême sur le droit à l'avortement, voilà déjà deux ans que la droite américaine n'en finit plus de s'attaquer aux droits LGBTQI+ dans les États contrôlés par ses élus. Tour d'horizon de cette course à l'échalote LGBTphobe…

"Nos corps, nos choix", entend-on scander dans les manifestations aux États-Unis depuis la révélation, par le site d'information Politico le 2 mai, d'un avant-projet de la Cour suprême qui pourrait mettre fin à presque 50 ans de jurisprudence garantissant à toutes les Américaines le droit à l'avortement. Comme une acmé, inattendue et terrifiante, du virage réactionnaire dans lequel s'enfonce une partie du pays sous la poussé conservatrice que, paradoxalement, l'échec de Donald Trump à se faire réélire en 2020 n'a pas refroidie, bien au contraire. Ainsi dès mars 2022, en à peine trois mois, le nombre de projets de loi anti-LGBT portés devant les assemblées législatives de différents États du pays avait allègrement battu un record.

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"Lorsque les livres d’histoire seront écrits, je suis certain que la promotion de l’égalité des personnes LGBTQ+ sera l’une des principales réalisations de l’administration Biden-Harris", déclarait pourtant Reggie Greer, actuel conseiller chargé des questions LGBTQI+ la Maison-Blanche, en septembre 2020. Près de deux ans plus tard, c'est l'inverse qui est en train de se dessiner : Joe Biden et sa vice-présidente Kamala Harris, première femme à ce poste de l'histoire, assistent comme impuissants au délitement de nombreux droits des minorités dans ce pays fédéral. Ciblant principalement les personnes trans ainsi que les questions d'orientation sexuelle ou d'identité de genre à l'école, de nombreux États du pays s'adonnent à une LGBTphobie décomplexée, complètement en décalage avec leur temps – un jeune sur cinq s'identifie comme LGBTQI+ outre-Atlantique – ainsi qu'avec le risque avéré pour les jeunes concernés, près de la moitié ayant pensé au suicide l'an dernier. En voici l'inventaire…

Texas

Deuxième État le plus peuplé du pays derrière la Californie, le Texas s'engage allègrement sur le chemin de l'homophobie d'État. Traditionnellement conservateur, il est dirigé depuis 2014 par le gouverneur Greg Abbott, qui fait partie des challengers pressentis de Donald Trump en vue de l'investiture du Parti républicain pour la présidentielle de 2024. Et il n'y va pas de main morte pour se montrer plus trumpiste que l'orignal sur le plan des LGBTphobies. Après avoir exclu les jeunes trans des compétitions sportives scolaires en 2021, le gouverneur républicain mène désormais une bataille pour criminaliser les parents qui accompagnent leurs enfants dans leur transition de genre. En février, il avait carrément ordonné le lancement d'enquêtes sur les familles concernées pour maltraitance ; un tribunal a jugé inconstitutionnelle cette directive, entraînant la suspension des procédures jusqu'à une nouvelle audience le 11 juillet.

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Floride

Ron DeSantis, l'actuel gouverneur de Floride et ancien poulain de Donald Trump, est comme son homologue du Texas cité parmi les candidats potentiels du Parti républicain à l'investiture pour la présidentielle de 2024, et emprunte les mêmes voies pour satisfaire son électorat réactionnaire. En 2021, il a aussi fait voter l'interdiction pour les jeunes trans de participer aux compétitions sportives à l'école dans la catégorie en accord avec leur identité de genre. Un an plus tard, c'est la loi "Don't Say Gay" qui a été adoptée au parlement de Floride, censurant les questions d'orientation sexuelle et d'identité de genre à l'école. En mars 2022, le sénat de Floride a versé son obole à cette politique réactionnaire en votant le "Stop Woke Act", une loi interdisant d'aborder les "théories critiques de la race" dans les classes.

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Tennessee

Gouverné par Bill Lee depuis 2019, le Tennessee fait partie des 29 États du pays n'offrant aucune protection juridique aux personnes LGBTQI+ contre les discriminations. Depuis 2020, il permet même aux agences d'adoption de refuser les couples homosexuels au nom de "croyances religieuses sincères". Un projet de loi à l'étude vise désormais à interdire "d'utiliser des manuels et du matériel pédagogique [...] qui promeuvent, normalisent, soutiennent ou abordent les problèmes ou les modes de vie des lesbiennes, gays, bisexuels ou transgenres". Depuis 2021, le Tennessee multiplie les législations transphobes, que ce soit sur les compétitions sportives ou même l'utilisation des toilettes, devenant par exemple le premier État à obliger les entreprises et bâtiments gouvernementaux ouverts au public à afficher un panneau s'ils laissent les personnes transgenres utiliser les installations associées à leur identité de genre.

Iowa

Dans cet État du Midwest gouverné par Kim Reynolds, toujours du Parti républicain, les personnes transgenres sont protégées par la loi et bénéficient du droit à la dignité et à l'égalité de traitement. Toutefois, avec des assemblées dominées par le Grand Old Party et dans la course LGBTphobe qui fait rage entre les états Républicains, l'Iowa est devenu en mars 2022 le 11e États du pays à bannir les femmes trans des équipes sportives féminines à l'école. Et en 2020, le Parlement a rejeté l'interdiction de la "Gay Panic Defense", une ligne de défense qui permet d'expliquer l'agression d'une personne LGBTQI+ purement et simplement par la peur qu'elle aurait provoquée…

Alabama

Dans cet État du sud-est gouverné par la Républicaine Kay Ivey, les membres du Grand Old Party ont promulgué cette année une loi qui interdit la prise de bloqueurs de puberté ou d'hormones aux jeunes trans, faisant courir aux médecins jusqu'à dix ans de prison en cas de non-respect. Le texte oblige au passage les écoles à "divulguer certains renseignements sur les élèves aux parents", notamment d'outer les mineurs trans. Un autre projet de loi a été promulgué au mois d'avril par le gouverneur interdisant aux enfants trans d'utiliser les toilettes en fonction de leur identité de genre.

Oklahoma

Gouverné par le Républicain Kevin Stitt, l'Oklahoma (Midwest) et sa majorité réactionnaire dans les deux assemblées souhaite interdire aux écoles et aux bibliothèques scolaires de proposer des livres portant sur "l'étude du sexe, des modes de vie sexuels ou de l'activité sexuelle". Fin mars, le Sénat adoptait à son tour l'interdiction pour les femmes trans de concourir dans des équipes ou des compétitions sportives scolaires en cohérence avec leur identité de genre.

Mississipi

Dans cet État voisin du Tennessee et de l'Arkansas, gouverné par le Républicain Tate Reeves, voilà un an que les jeunes trans ne peuvent plus non plus participer aux compétitions sportives à l'école dans des équipes correspondant à leur identité de genre. En novembre 2021, quelques jours seulement après avoir simplifié le processus pour changer de genre sur sa carte d'identité ou son permis de conduire, le département de la sécurité publique de l'État avait fait marche arrière.

Arizona

Signées par Doug Doucey, le gouverneur du Parti républicain, deux lois récentes ciblent les jeunes trans : l'une interdisant aux médecins d'effectuer une "chirurgie de changement de sexe irréversible à une personne âgée de moins de dix-huit ans", mais aussi une deuxième interdisant aux jeunes femmes trans de concourir dans des compétions sportives féminines.

Montana

Gouverné par le Républicain Greg Gianforte, le Montana interdit depuis le mois de mai 2021 aux jeunes filles de trans de concourir en fonction de leur identité de genre dans les compétitions scolaires. En effet, la loi dispose qu'elles doivent participer aux compétitions selon leur sexe biologique et que "les sports destinés aux femmes, aux femmes ou aux filles peuvent ne pas être ouverts aux étudiants de sexe masculin". Une autre loi incombait aux jeunes trans de recourir à une "intervention chirurgicale" pour changer de genre à l'État civil jusqu'à ce qu'une juge suspende temporairement le texte au motif qu'il serait inconstitutionnel.

Arkansas

Gouverné par le Républicain Asa Hutchinson depuis 2015, l'Arkansas malmène les jeunes trans qui font face depuis un certain temps à de nombreuses offensives. En effet, en plus d'interdire aux jeunes filles trans de participer à des sports en fonction de leur identité de genre, l'État avait promulgué une loi qui visait à interdire les soins d'affirmation pour les jeunes trans mineurs. Heureusement, une juge fédérale a suspendu temporairement ce texte.

Dakota du Sud, Dakota du Nord, Virginie Occidentale, Géorgie, Utah

Ces cinq États interdisent aux jeunes filles trans de participer aux compétitions sportives en fonction de leur identité de genre, un constat aussi dramatique que tragique dans la mesure où selon un récent rapport rendu par le Trans Youth Project, les jeunes trans ont une prévalence largement plus élevée que les moyenne à développer des pensées suicidaires mais aussi à souffrir de troubles liés à la dépression ou encore à l'anxiété.

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Crédit photo : CHANDAN KHANNA/AFP